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Culture - Les hôtels de luxe vont-ils financer la restauration du patrimoine ?

A la recherche de moyens pour financer les travaux de rénovation, de conservation et de mise en valeur du patrimoine, le ministère de la Culture a entrepris de lancer des ballons d'essai en vue de "trouver une source pérenne qui complète les dotations budgétaires" (environ 300 millions d'euros par an). A l'occasion de ses voeux à la presse, Christine Albanel a ainsi évoqué l'idée d'une "contribution" sur les nuitées dans les hôtels de quatre étoiles et plus. Pour justifier ce projet, la ministre de la Culture a expliqué qu'"il y a une vraie logique de financement. Près de 70% de la clientèle de ces établissements sont des étrangers, dont bien souvent la visite est en lien avec notre patrimoine". A hauteur de deux euros par nuit, cette taxe alimenterait un fonds de soutien qui permettrait de "mener une grande politique du patrimoine", promise par le chef de l'Etat lors de l'ouverture de la Cité de l'architecture et du patrimoine, le 17 septembre dernier. En année pleine, la contribution pourrait rapporter environ 50 millions d'euros. Cette forme de financement n'est toutefois pas la seule envisagée. Christine Albanel a ainsi lancé deux autres ballons d'essai. Le premier concerne l'hypothèse d'une taxe sur les jeux de casino, comme en Grande-Bretagne. Le second vise La Française des jeux - autre source classique de financement - à travers l'instauration de deux mécanismes alternatifs : soit une taxe sur les jeux de loterie (solution également pratiquée par plusieurs pays étrangers), soit la création d'un jeu spécifique, dont une partie des recettes alimenterait la restauration du patrimoine. L'éventail des solutions est donc largement ouvert.
Il n'est pas certain, pour autant, qu'un financement complémentaire, de nature parafiscale, se mette réellement en place en 2008. Les réactions aux hypothèses lancées par Christine Albanel sont en effet plus que réservées. On pouvait s'y attendre de la part des professionnels de l'hôtellerie. La vice-présidente de la chaîne Relais et Châteaux estime ainsi que l'instauration d'une taxe supplémentaire, même modique, donnerait aux étrangers "une très mauvaise image" de l'hôtellerie de luxe française. Mais le coup le plus dur est venu du secrétaire d'Etat au Tourisme et à la Consommation. Inaugurant le salon professionnel "Workshop Grand Ski" à Chambéry, le 22 janvier, Luc Chatel a en effet déclaré n'être "pas sûr que ce soit le meilleur message d'envoyer à des clients potentiels l'idée d'une nouvelle taxe si modique soit-elle". Rejetant l'idée du recours à une taxe, il juge que "le meilleur moyen, c'est d'attirer davantage de touristes qui dépensent davantage en France et donc qui apportent des recettes supplémentaires à notre pays".
Selon un rapport transmis au Parlement par le ministère de la Culture, le nombre de monuments considérés comme en mauvais état ou en péril est passé de 32% en 2002 à 41% en 2007. En termes de financement, le coût des travaux qui seraient à effectuer est passé pour sa part de 7 milliards d'euros à près de 11 milliards sur la même période. Pour la seule participation de l'Etat, le besoin de financement serait de l'ordre de 400 millions d'euros par an.

 

Jean-Noël Escudié / PCA