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Le Comité des régions exhorte l’Europe à légiférer sur les IGP industrielles et artisanales

Dans un avis de la conseillère de Nouvelle-Aquitaine Martine Pinville adopté le 13 octobre à l'unanimité, le Comité des régions exhorte la Commission à se doter d'une législation sur les indications géographiques industrielles et artisanales. Seul moyen de les protéger efficacement au niveau international.

Si la France s’est dotée d'un système d’indications géographiques protégées industrielles et artisanales (IGPIA) dès 2015, en pleine affaire "Laguiole", ce n’est toujours pas le cas au niveau européen, contrairement aux produits agricoles. Même si les choses bougent. Dans un plan d’action en faveur de la propriété intellectuelle présenté le 25 novembre 2020, la Commission avait en effet ouvert cette possibilité. Or pour le Comité des régions, le temps est venu de traduire ces bonnes intentions dans la loi européenne. C’est le sens d’un avis de l’élue de Nouvelle-Aquitaine Martine Pinville adopté à l’unanimité le 13 octobre. Bien placée pour connaître le sujet - elle était secrétaire d’État au Commerce de François Hollande au moment de l’institution du dispositif français -, la conseillère régionale plaide pour un nouveau règlement qui "permettrait de créer les conditions d’une protection équivalente et homogène des IGIA (indications géographiques industrielles et artisanales) dans l’ensemble du marché intérieur tout en évitant des distorsions de concurrence". L’avis souligne aussi "le rôle que peuvent jouer et que jouent déjà certaines collectivités locales et régionales dans l’accompagnement des filières, aussi bien dans la phase d’élaboration des IGPIA (temps de concertation) que dans la mise en œuvre (développement d’outils de communication, soutien à la certification, conseil juridique, etc.) et la promotion".

Première région française en nombre d'IGPIA

Ce n’est pas un hasard si l’initiative vient de la Nouvelle-Aquitaine. C’est aujourd’hui la première région française en nombre d’IGPIA. Elle en compte 6 sur les 12 recensées : porcelaine de Limoges, tapis et tapisserie d'Aubusson, charentaise de Charente-Périgord, pierre d'Arudy, linge basque. La première homologation de l’Institut national de la propriété industrielle (Inpi) avait été accordée en 2016 aux sièges de Liffol (dans les Vosges), suivis du granit de Bretagne. Les quatre autres IGP reconnues sont le grenat de Perpignan, la pierre de Bourgogne, les pierres marbrières de Rhône-Alpes et les parfums de Grasse. Deux nouvelles demandes d’homologations sont en cours d’instruction : le couteau de Laguiole et les poteries d’Alsace. Mais on est encore très loin des 200 IGPIA espérées au lancement du dispositif. La procédure est complexe et l’Inpi sait se montrer sourcilleux. Plusieurs dossiers ont essuyé un rejet, comme le célèbre savon de Marseille ou l’espadrille de Mauléon dans le Pays basque.
L’indication géographique "protège des produits qui ont une origine géographique précise et qui possèdent des qualités, une notoriété ou des caractéristiques liées à ce lieu d'origine", rappelle la région Nouvelle Aquitaine, dans un communiqué du 14 octobre. C’est une garantie pour les consommateurs et pour les artisans c’est non seulement un moyen de valoriser leur savoir-faire mais aussi "un outil juridique efficace contre toute tromperie, actes de concurrence déloyale et d'éventuelles contrefaçon".

Une compétence exclusive de l'UE

À l’échelle européenne, les enjeux sont de taille. Selon la Commission européenne, les secteurs "à forte intensité de propriété intellectuelle" représentent 45 % du PIB total et 93 % de l’ensemble des exportations de l’UE. La reconnaissance de ces IGP manufacturées à cette échelle auraient une grande importance au plan international. Dans une décision de 2017 (CJUE, grande chambre, 25 octobre 2017 - affaire C 389/15 – ECLI : EU : C : 2017 : 798), la Cour de justice de l'Union européenne avait considéré que les indications géographiques relèvent de la compétence exclusive de l’Union européenne. À ce titre, l'adhésion de la France à l'acte de Genève en janvier 2021 ne permet pas d'enregistrer les indications géographiques françaises auprès de l'OMPI (Organisation mondiale de la protection intellectuelle), comme le ministère de l'Économie l'a récemment fait valoir (voir notre article du 29 avril 2021). Seule la généralisation des IGPIA au niveau européen leur permettrait d'être protégés au même niveau que les produits agro-alimentaires.
"Forte du soutien du Comité européen des régions et de ses 329 membres représentants les collectivités locales et régionales de l'Union européenne, la région Nouvelle-Aquitaine poursuivra sa mobilisation notamment dans le cadre de la présidence française de l'Union européenne au premier semestre 2022", indique-t-elle.