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Protection de l'enfance - Les associations veulent un Code des mineurs plutôt qu'un Code de la justice pénale des mineurs

Quatre des principales associations intervenant dans le domaine de la protection de l'enfance viennent de rendre publiques leurs observations sur l'avant-projet de Code de la justice pénale des mineurs (CJPM), issu des travaux de la commission Varinard (voir nos articles ci-contre). Il s'agit en l'occurrence de l'Unasea (sauvegarde de l'enfance), de l'Uniopss (Union nationale interfédérale des oeuvres et organismes privés sanitaires et sociaux), de la FN3S (Fédération nationale des services sociaux spécialisés) et de l'association Citoyens et justice. Annoncé en mars dernier par Rachida Dati, alors ministre de la Justice, le CJPM est en cours d'élaboration et de concertation. Il est supposé se substituer à l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante, elle-même déjà remaniée à de nombreuses reprises.

Les réactions des quatre associations, détaillées dans une longue note de 25 pages, sont pour le moins réservées. Sur le fond, elles estiment inadéquate la création d'un Code de la justice pénale des mineurs. Elle trouveraient préférable d'élaborer un "Code général des mineurs", qui regrouperait également les dispositions applicables aux mineurs issues du Code civil et du Code de l'action sociale et des familles. Elles demandent aussi que la refonte de l'ordonnance de 1945 se fasse "en articulation et en cohérence notamment avec les réflexions et propositions faites par la commission Hirsch sur la politique de la jeunesse". Elles auraient également souhaité que l'avant-projet de CJPM reprenne les propositions les plus innovantes de la commission Varinard et pas seulement la trentaine de préconisations qui ont finalement été retenues sur les 70 proposées.

Dans leur analyse détaillée du texte, les quatre fédérations et associations estiment que sept dispositions de l'avant-projet de CJPM "semblent contrevenir aux principes fondamentaux de la justice des mineurs". Il s'agit notamment de la possibilité d'incarcération dès 13 ans (alors que la commission Varinard préconisait 14 ans, avec une exception à 12 ans en matière criminelle), de l'introduction dans le CJPM de dispositions concernant les mineurs de 10 à 13 ans, du glissement des 16-18 ans d'un régime spécialisé (justice des mineurs) au régime de droit commun (applicable aux majeurs) et des peines planchers pour les récidivistes de 16 à 18 ans. Les signataires pointent également le renforcement du rôle du parquet (avec une saisine directe des juridictions de jugement), les frais de stage à la charge des justiciables, ainsi que la limitation de la liberté d'appréciation du juge des mineurs et l'automaticité et la progressivité des réponses. Soucieux de ne pas s'enfermer dans une position de rejet du texte, les signataires proposent de nombreuses modifications argumentées à l'avant-projet de texte. Celles-ci préconisent en particulier un maintien du juge des enfants "comme clé de voûte du dispositif" (avec préservation de sa double compétence civile et pénale), une plus grande reconnaissance du rôle du secteur associatif habilité (SAH), l'obligation de la collégialité de la formation de jugement pour toute infraction exposant à une peine de plus de trois ans d'emprisonnement (au lieu de cinq) et pour les infractions commises en récidive. Elles recommandent aussi le maintien de la médiation pénale pour les mineurs et la déjudiciarisation des premiers actes de délinquance considérés comme sans gravité (dans l'esprit de la création du "rappel à l'ordre" et du "conseil pour les droits et devoirs des familles" par la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance).

 

Jean-Noël Escudié / PCA

 

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