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Médicosocial - Le Sénat se prépare à retoucher la loi HPST

La commission des affaires sociales du Sénat a adopté, le 9 février, la proposition de loi modifiant certaines dispositions de la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (HPST). Le texte doit être examiné en première lecture par le Sénat le 17 février. Le principe de l'introduction d'un certain nombre de correctifs s'était en effet dégagé dès les premiers mois d'application de la loi, y compris du côté du ministère de la Santé. Si la proposition de loi introduit ainsi plusieurs modifications - qui devraient être complétées par d'autres amendements de sénateurs ou du gouvernement -, celles-ci n'apportent pas de bouleversements et ne remettent pas en cause l'équilibre général du texte.

Sisa, maisons de santé et permanence des soins

L'une des plus importantes modifications (article 1er) concerne la création d'une nouvelle forme de société - la "société interprofessionnelle de soins ambulatoires" (Sisa) - permettant à des professionnels de santé libéraux "la mise en commun de moyens pour faciliter l'exercice de l'activité de chacun de ses associés" et "l'exercice en commun, par ses associés, de certaines activités à finalité thérapeutique relevant de leurs professions respectives". Pas moins de douze articles sont ainsi introduits dans le Code de la santé publique (CSP), pour régir la création et le fonctionnement des Sisa. L'objectif - dans le cadre de l'expérimentation de nouveaux modes de rémunération prévue par l'article 44 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 - est à la fois de structurer l'offre de soins de premier recours, de répondre à la demande des jeunes praticiens d'un mode d'exercice moins solitaire et de lutter ainsi contre la désertification médicale. Les articles correspondants pourraient toutefois faire l'objet de plusieurs amendements en séance - y compris du gouvernement -, le rapporteur soulignant lui-même les "choix parfois un peu déroutants que traduit le texte proposé".
L'article 2 de la proposition de loi est moins ambitieux, puisqu'il se contente de donner une base légale aux maisons de santé. Celles-ci figuraient déjà à l'article L.6323-3 du CSP, mais sans allusion à un statut. La maison de santé sera donc "une personne morale constituée entre des professionnels médicaux et des auxiliaires médicaux". La nouvelle rédaction précise qu'"elle assure des activités de soins sans hébergement et peut participer à des actions de santé publique, de prévention et d'éducation pour la santé, dans le cadre du projet de santé qu'elle élabore et de conditions techniques de fonctionnement déterminées par décret en Conseil d'Etat".
Comme attendu - Roselyne Bachelot-Narquin ayant elle-même rapidement reconnu l'échec de la mesure, l'article 3 supprime les contrats santé solidarité, imaginés par la loi HPST pour contraindre les médecins installés dans des zones sur-dotées à aller soutenir leurs confrères des zones sous-dotées (ou à acquitter une contribution conséquente). Dans le même esprit, l'article 4 supprime l'obligation, pour les médecins libéraux, de déclarer leurs absences programmées au conseil départemental de l'Ordre. La commission des affaires sociales a, en revanche, introduit un article 3 bis prévoyant que les médecins libéraux participant à la permanence des soins dans un établissement de santé (public ou privé) assurant cette mission de service public seront indemnisés par ce dernier. Au final - et même si les mesures en cause semblaient quasi impossibles à appliquer -, il est difficile de dire que le dispositif de permanence des soins dans les zones fragiles ressort renforcé de l'exercice. D'autres dispositions de la proposition de loi visent les pratiques médicales - comme le rétablissement des contrats de bonne pratique et des contrats de santé publique, supprimés par l'ordonnance de coordination de la loi HPST (article 5).

Nouvelles compétences pour les ARS

L'article 7 donne au directeur général de l'agence régionale de santé (ARS) le pouvoir de procéder à la suspension ou à la fermeture d'un centre de santé dans des conditions déterminées par décret. En revanche, la commission a supprimé l'article 8 du texte initial, qui donnait au directeur général un pouvoir de décision en matière de prise en charge forfaitaire de dépenses des réseaux de santé par l'assurance maladie. La commission veut en effet "une réflexion d'ensemble sur le financement des structures diverses impliquées dans la coordination de l'offre de soins". Elle estime que "les financements accordés aux initiatives locales en matière d'offres de soins, la multiplication et l'enchevêtrement des acteurs intervenant dans ce domaine, la définition des critères d'octroi des aides, et surtout le contrôle de l'utilisation de ces aides, appellent une réflexion et des mesures d'ensemble, et non des mesures ponctuelles qui ne peuvent qu'ajouter à la confusion et à un déficit d'efficience".
D'autres articles sont plus techniques, mais d'actualité, comme l'article 9 bis (introduit par la commission des affaires sociales) qui impose la publication annuelle des liens d'intérêts entre entreprises pharmaceutiques et médecins. C'est aussi le cas de l'article 10, qui réforme le cadre d'emploi de la réserve sanitaire et assouplit les conditions de sa mobilisation dans le cadre de l'Eprus (Etablissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires). Pour sa part, l'article 11 complète les dispositions de la loi HPST, en vue d'améliorer l'information sur les risques sanitaires et la lutte contre la propagation internationale des maladies. La commission des affaires sociales a également adopté un amendement (article 14 A) supprimant les dispositions du CSP relatives aux groupements de coopération sanitaire (GCS) érigés en établissements de santé, la commission demeurant "peu convaincue des potentialités de ce nouvel instrument".

Clarification pour les groupements de coopération sociale ou médicosociale

En revanche, l'article 14 sécurise et clarifie le statut juridique des groupements de coopération sociale ou médicosociale (GCSMS) - créés par la loi HPST -, en précisant que "le groupement de coopération sociale ou médicosociale n'a pas la qualité d'établissement social ou médico-social". Pour sa part, l'article 15 procède à une réécriture de la section IV du budget de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), relative à la promotion des actions innovantes et au renforcement de la professionnalisation des métiers de service. La nouvelle rédaction permet de mutualiser les financements destinés aux actions concernant à la fois les personnes âgées et les personnes handicapées et de simplifier les procédures administratives de la caisse (notamment en supprimant l'agrément de l'Etat pour chaque action engagée et en permettant de subdéléguer les crédits correspondants aux ARS). L'article 16 clarifie la nouvelle procédure d'appel à projets en prévoyant que "les transformations sans modification de la catégorie de prise en charge au sens du I de l'article L.312-1 [du Code de l'action sociale et des familles, NDLR] sont exonérées de la procédure d'appel à projet" (mais pas d'une autorisation de l'autorité compétente). Enfin, l'article 17 prévoit que le schéma régional d'organisation des soins (Sros) "favorise le développement des modes de prise en charge alternatifs à l'hospitalisation et organise le développement des activités de dialyse à domicile".

Jean-Noël Escudié / PCA

Références : proposition de loi modifiant certaines dispositions de la loi 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (adoptée par la commission des affaires sociales du Sénat le 9 février 2011, examen prévu en première lecture en séance publique le 17 février 2011). 

 

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