La proposition de loi créant l'infraction d'homicide routier adoptée à l’Assemblée en deuxième lecture

Les députés ont largement adopté, ce 3 juin, la proposition de loi créant l'infraction d'homicide routier et visant à lutter contre la violence routière. Ce texte consensuel, soutenu par le gouvernement, doit désormais retourner au Sénat pour une adoption définitive espérée d’ici l’été par les associations de familles de victimes.

La proposition de loi créant l'infraction d'homicide routier et visant à lutter contre la violence routière, déjà approuvée par les deux chambres en 2024 (lire notre article) avant que la dissolution de l’Assemblée ne vienne interrompre son chemin parlementaire, a de nouveau reçu le feu vert des députés, ce 3 juin, avec 194 voix pour et 6 contre. 

"Victoire ! Pour vous, ce soir, nous avons voté la création de l’homicide routier afin que demain, l’impunité n’ait plus sa place sur la route !", s’est félicité sur X le député Éric Pauget (DR), à l’origine de ce texte transpartisan, soutenu par le gouvernement, et qui doit à présent retourner au Sénat. "Désormais, les conducteurs responsables d’accidents mortels sous l'emprise de l’alcool ou de stupéfiants, notamment, pourront être poursuivis pour "délit d’homicide routier" et non pour "homicide involontaire" comme c’est aujourd’hui le cas", a également réagi, par communiqué, François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre de l’Intérieur, formulant "le vœu d’un vote conforme au Sénat afin que ce texte puisse entrer rapidement en vigueur". 

"La nouvelle qualification dira beaucoup mieux les choses. L’homicide routier, c’est ce que vivent les familles", a estimé le député Hervé Saulignac (Soc.), l’un des signataires de la PPL. Une avancée avant tout "symbolique" "pour mieux qualifier pénalement les comportements à risque : conduite sous emprise, sans permis, refus d’obtempérer, grands excès de vitesse", a précisé la députée Béatrice Piron (Horizons), également à l’origine du texte. 

La France insoumise s’est quant à elle divisée entre votes contre et abstentions. "Cette loi n’est pas demandée par les juges, elle n’est pas demandée par les avocats", a ainsi déclaré le député Rodrigo Arenas, estimant qu’il serait "hypocrite de faire croire aux familles de victimes que cette loi va arranger les choses". 

Peu de modifications ont été apportées en séance. En revanche, lors du passage en commission des lois, le 30 avril dernier, plusieurs rectifications du Sénat "pas tout à fait adaptées", notamment à l’article 1er, ont fait les frais de la navette. La Chambre haute avait en particulier modifié l’architecture des infractions concernées et supprimé un certain nombre de circonstances aggravantes. Le dispositif adopté par l’Assemblée, en première lecture, s’agissant de la durée maximale de suspension du permis de conduire en cas d’atteinte volontaire à l’intégrité physique (art.1er ter) a également été rétabli. De même que l’article 1er quater qui prévoit la mise en place d’actions destinées à prévenir le risque de récidive des violences routières. 

Une satisfaction pour les familles de victimes

Au coeur du texte, la création d’un délit spécifique d’homicide et blessures routiers, lorsqu’ils sont commis par le conducteur fautif dans des circonstances résultant d’actes délibérés. Il vise à "sortir de la binarité" – homicide involontaire ou homicide volontaire – "en créant une infraction indépendante, autonome, lorsque seront retenues des circonstances aggravantes", a relevé Éric Pauget. Exit le terme "involontaire" insupportable pour les familles et associations de victimes, et dont les revendications ont été entendues. L’association Antoine-Alléno a ainsi exprimé "sa profonde satisfaction" suite au vote des députés, soulignant que près de 1.250 personnes sont décédées dans un accident où au moins un conducteur était positif à l’alcool et/ou aux stupéfiants en 2024, selon le bilan définitif de l’accidentalité routière en 2024. Pour le chef étoilé Yannick Alléno, qui a perdu son fils dans de telles circonstances, "l’adoption de ce texte permet non seulement de rendre justice aux familles endeuillées, mais surtout d'engager une prise de conscience collective et de mesurer la gravité des faits en cas d’homicide routier". Il appelle désormais à une adoption définitive avant la fin du mois de juin, la période estivale étant "traditionnellement marquée par une recrudescence des drames sur nos routes". 

Au-delà de la répression, le texte (art.1er bis A) améliore aussi l’information des parties civiles dans la procédure judiciaire : même si elles n’ont pas fait appel au civil, elles seront avisées de la déclaration d’appel sur l’action publique, et de la date d’audience.

Si les quantums des peines ont été maintenus, les circonstances aggravantes susceptibles de constituer un homicide routier ont été complétées, notamment par le refus d'obtempérer et les "rodéos" urbains. 

Des peines complémentaires sont également prévues : suspension ou annulation du permis de conduire, confiscation du véhicule, obligation d’installer un éthylotest antidémarrage, interdiction de détenir une arme, etc.

Un autre article (1er quinquies) érige en délit le dépassement d’au moins 50 km/h de la vitesse autorisée, dès la première infraction, et donc y compris hors récidive, tout en conservant le quantum des peines actuellement prévu en cas de récidive, de trois mois d’emprisonnement et de 3.750 euros d’amende. En cas d’homicide ou de blessures routiers, le conducteur devra en outre se soumettre à un examen médical (réalisé à ses frais), dans les soixante-douze heures à compter de l’accident (si son état de santé le permet) pour déterminer notamment son aptitude à conduire (art.3). 

 

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