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Transports - L'Arafer affirme son rôle d'aiguillon pour les décideurs publics

Conçue comme une instance technique, l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (Arafer) affirme progressivement son rôle d'aiguillon pour les décideurs locaux s'intéressant aux questions de transports. A sa tête jusqu'à l'été prochain, Pierre Cardo est un ancien élu des Yvelines. Réputé pour sa libre expression, il n'hésite pas à tirer à boulets rouges sur la trajectoire financière de SNCF Réseau tout en se voulant rassurant sur la concurrence que les autocars Macron font aux services de transport public conventionné. Le 10 mars, des sénateurs l'ont auditionné sur ces enjeux.

Une audition de Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (Arafer) aux compétences depuis peu élargies, s'est tenue le 10 mars devant la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable du Sénat. L'ancien maire et conseiller général des Yvelines y a rappelé que si un élu et non un haut fonctionnaire a été placé à la tête de cette instance au départ peu connue et implantée à la fois au Mans et à Paris - depuis, le gros de ses effectifs ont migré à Paris - c'est justement pour garantir son indépendance. Laquelle, sur le plan financier, reste toutefois écornée par un plafonnement de son budget.

Manque de visibilité

Après cinq années d'activités, son mandat (non renouvelable) se termine cet été. Satisfait des nouvelles compétences qui lui ont été attribuées - la loi Macron a élargi la compétence du "gendarme du rail" aux autocars (depuis octobre 2015) et aux autoroutes (depuis 2016) - Pierre Cardo alerte avant tout sur la trajectoire financière prise par le gestionnaire d'infrastructure et Epic SNCF Réseau : "Force est de constater que la règle d'or impliquant l'équilibre financier de tout nouvel investissement de SNCF Réseau n'est pas mise en œuvre à ce jour". En l'absence du contrat de performance Etat-SNCF Réseau, un an et demi après le vote de la loi de réforme ferroviaire, le régulateur peine ainsi à vérifier le respect de cette trajectoire financière. Il déplore le retard pris et le manque de visibilité sur la tournure de ce contrat indispensable pour planifier la régénération du réseau ferré, à l'heure où la spirale d'endettement du système ferroviaire reste préoccupante : "La loi avait fixé un objectif pour contenir cette dette mais visiblement nous sommes déjà sortis des clous."

Des gares de voyageurs aux sillons de fret

Concernant la gestion des gares de voyageurs, Pierre Cardo est revenu sur les différends opposant des autorités organisatrices de transport au gestionnaire Gares & Connexions, branche de SNCF Mobilités. Il s'agit de la région Pays de la Loire et du Syndicat des transports d'Ile-de-France (Stif). Sont en jeu, principalement, la transparence financière du gestionnaire des gares, le coût d'immobilisation du capital sur lequel sont calculées les redevances et les tarifs des services de base qu'il applique. Concernant le fret et les difficultés d'attribution des sillons, Pierre Cardo a rappelé que l'Arafer a proposé pour améliorer les choses d'expérimenter un mécanisme incitatif d'allocation des sillons assorti de pénalités progressives, que la cour d'appel de Paris vient de valider mais qui passe en cassation.

Un observatoire du marché des transports terrestres

Par ailleurs, Pierre Cardo est revenu sur le transport interurbain et le soin confié au régulateur de veiller à son contrôle. Les régions ou toute autre autorité organisatrice de transport ont la possibilité de l'interpeller si elles estiment que certaines lignes de cars créées suite à la loi Macron risquent de porter atteinte à l'équilibre économique de certaines lignes TER. Il recense 116 déclarations de nouvelles liaisons de moins de 100 kilomètres entre deux arrêts. 24 d'entre elles ont fait l'objet d'une saisie par une AOT : "L'impact sur l'activité et les flux des TER n'est pas toujours avéré. Sur les TET non plus, selon des études c'est plus le covoiturage qui prend place sur ce créneau". Pour aider les décideurs et élus à se faire une idée de l'évolution de ces transports terrestres, l'Arafer veut lancer fin mars un observatoire. Enfin, concernant le contrôle de l'attribution des marchés et des contrats de concessions dans le secteur autoroutier, il estime qu'à défaut de moyens spécifiques permettant un tel contrôle, le rôle de l'Arafer en la matière restera limité : "Nous ferons le job mais il ne faut pas s'attendre à des miracles."