Les centrales au charbon pourront fermer d'ici 2022 si le nucléaire attend, selon RTE

Dans ses "perspectives sur la sécurité d'approvisionnement 2018-2023" présentées ce 15 novembre, le gestionnaire du réseau d'électricité RTE estime possible la fermeture des quatre centrales à charbon encore en activité ainsi que celle de la centrale nucléaire de Fessenheim à condition de respecter un certain nombre de conditions.


Les centrales à charbon encore en activité pourront bien fermer d'ici 2022, suivant l'engagement d'Emmanuel Macron, mais à condition de ne pas arrêter de nouveau réacteur nucléaire d'ici cinq ans, a prévenu ce 15 novembre le gestionnaire du réseau d'électricité (RTE). Ce constat intervient à quelques semaines d'échéances cruciales avec la publication de la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) pour les années 2019-2023 et 2024-2028. La question du nucléaire s'avère particulièrement épineuse, la France voulant à terme réduire sa part dans la production d'électricité. "Ce n'est pas notre rôle, à RTE, de faire la PPE", a souligné le président de RTE, François Brottes, lors d'une conférence de presse. Le rôle de la filiale autonome d'EDF est "d'éclairer" les décideurs, selon lui.

Marges de sécurité après l'hiver 2020


Selon RTE, qui a présenté ses perspectives sur la sécurité d'approvisionnement 2018-2023, "après l'hiver 2020, des marges de sécurité devraient réapparaître" et permettre la fermeture progressive des quatre centrales à charbon en plus de l'arrêt de la centrale nucléaire de Fessenheim (Haut-Rhin), déjà acté. La fermeture de cette dernière devrait se faire "hors période hivernale", donc à l'été 2020, précise au passage RTE.
RTE pose toutefois une série de conditions, notamment développer fortement les énergies renouvelables, mettre en service trois interconnexions (une avec l'Italie, deux avec la Grande-Bretagne) et mettre en service l'EPR de Flamanville (Manche) et la centrale au gaz de Landivisiau (Finistère) dans les délais. Il faut également "ne fermer aucun autre moyen de production", selon des documents présentés jeudi. Autrement dit, il ne sera pas possible de fermer des réacteurs nucléaires en plus de Fessenheim d'ici 2023.
Cette analyse technique intervient au moment où le gouvernement met la dernière touche à la PPE, qu'il aimerait présenter d'ici la fin du mois. Une nouvelle réunion interministérielle consacrée à ce sujet devait se tenir ce vendredi soir sous l'égide de Matignon.
Des ONG opposées au nucléaire militent pour leur part en faveur de fermetures volontaristes de réacteurs nucléaires dès ces prochaines années. "Notre sécurité d'approvisionnement et nos marges de manoeuvre seront renforcées si la PPE fait un choix clair en faveur de l'efficacité énergétique et des énergies renouvelables", avance Anne Bringault du CLER-Réseau Action Climat.
Emmanuel Macron avait promis durant la campagne présidentielle de fermer les centrales à charbon - très polluantes - durant son quinquennat. Malgré l'enjeu social, l'objectif a été depuis confirmé plusieurs fois par le gouvernement, soucieux d'être exemplaire sur la question climatique. Il reste en effet quatre sites en activité : deux d'EDF à Cordemais (Loire-Atlantique) et au Havre (Seine-Maritime), et deux autres de la société allemande Uniper à Gardanne (Bouches-du-Rhône) et Saint-Avold (Moselle).

Fermetures à concentrer sur la période 2020-2022


Pour réussir avant la fin du mandat présidentiel, les fermetures devront se concentrer sur la période 2020-2022, explique RTE. D'ici à 2020, le système électrique sera "équilibré" mais "sans marge supplémentaire", en raison notamment de la fermeture d'unités au fioul, a précisé Olivier Grabette, directeur général adjoint de RTE. Mais "à partir de l'été 2020, on retrouvera un certain nombre de marges", a-t-il expliqué.
RTE a insisté sur le fait que la fermeture des centrales à charbon ne présentait pas de "risque spécifique" pour le Sud et surtout la Bretagne. Cette région dispose déjà d'un nouveau "filet de sécurité" inauguré cette année, via une nouvelle ligne à haute tension pour améliorer sa sécurité d'approvisionnement électrique.
Le charbon joue aujourd'hui un rôle marginal dans la production d'électricité du pays, dominée par le nucléaire. L'an dernier, il représentait 2,3% des capacités avec 3 gigawatts et il n'a compté que pour 1,8% de la production. Mais EDF comme Uniper défendent l'utilité de ces moyens facilement mobilisables, notamment pendant les pics de consommation hivernaux.