Le Conseil national de la refondation promis à des déclinaisons territoriales

Le lancement du Conseil national de la refondation (CNR) ce jeudi 8 septembre se fera finalement en présence des représentants des élus locaux, certains d'entre eux ayant préalablement été reçus lundi soir par le chef de l'Etat et ayant à cette occasion reçu certaines assurances. L'Elysée insiste sur le fait que la journée de jeudi n'est que le point de départ d'une démarche inédite au long cours visant, en croisant les visions d'acteurs différents, à dégager des solutions nouvelles sur l'école, la santé, le "bien vieillir", l'emploi et la transition écologique. Et fait savoir que cette démarche sera très vite déclinée "territoire par territoire" par l'organisation d'échanges entre acteurs locaux sur chacun de ces thèmes.

Le Conseil national de la refondation (CNR) voulu par Emmanuel Macron a beaucoup fait parler de lui avant même d'avoir vu le jour. Surtout de la part de ceux qui ne comptent pas (ou ne comptaient initialement pas) y participer (voir notre article du 1er septembre). Mais aussi parce que l'objet reste mal identifié. On sait qu'il y aura cette journée de lancement ce jeudi 8 septembre autour d'Emmanuel Macron à Marcoussis dans l'Essonne. Sous quelle forme ? Et que se passera-t-il au-delà de cette journée ?

On se souvient que l'idée du CNR avait été énoncée le 3 juin dans la presse quotidienne régionale par le président de la République fraîchement élu (voir notre article du 7 juin). Mais depuis, le format et les sujets privilégiés ont quelque peu évolué. Quelques éléments de cadrage ont été fournis à la presse par l'Elysée ce 6 septembre.

Les objectifs ou enjeux affichés restent les mêmes : "revivifier la démocratie", bâtir des solutions nouvelles en "sortant des silos" et des "postures", mettre en place "une forme de dialogue renouvelée" entre acteurs et privilégier la transversalité pour "transformer les politiques publiques"… Le tout sur cinq thèmes préalablement identifiés comme prioritaires : l'école, la santé, le "bien vieillir", l'emploi, la transition écologique. En sachant que d'autres thèmes pourront éventuellement venir s'y adjoindre en cours de route.

Quel déroulé jeudi à Marcoussis ?

La journée de jeudi entend privilégier "un dialogue direct, franc, sans filtre" entre le chef de l'Etat et la cinquantaine de participants attendus (élus, partenaires sociaux, représentants associatifs…). Après un propos présidentiel introductif, les échanges de la matinée doivent se centrer sur la méthode du CNR. L'après-midi, place aux exposés du gouverneur de la Banque de France, du Premier président de la Cour des comptes et de la présidente du Haut conseil pour le climat sur "les grands défis" actuels du pays. Puis à une prise de parole d'Elisabeth Borne. Le tout devant servir de base à des "échanges interactifs", cette fois sur le fond des sujets.

L'objectif, à la fin de cette journée de lancement, est de "mettre sur la table" un certain nombre de problématiques dominantes et de définir les "manières de les aborder". Mais aussi les manières de "les décliner territorialement". Car l'entourage d'Emmanuel Macron insiste beaucoup là-dessus : suite à ce "point de départ" du 8 septembre, et au-delà des "points réguliers" qui auront lieu ensuite ("se revoir pour mesurer ensemble l'avancée des chantiers"), le cœur de la démarche du CNR est bien, sur chaque thème, d'organiser des échanges "territoire par territoire" avec "les bons acteurs".

Réunir "les bons interlocuteurs" à l'échelle du "bassin de vie"

Quel sera l'échelon territorial privilégié ? Cela "dépendra des thèmes". Le plus souvent, il s'agira du fameux "bassin de vie". Mais l'échelle pourra par exemple être plus large sur la santé… et plus resserrée sur l'école. Sur l'école, il est même envisagé de "descendre au niveau de chaque établissement scolaire" en impliquant à la fois la communauté éducative, les parents, les élus locaux, les associations…

Sur chaque thème et sur chaque territoire, "il s'agira de rassembler toutes les parties prenantes", de "mettre tous les bons interlocuteurs autour de la table", l'Elysée mettant l'accent sur la multiplicité des "décideurs" de toutes les politiques publiques, qu'il s'agisse par exemple d'accès aux soins ou d'emploi.

Il s'agira aussi, dans certains cas, "d'aller chercher les attentes des citoyens, de recueillir leur parole" (par exemple sur le grand âge). Il y aura donc bien, "au niveau des territoires, un exercice de participation citoyenne", assure l'Elysée, sachant que la réunion de jeudi, elle, ne comprendra finalement pas de panel citoyen.

