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Transports - Le gouvernement renonce à l'autoroute ferroviaire Atlantique

Le secrétaire d'Etat chargé des Transports, Alain Vidalies, a annoncé jeudi matin 30 avril, à la radio France Bleu Gascogne, que "l'Etat ne va pas signer [le] contrat pour la mise en oeuvre de l'autoroute ferroviaire" entre le Pas-de-Calais et les Landes, qui devait permettre à 85.000 camions par an de circuler par rail et non sur la route. En cause, selon lui, "l'équilibre total de ce dossier (qui) a amené à constater qu'il y avait des conséquences pour les populations, que ce projet n'était pas financièrement équilibré, qu'il y avait un gros risque pour l'Etat". Il a ensuite expliqué à l'AFP, lors d'un déplacement dans les Pyrénées-Atlantiques, que cette décision avait été prise la veille au soir très tard, "en accord avec le Premier ministre" Manuel Valls, et que "le gouvernement considère que l'idée était bonne mais le site (pour le terminal principal, ndlr) était très mal choisi, avec une fragilité juridique du dossier très importante, à savoir la question d'impact sur la population qui n'a pas été suffisamment étudié par l'enquête publique".
Pour rappel, les autoroutes ferroviaires sont des trains spéciaux, qui circulent sur le réseau existant, et transportent les remorques des poids lourds. Il en existe deux en France. La première relie Bettembourg (Luxembourg) au Boulou (Pyrénées-Orientales). Son prolongement jusqu'à Calais avait été annoncé, mais, interrogé jeudi 30 avril, Alain Vidalies s'est refusé à commenter. La deuxième, l'Alpine, franchit les Alpes et transporte environ 25.000 poids lourds par an. Celle de l'Atlantique, annoncée en septembre 2013, devait relier Dourge (Pas-de-Calais) à Tarnos (Landes), à partir de début 2016. "C'est un dossier qui avait reçu un avis négatif du conseil général de l'investissement, (...) qui constatait que ce projet supposait 375 millions d'euros de financement public, principalement de l'Etat et de Réseau ferré de France", le gestionnaire d'infrastructures, devenu SNCF Réseau, avait déclaré sur France Bleu Gascogne Alain Vidalies, lui-même élu des Landes. Le président (PS) du conseil départemental, Henri Emmanuelli, a salué dans un communiqué une "décision (...) conforme à l'intérêt général".

"Trouver un autre site"

Le site du ministère de l'Ecologie, dont dépendent les Transports, indique que "le contrat de concession entre l'Etat et VIIA Atlantique, filiale de la SNCF, a été signé le 20 mars 2014", mais le secrétariat d'Etat aux Transports souligne qu'il s'agit d'un avant-contrat, auquel aucune indemnité n'est liée. Dans le cas de l'annulation, par le tribunal administratif, d'un contrat définitivement conclu, "l'indemnité à la charge de l'Etat était de 175 millions d'euros", a encore souligné Alain Vidalies.
Le gouvernement affirme que le projet n'est pas abandonné: "notre objectif est de trouver un autre site (pour le terminal), en priorité en engageant immédiatement des pourparlers avec les autorités espagnoles puisqu'il est apparu qu'il existe un projet similaire à Vitoria (au Pays basque espagnol, ndlr)", a souligné Alain Vidalies. Il doit rencontrer son homologue espagnole Ana Pastor, "pour débattre avec elle de ce projet et de son calendrier".
"Au lendemain de la mise en demeure de la France par la Commission européenne sur la pollution de l'air, le gouvernement choisit donc de favoriser le mode routier, très émetteur de particules fines et d'oxydes d'azote, déjà avantagé par de multiples décisions pro-route du gouvernement, prises à l'encontre de l'objectif national de réduire, entre 2009 et 2020, de 20% les émissions de gaz à effet de serre des transports, étape indispensable pour atteindre le facteur 4", a réagi dans un communiqué le Réseau action climat (Rac) France. "Alors que le gouvernement se targue de l'exemplarité de la France à quelques mois de la (conférence climat) COP 21, la ministre de l'Ecologie et de l'Energie doit absolument revenir sur cette décision pour honorer ses engagements et faire du report modal vers le transport ferroviaire une priorité", a déclaré sa responsable des politiques transports climat, Lorelei Limousin.
La Fédération nationale des usagers des transports (Fnaut) dénonce pour sa part une "décision incompréhensible". "Les effets d'annonce sur l'excellence environnementale et la transition énergétique ne suffisent pas", souligne-t-elle dans un communiqué. Pour la Fédération, "le gouvernement fait passer les intérêts du lobby routier avant ceux de la population". "Ce qui importe, c'est la rentabilité socio-économique, estime-t-elle. Or le projet permettait de réduire une partie des coûts externes (congestion de la voirie, accidents, bruit et pollution de l'air, émissions de gaz à effet de serre) engendrés par le trafic des poids lourds et assumés par la collectivité".