Logement social : le Sénat renforce le pouvoir des maires dans les commissions d'attribution

Le Sénat a adopté ce 10 octobre la proposition de loi de Sophie Primas (LR, Yvelines) visant à renforcer le rôle des maires dans les commissions d'attribution de logements sociaux par l'octroi d'un droit de véto.

Pour l'attribution des logements sociaux, chaque organisme d'habitation à loyer modéré dispose d'une commission d'attribution des logements et d'examen de l'occupation des logements (Caleol). Cette dernière est aujourd'hui composée de six membres représentant l'organisme HLM, du maire ou de son représentant (qui dispose d'une voix prépondérante en cas d'égalité des voix), du préfet ou de son représentant, du président de l'intercommunalité ou son représentant et d'éventuellement un représentant d'un organisme ayant confié des logements en gérance. Peuvent en être également membres à titre consultatif : un représentant d'organismes sociaux agréés, les maires d'arrondissement de Paris, Lyon et Marseille, les réservataires qui ne sont pas membres de droit.

"De ce fait, le maire, quoique membre de droit, est isolé et dispose de peu de poids au sein d'une commission composée d'une douzaine de membres", estime Sophie Primas, auteure d'une proposition de loi signée par près de 90 membres de son groupe dont l'objectif est de "renforcer le rôle des maires dans les commissions d'attribution et de leur donner un poids cohérent avec les responsabilités politiques et juridiques qui sont les leurs pour assurer le logement de leur population et le développement de leur commune".

Le texte visait donc à aligner la représentation de la commune dans la Caleol sur ce qui est la norme dans d'autres organismes du même type. Ainsi, il modifie l'article L. 441-2 du code de la construction et de l'habitation pour que le maire devienne le président de la commission d'attribution des logements sociaux, tout en conservant une voix prépondérante, et que le conseil municipal élise cinq autres membres à la proportionnelle, portant ainsi la représentation de la commune au même niveau que celle de l'organisme d'habitations à loyer modéré.

Droit de véto du maire

L'article unique a été largement modifié en commission des affaires économiques le 5 octobre afin de prévoir, plutôt que l'augmentation du nombre de membres de la délégation communale – qui "présentait des difficultés pratiques tant de disponibilité des élus que de quorum" –, d'instaurer un droit de véto du maire en lieu et place de l'actuelle voix prépondérante en cas de partage des voix. "Ce véto devra être motivé puisque la décision de refus doit elle-même être explicitée au demandeur".

La commission a conservé le principe d'une présidence de la Caleol par le maire, tout en permettant que cette fonction soit exercée par l'établissement public de coopération intercommunale (EPCI) dès lors qu'il est à l'origine de la constitution de la Caleol.

Une dernière modification prévoit par ailleurs de "systématiser et d'inscrire dans la loi une pratique d'ores et déjà autorisée dans le cadre des conventions de réservation et usuelle, à savoir la délégation des droits de réservation de l'État au maire lors de la première location d'un programme neuf". Cela permettrait au maire d'attribuer de droit environ la moitié des nouveaux logements.

Expliciter les motifs de refus

En séance publique, le 10 octobre, le gouvernement a tenté sans succès de supprimer cette délégation automatique du contingent préfectoral. Un amendement a été adopté pour créer, dans chaque organisme d’habitations à loyer modéré, une commission de concertation présidée par le maire et chargée de suivre les programmes de constructions neuves jusqu’à leur date de livraison. Celle-ci réunirait obligatoirement tous les réservataires d’un programme neuf avant que celui-ci ne soit livré.

Enfin, le gouvernement a tenu à ajouter que le rejet d’une demande d’attribution suivie d’une radiation de la demande "doit être notifié par écrit au demandeur par le président de la commission d’attribution des logements et d’examen de l’occupation des logements, dans un document exposant le ou les motifs du refus d’attribution". De plus, en cas de gestion non déléguée des réservations, la décision de ne pas donner suite à la proposition d’un réservataire ou de changer l’ordre de priorité parmi les propositions effectuées devra être motivée.

Avoir une "approche globale"

"Nous devons adopter une approche globale, simplifier les procédures, mieux répartir les pouvoirs et les responsabilités dans le respect de l'égalité des droits, a affirmé à cette occasion Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Seule cette logique globale clarifiera les lieux de prise de décision et responsabilisera les acteurs publics. C'est pourquoi cette proposition de loi nous semble légèrement incomplète, car elle confère plus de pouvoir aux maires sans augmenter leurs responsabilités." Elle avait soumis son avis favorable à l'approbation de ses amendements, dont seul un des deux a été approuvé.

La ministre a rappelé par ailleurs que le gouvernement a commencé à travailler à un projet de loi de décentralisation qui sera présenté au printemps 2024. "Nous espérons pouvoir poursuivre les travaux initiés sur ce sujet pour le renforcement du pouvoir local, l'attribution de responsabilités claires et la simplification des processus. Pouvoir et responsabilité doivent être indissociables", a-t-elle fait valoir.

La proposition de loi a été transmise à l'Assemblée nationale pour la poursuite de son examen.

Référence : proposition de loi visant à renforcer le rôle des maires dans l’attribution des logements sociaux
 

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