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Action sociale - L'Odas prévoit des zones de turbulences

La dépense nette d'action sociale des départements a augmenté de 5,1% entre 2006 et 2007, soit moins que les années précédentes. Mais qu'il s'agisse de personnes âgées, de handicap, de protection de l'enfance ou d'insertion, beaucoup d'inconnues pèsent sur les budgets à venir.

"Le calme avant la tempête ?" En intitulant ainsi la restitution de son enquête annuelle sur les dépenses d'action sociale des départements, l'Observatoire national de l'action sociale décentralisée (Odas) prévient que les chiffres 2007, qui peuvent sembler plutôt raisonnables, sont à prendre avec pas mal de précautions.
La dépense nette d'action sociale départementale, qui s'élevait à 19,4 milliards d'euros fin 2007, n'a en effet augmenté "que" de 5% entre 2006 et 2007 - soit moins que les années précédentes (6,8% entre 2005 et 2007), et moins que l'ensemble des autres dépenses départementales (8,6%). On peut donc parler de ralentissement... "Mais une dépense qui augmente de 5%, il n'y a pas de quoi se réjouir", tempère d'emblée Jean-Louis Sanchez, le délégué général de l'Odas, qui présentait ces données à la presse ce mardi 17 juin, juste à temps pour que les conseils généraux puissent en tenir compte dans leurs exercices budgétaires. Le président de l'Odas Michel Dinet relève pour sa part que ce tassement, qui correspond à celui du rythme des transferts et des réformes, est somme toute assez logique pour une année d'élections.

Des masses salariales en jeu

L'une des raisons de cette courbe plus sage que les années précédentes est à chercher du côté de la dépense RMI qui, fait notable, est restée quasiment stable entre 2006 et 2007 (+10 millions d'euros), à 1,260 milliard d'euros. Cette stabilité résulte de "la conjonction entre une diminution importante du nombre d'allocataires et une dynamique de croissance forte des crédits d'insertion", explique l'Odas. Le poste personnes âgées progresse lui aussi moins que les années précédentes (+7%, contre 11,3% en 2006) avec, notamment, une petite décélération de la dépense d'APA à domicile, qui représente toujours les deux-tiers des versements APA.
En revanche, l'aide sociale à l'enfance augmente toujours autant (+5,1%) et reste le premier budget de l'action sociale départementale. Alors que le nombre d'enfants placés reste globalement stable, cette hausse est avant tout liée aux ressources humaines : modification du statut des assistants familiaux pour le placement familial, évolution des masses salariales du personnel pour le placement en établissement.
Enfin, l'aide aux personnes handicapées, après déduction de la dotation versée par la CNSA, atteint un montant de presque 4 milliards d'euros, remontant de 8%, alors qu'un an auparavant, cette hausse n'avait été que de 2%. Le placement et l'accueil (hébergement en établissement, accueil de jour, etc.) représentent pas moins de 3,35 milliards, bien avant les allocations, qu'il s'agisse de l'ACTP ou de la PCH. L'étude de l'Odas confirme d'ailleurs la lente progression de la PCH et la faible diminution du volume d'ACTP. "On pensait que l'ACTP allait chuter en 2007, or ce n'est pas encore le cas", souligne Claudine Padieu, directrice scientifique de l'Odas.

"On va en demander beaucoup aux départements"

Quels que soient les champs d'intervention, l'accalmie est, sinon conjoncturelle, du moins temporaire. Ainsi, en matière de handicap, les départements vont aujourd'hui peut-être devoir faire face à un "effet d'appel" sur la PCH, sans oublier l'ouverture du bénéfice de la PCH aux enfants handicapés. Une extension dont les conséquences sont toutefois difficiles à estimer en raison, là encore, du droit d'option avec les compléments d'Allocations d'éducation (AEEH) versés par les CAF.
Côté personnes âgées, les perspectives démographiques sont bien là pour présager une croissance forte des dépenses dès 2009. Des inconnues demeurent toutefois, notamment quant à la fameuse éventualité d'un recours sur succession pour l'APA. "Si des personnes âgées renoncent à l'APA du fait de ce recours sur succession, certes, dans un premier temps, on assistera à une baisse des dépenses, mais sur plusieurs années, on risque au contraire de ne pas être source d'économies. Car l'APA joue aujourd'hui une fonction préventive, repoussant le départ en établissement de personnes en Gir 3 ou 4", relève à ce sujet Claudine Padieu.
Sachant que la loi réformant la protection de l'enfance n'est toujours pas réellement mise en œuvre, l'ASE est elle aussi promise à quelques turbulences et à des charges de personnel en forte hausse : "La loi de Philippe Bas va avoir un impact certain", prévoit Jean-Louis Sanchez, tandis que Michel Dinet rappelle que les ressources affectées aux départements pour appliquer la réforme "ne sont toujours pas fixées" (le décret d'application relatif au fonds de financement de la loi n'a pas été publié).
Enfin, le champ de l'insertion est évidemment également sujet à incertitudes, ne serait-ce qu'avec l'arrêt dès 2009 du versement des 500 millions d'euros du FMDI. Et puis l'annonce de la généralisation du RSA pose beaucoup de questions : "On a l'impression que le débat n'a pas vraiment eu lieu. Personne ne sait très bien ce qu'on va mettre dans le RSA, mais il est sûr qu'on va en demander beaucoup aux départements", estime Jean-Louis Sanchez.

Claire Mallet