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Logement - Le Conseil national des barreaux s'inquiète des projets de "déjudiciarisation" des saisies immobilières

Installée le 18 janvier dernier par la ministre de la Justice, la commission présidée par le recteur Serge Guinchard est notamment chargée de réfléchir aux possibilités de "déjudiciariser" certaines procédures. Jusqu'à présent, la commission, qui doit remettre ses conclusions à la fin du mois de juin, s'est surtout fait connaître par son travail sur l'éventualité de confier aux notaires la procédure de divorce à l'amiable (le seul élément directement cité dans la lettre de mission de la commission). Finalement, elle s'apprêterait plutôt à déconseiller ce transfert. Mais ce débat très médiatique, qui oppose avocats et notaires, a relégué au second plan d'autres questions tout aussi importantes. Certaines d'entre elles intéressent très directement le secteur du logement.
Dans un communiqué, le Conseil national des barreaux (CNB) s'inquiète ainsi d'une réforme qui pourrait être suggérée par la commission et qui exclurait les saisies-ventes immobilières du contrôle du juge. Le CNB dénonce par avance "tout projet qui priverait les débiteurs de la garantie que la vente forcée et contrainte d'un bien leur appartenant se ferait en catimini, à la discrétion du créancier". Il rappelle que, dans la procédure actuelle, le juge s'assure "du bien-fondé de la poursuite et de la régularité de celle-ci par rapport aux dispositions de l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et de l'article 1er du protocole n°1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales", qui consacre le droit de propriété. Soulignant que la saisie-vente est un conflit de droits, "qui ne saurait échapper au contrôle du juge", le CNB considère que toute déjudiciarisation en ce domaine constituerait "une atteinte manifeste à la protection des plus faibles" et entend par conséquent demeurer vigilant "pour que toute vente forcée en matière de saisie immobilière [...] le soit en pleine transparence, notamment au travers d'une publicité garantissant un juste prix". Le CNB s'inquiète d'autant plus de ces projets de réforme que les saisies-ventes ont déjà été transformées en profondeur par l'ordonnance du 21 avril 2006 réformant la saisie immobilière et par le décret du 27 juillet 2006 relatif aux procédures de saisie immobilière et de distribution du prix d'un immeuble.
D'autres procédures concernant, pour une large part, le secteur du logement pourraient également faire l'objet d'une déjudiciarisation partielle. C'est le cas en particulier des procédures de surendettement. Les compétences de la Banque de France, qui gère le traitement non contentieux des dossiers, pourraient ainsi être accrues, afin de réduire le nombre d'affaires de surendettement évoquées devant les tribunaux faute d'accord entre les parties.

 

Jean-Noël Escudié / PCA

 

Référence : Ordonnance 2006-461 du 21 avril 2006 réformant la saisie immobilière (JO du 22 avril 2006).