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PLF 2012 - Le Sénat abonde les crédits aux collectivités de 650 millions d'euros

La majorité de gauche du Sénat a adopté, le 23 novembre, la première partie du projet de loi de finances (PLF), après avoir modifié en profondeur la version issue de l'Assemblée. S'agissant des ressources des collectivités, elle a voté 450 millions d'euros de crédits nouveaux, tout en annulant la réduction de 200 millions des dotations. Il en ressort une hausse de 650 millions d'euros des concours de l'Etat aux collectivités par rapport au PLF voté par les députés.

Déjà affectées par la suppression de la taxe professionnelle et le gel en valeur de leurs dotations, les collectivités, dont le poids de la dette ne dépasse pas 10% de la dette publique française, n'ont pas à réaliser d'effort supplémentaire pour réduire la dépense de l'Etat. Les finances des collectivités ont même besoin d'être consolidées, au profit notamment des plus fragiles d'entre elles. Telle est la ligne qui a guidé la nouvelle majorité de gauche au Sénat, qui, par plusieurs amendements au projet de loi de finances, a redonné de l'oxygène aux finances locales. Comme la commission des finances du Sénat au début de ce mois (lire ci-contre notre article du 10 novembre 2011), les sénateurs ont supprimé, dans l'hémicycle, les mesures d'économies votées par l'Assemblée nationale, qui réduisaient de 200 millions d'euros, en 2012, les dotations de l'Etat aux collectivités locales. Après ce vote, la dotation globale de fonctionnement (DGF) doit, donc, à nouveau croître de 0,2%. Soit 77 millions d'euros, qui financeront la péréquation au profit des départements (64 millions) et des régions (13 millions).
L'opposition de droite et le gouvernement ont protesté, en soutenant que les collectivités devaient participer, comme le reste du secteur public, à l'effort de réduction des déficits. En ajoutant que la participation de 200 millions d'euros qui leur est demandée, est à leur portée, puisqu'elle représente seulement un millième de leurs dépenses totales.
Toujours pour préserver les finances locales, les sénateurs ont limité à la seule année 2012 le gel, sans indexation, de plusieurs dotations, dont la dotation générale de décentralisation et la dotation d'équipement des territoires ruraux – alors qu'elles étaient gelées au moins jusqu'en 2014.
Ils ont, par ailleurs, décidé que les dotations de compensation d'exonération de CVAE intégrées à l'enveloppe des variables d'ajustement ne seraient pas minorées rétrospectivement au titre des années 2009, 2010 et 2011, comme le prévoit le PLF. Cette réduction rétrospective remet en cause l'engagement du gouvernement en faveur d'une réforme neutre pour les finances locales, dans le cadre de la réforme de la suppression de la taxe professionnelle, ont-ils avancé. Concrètement, l'enjeu est d'éviter une réduction brutale de 11,2 millions d'euros (soit 39%) de ces dotations, en 2012. Mais l'enveloppe des dotations étant fermée, le gouvernement pourrait reporter l'annulation partielle de la baisse des dotations de compensation d'exonération de CVAE sur d'autres variables d'ajustement.
En outre, les sénateurs ont confirmé la décision prise plus tôt en commission, de créer en 2012 un fonds de soutien exceptionnel de l'Etat, de 100 millions d'euros, au profit des 40 départements connaissant le plus de difficultés (sur les modalités de ce fonds, lire notre article du 10 novembre 2011).

350 millions d'euros pour la péréquation et l'investissement

Véritable nouveauté, le Sénat a aussi créé une "dotation exceptionnelle de solidarité territoriale" de 350 millions d’euros qui serait financée par les recettes supplémentaires de l'Etat votées par la gauche sénatoriale. 250 millions d'euros seraient destinés aux dotations de péréquation attribuées par l'Etat à chaque niveau de collectivité (celles-ci augmentant donc de 6% supplémentaires en 2012) et 100 millions d'euros permettraient d'accroître les dotations d'équipement des communes. L'objectif est de "redonner à l'Etat un rôle moteur dans la péréquation verticale", tout en soutenant l'investissement local. "Nous entendons tirer quelques enseignements des dernières élections sénatoriales. (...) [Les élus locaux] nous ont fait part de leur malaise et nous ont délivré un message clair, que nous entendons prendre en considération", a souligné l'auteur de l'amendement, le sénateur PS François Marc.

Les sénateurs ont, de plus, voté plusieurs amendements tendant à :
- compenser les collectivités pour la perte subie du fait de l'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties pendant 15 ans dont bénéficient les logements en location-accession. Ce dispositif en déjà en vigueur pour les logements locatifs sociaux ;
- revenir sur la répartition du produit de la redevance pour les installations hydroélectriques décidée par les députés, qui supprimait l'affectation aux communes du sixième de cette redevance payée par le concessionnaire ;
- plafonner à 3% - au lieu de 5% - la reprise des trop-perçus par les départements au titre de la compensation du RSA en 2010 et 2011. D'un coût de 15,1 millions d'euros en 2012, la mesure doit permettre de "préserver les finances de certains départements" ;
- étendre aux départements le bénéfice de la TVA à 5,5% sur les prestations de déneigement réalisées sur la voirie départementale (les communes en bénéficient déjà) ;
- actualiser les fractions de tarif de la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers (TIPP) affectées aux régions et départements pour la compensation financière des transferts de compétences au titre des dernières lois de décentralisation.
Animée, parfois houleuse, la discussion a donné lieu à un couac. Le 22 novembre, les sénateurs de droite se sont retrouvés majoritaires dans l'hémicycle, durant un court moment. Le résultat d'un vote a fait planer l'idée que la dotation globale de fonctionnement avait été supprimée. Le lendemain, une seconde délibération demandée par la commission des finances a mis un terme à la confusion.

Thomas Beurey / Projets publics

Près de 30 milliards de recettes supplémentaires pour l'Etat

Le Sénat a adopté par 175 voix contre 168, ce volet du projet de loi de finances pour 2012 consacré aux recettes, après l'avoir modifié, donc, en profondeur. Avec notamment la suppression de plusieurs mesures fiscales votées par la majorité UMP au début de la législature, les recettes de l'Etat sont augmentées de 29,5 milliards d'euros l'année prochaine, le déficit prévisionnel étant ramené à 55,1 milliards (contre 80,3 milliards dans la version votée en première lecture par les députés). L'Assemblée nationale, à qui le dernier mot revient, devrait toutefois rejeter l'essentiel des mesures votées par le Sénat.