Quels que soient les sujets, ces "échanges" territoriaux devraient évidemment impliquer très directement les collectivités locales et leurs élus. Et l'Elysée de se féliciter au passage que les huit associations d'élus invitées ce jeudi aient décidé de répondre présentes : Association des maires de France, Départements de France, Régions de France, Intercommunalités de France, France urbaine, Association des petites villes, Villes de France, Association des maires ruraux.

En parallèle, des rendez-vous réguliers avec Territoires Unis

Pour les trois premières d'entre elles, officiellement, rien n'était joué. Elles avaient jusqu'à lundi déclaré douter que le CNR soit "le format adapté" pour un dialogue avec les collectivités. Jusqu'à ce qu'Emmanuel Macron leur propose de les recevoir au préalable.

"Nous irons parce que nous avons obtenu des réunions de travail régulières avec le président de la République pour échanger sur les problèmes spécifiques que nous rencontrons dans l'exercice de nos compétences", a déclaré lundi soir François Sauvadet, le président de Départements de France, à l'issue de ce rendez-vous à l'Elysée.

"Nous avons convenu que l'on ait au moins deux fois par an des rendez-vous de travail avec le président de la République pour faire en sorte que les réponses apportées à nos concitoyens soient plus rapides et plus adaptées", a confirmé Carole Delga, la présidente de Régions de France, qui participait également à la réunion, tout comme David Lisnard, le président de l'Association des maires de France.

"Nous partageons les urgences à agir contre les inégalités et le réchauffement climatique", a ajouté Carole Delga. "Il faut donc avoir plus de pouvoir localement et le président a partagé ce constat", a-t-elle souligné, assurant qu'Emmanuel Macron "a exprimé sa volonté d'avoir une nouvelle ère de dialogue avec les collectivités locales". Ces réunions régulières avec le chef de l'Etat permettent de "repartir sur un nouveau cycle de discussions", s'est félicité François Sauvadet, précisant que la prochaine serait "liée à la décentralisation".

Il s'agira, ont ajouté mardi les trois présidents dans un communiqué commun estampillé Territoires Unis, de "travailler sur les perspectives d’amélioration de la décentralisation et de fixer un cap aux discussions d’ores et déjà engagées avec le gouvernement sous l’égide d’Elisabeth Borne". Emmanuel Macron aurait en outre "réitéré son engagement à maintenir les moyens financiers des collectivités locales". De quoi, donc, lever "les principales objections que Territoires Unis avait pour prendre part aux échanges prévus dans le cadre de la première réunion du CNR".

L'interco et l'urbain pas assez "considérés" ?

Cette réunion avec David Lisnard, François Sauvadet et Carole Delga "a permis de parler du CNR, mais pas uniquement de cela", a confirmé l'Elysée, où l'on évoque l'enjeu plus large des "relations Etat-collectivités" et où l'on rappelle qu'il s'agissait de la première rencontre depuis la réélection d'Emmanuel Macron.

Les présidents d'Intercommunalités de France et de France urbaine ont regretté que seuls les présidents des trois associations composant Territoires Unis aient été conviés lundi à l'Elysée : "Vous avez décidé de recevoir certaines associations d’élus, dans un cadre séparé afin de conduire un dialogue direct et spécifique concernant les problématiques des collectivités locales. Or, malgré le rôle central de l’échelon intercommunal et des grandes villes dans la mise en œuvre d’une très grande partie des politiques publiques locales, notamment celles essentielles à la transition écologique de notre pays, nos associations n'ont jusqu’à présent pas été conviées à prendre part à une démarche comparable", déplorent-ils dans un courrier commun adressé dès lundi au chef de l'Etat. Rappelant que "l'ensemble des associations d’élus a engagé la semaine dernière un cycle de rencontres initié par les ministres Christophe Béchu, Gabriel Attal et Caroline Cayeux" (voir notre article), Sébastien Martin et Johanna Rolland attendent eux aussi "une audience dans les plus brefs délais afin de définir les modalités par lesquelles [leur] échelon territorial sera pleinement considéré dans une démarche complémentaire au CNR".

"Premières traductions concrètes dès 2023"

Difficile pour l'heure de percevoir comment la "démarche" du CNR va s'organiser en pratique dans la durée, notamment dans ses déclinaisons territoriales. Ni comment ces travaux s'articuleront avec les réformes déjà annoncées par l'exécutif ou les diverses concertations engagées par ailleurs. L'Elysée prévoit que "dès les semaines à venir", certains "chantiers" pourront être lancés et que les travaux se poursuivront cet hiver, avec de "premières traductions concrètes dès 2023". Certaines de ces traductions seront législatives, redonnant ainsi pleinement sa place au Parlement, d'autres pas.

L'ensemble du suivi sera en tout cas assuré par le Haut commissariat au Plan, y compris dans une dimension de "capitalisation" d'expériences locales réussies. Il est prévu qu'un site internet dédié permette à chacun de s'informer de l'avancée du "processus".

 

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