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Emploi - L'insertion par l'activité économique ménagée, mais menacée

L'insertion par l'activité économique (IAE) ne devrait pas faire les frais de la baisse des crédits de l'Etat, a assuré le gouvernement devant le Conseil national de l'IAE. Dans l'attente d'une véritable réforme de son mode de financement, les collectivités sont invitées à ne pas baisser la garde, alors que les 100 millions d'euros du grand emprunt pour l'économie sociale et solidaire créeront un appel d'air.

L’insertion par l’activité économique (IAE) ? "C’est un secteur dans lequel je crois et pour lequel je me bats." Laurent Wauquiez ne s’est pas contenté de ces paroles réconfortantes, mardi 13 juillet, au Conseil national de l’IAE. Alors que l’ensemble des crédits d’intervention de l’Etat doivent baisser de 5% en 2011, le secrétaire d’Etat chargé de l’Emploi a annoncé avoir "obtenu que les moyens de l’IAE ne subissent aucune baisse" l’an prochain. Voilà qui soulagera sans doute les entreprises d’insertion et autres associations intermédiaires qui composent ce secteur - ainsi que les personnes éloignées de l’emploi à qui elles proposent travail et accompagnement.

Mieux encore, ce champ de l’économie solidaire "ne devrait pas non plus être touché par la diminution globale du nombre de contrats aidés". Dans une entrevue aux Echos, le 6 juillet, le ministre du Budget, François Baroin, avait annoncé qu’ils ne seraient plus que 340.000 en 2011, contre 400.000 cette année. Cette restriction ne devrait donc pas affecter les chantiers d’insertion qui s’appuient sur les "contrats uniques d’insertion" pour recruter des personnes éloignées de l’emploi. En prime, Laurent Wauquiez compte même "défendre" un maintien à 105% de la prise en charge par l’Etat des salaires versés par les chantiers d’insertion… Ceux-ci pourraient donc échapper au rabotage général annoncé par François Baroin : les contrats aidés, qui sont habituellement pris en charge à 90% par l’Etat, ne devraient plus l’être qu’à 80%, dès cette année.

"Nous sommes certes préservés, dans une période de baisse de crédits généralisée, reconnaît Eric Pliez, qui siège au Conseil national de l’IAE pour la Fnars (Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale). Pour autant, de nombreuses structures d’IAE vont être fragilisées, ou même mourir, cette année !"

Une réforme en suspens

De fait, le secteur attend encore la réforme de ses modalités de financement, promise au lendemain du Grenelle de l’insertion. Pour rendre "ce financement plus efficace, plus simple", comme l’a rappelé Laurent Wauquiez, une expérimentation a été lancée en début d’année, dans le Doubs, la Gironde, le Haut-Rhin et le Rhône. Or, les acteurs de l’insertion ont souhaité prolonger cette étude d’une année au moins, afin de mieux préparer la modernisation annoncée. Laurent Wauquiez a accepté d’approfondir la réflexion : "L’objectif, c’est d’être prêts fin 2011."

Mais en attendant, la réforme du financement des structures reste en suspens. Dans une déclaration commune lue ce 13 juillet, quatre réseaux de l’IAE ont donc demandé une hausse, transitoire, des financements de l’Etat. Cette demande n’a pas été satisfaite. "L’expérimentation en cours montre pourtant que la moitié des structures étaient en déficit en 2009 et que le coût de leur mission d’insertion était très peu couvert par les financements publics, rapporte Florence Lecluse, secrétaire générale de la fédération Coorace, également présente mardi 13 juillet. Et même si on sent que la reprise économique frémit, le chômage ne va pas diminuer de manière soudaine…"

Les collectivités territoriales pourront-elles donc permettre à l’IAE de passer ce cap délicat d’ici à 2011 ? "La prise en charge par les conseils généraux du revenu de solidarité active (RSA) a pu avoir un effet négatif pour l’IAE, rappelle Florence Lecluse. Ils souffrent aujourd’hui d’un sous-financement chronique." Les départements constituent pourtant un soutien majeur pour l’IAE, aussi bien par leurs financements directs aux structures que par leurs commandes publiques. Les structures de l’IAE peuvent encore espérer une baisse spectaculaire du chômage dans les tout prochains mois, ou compter sur un léger coup de pouce à travers les 100 millions d'euros consacrés à l'économie sociale et solidaire dans le cadre du grand emprunt (voir encaré ci-dessous).

 

Olivier Bonnin

 

100 millions d'euros pour l'économie sociale et solidaire

C'est pour faire face à la difficulté de financement de l'économie sociale et solidaire qu'une ligne de 100 millions d'euros a été ouverte dans le cadre du grand emprunt. Sa gestion a été confiée à la Caisse des Dépôts. Cette mesure prévue à l'article 8 de la loi n°2010-237 du 9 mars 2010 de finances rectificative pour 2010 se donne pour objectif de soutenir en "quasi fonds propres" et "de façon subsidiaire, en fonds propres" plus de 2.000 entreprises, et de créer ou consolider plus de 60.000 emplois. La convention d'application a été publiée au Journal officiel du 20 juillet 2010. Avec 9,8% de l'emploi salarié en France, l'économie sociale et solidaire est un secteur capable d'offrir un "nombre croissant d'emplois, non délocalisables, à des personnes qui en sont structurellement exclues ou en ont été éloignées pendant une longue période", précise la convention. Celle-ci vise explicitement les "entreprises de l'économie sociale (principalement associations, coopératives ou mutuelles), dont la finalité sociale, sociétale ou environnementale est centrale, qui observent un principe de lucrativité limitée et cherchent à associer les parties prenantes à leur gouvernance" et les "entreprises, sous quelque statut que ce soit, bénéficiant de l'agrément entreprises solidaires".