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Social - Loi de financement de la sécurité sociale 2018 : ce qu'il faut retenir

Après avoir franchi l'ultime étape du Conseil constitutionnel, qui a censuré uniquement quelques articles relativement secondaires au titre de "cavaliers sociaux", la loi du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018 a été publiée au Journal officiel avant la fin de l'année. Le texte final est très proche de celui présenté le 28 septembre dernier (voir notre article ci-dessous du même jour), puis officiellement adopté au conseil des ministres du 11 octobre. Si nombre d'annonces récentes du gouvernement en matière d'action sociale ou de santé se situent hors du périmètre de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2018, celle-ci n'en contient pas moins plusieurs mesures intéressant directement ou indirectement les acteurs locaux.

Un Ondam médicosocial en hausse de 2,6%

La LFSS fixe à 477,5 milliards d'euros les dépenses de l'ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale pour 2018. Face à des recettes attendues de 470,5 milliards d'euros, le déficit prévisionnel est donc de 7 milliards d'euros. Le régime général au sens strict devrait, pour sa part, retrouver un excédent de 1,2 milliard d'euros.
Ces chiffres résultent notamment d'un objectif national des dépenses d'assurance maladie (Ondam) de 190,7 milliards d'euros, dont 9,0 milliards de contribution de l'assurance maladie aux dépenses des établissements et services pour personnes âgées et 10,9 milliards pour les structures pour personnes handicapées. L'Ondam progresse en 2018 de 2,3% - dont une progression de 2,6% pour le sous-ensemble de l'Ondam médicosocial -, soit 4,4 milliards d'euros de dépenses nouvelles.
Ces moyens supplémentaires permettront en particulier, dans le secteur médicosocial, de créer 2.028 places en établissements et services pour personnes handicapées et 4.525 places en établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), tandis qu'une enveloppe de 100 millions d'euros sera affectée à l'amélioration du taux et de la qualité d'encadrement dans les Ehpad.

Des mesures très discutées sur la CSG et le RSI

Outre l'augmentation de 1,7 point de la CSG (en contrepartie de la suppression des cotisations salariales chômage et maladie pour les salariés du secteur privé), la principale novation, qui occupe une part importante de la LFSS, est la suppression du RSI (régime social des indépendants). Ce régime de protection sociale était fortement décrié ces dernières années et pratiquement tous les candidats à la dernière élection présidentielle envisageaient sa disparition.
Les indépendants (artisans, commerçants et professions libérales) sont désormais adossés, depuis le 1er janvier 2018, au régime général de la sécurité sociale, sous l'intitulé de "la sécurité sociale des indépendants", tout en conservant leurs cotisations et leurs prestations spécifiques (au moins jusqu'à la mise en œuvre de la réforme annoncée des retraites). Le déploiement de la réforme de la protection sociale des indépendants, dont de nombreux points restent encore à préciser, s'étalera sur une durée de deux ans.

Revalorisation du "minimum vieillesse"

Côté personnes âgées, la principale nouveauté concerne la revalorisation du "minimum vieillesse", terme générique désignant principalement l'allocation de solidarité aux personnes âgées (voir notre article ci-dessous du 21 septembre 2017). La LFSS prévoit une revalorisation de 100 euros par mois, qui se déroulera en trois étapes réparties sur deux ans : 30 euros le 1er avril 2018, 35 euros au 1er janvier 2019 et 35 euros au 1er janvier 2020. Cette revalorisation du "minimum vieillesse" devrait bénéficier aux 550.000 allocataires actuels - auxquels s'ajouteront 46.000 bénéficiaires "rattrapés" par le relèvement du plafond de l'Aspa -, pour un coût total de 525 millions d'euros sur trois ans.
Cette amélioration du "minimum vieillesse" s'accompagne d'une - nouvelle - modification de l'aide à la complémentaire santé (ACS). Un amendement, déposé par le gouvernement, revoit en effet à la hausse le plafond de revenus permettant de bénéficier de cette prestation, afin d'éviter que certains bénéficiaires du "minimum vieillesse", également titulaires de l'ACS, perdent le bénéfice de cette dernière en raison de l'augmentation de leurs ressources.
A noter : la LFSS décale également de trois mois, du 1er octobre 2018 au 1er janvier 2019, la revalorisation des pensions de retraite, ce qui engendrera une économie pour la sécurité sociale.

Chaud et froid sur la politique familiale

En matière de politique familiale, la LFSS 2018 souffle le chaud et le froid. Côté positif, le texte prévoit une revalorisation substantielle (+30%) du montant du complément de libre choix de mode de garde (CMG), pour les familles monoparentales faisant appel à une assistante maternelle agréée, à une garde à domicile ou à une micro-crèche. La mesure devrait bénéficier à environ 44.000 familles, pour un gain de l'ordre de 70 euros par mois. De son côté, la prime de naissance bénéficie d'une majoration de 11 euros, qui la porte à un total de 934 euros.
Côté économies, la LFSS 2018 aligne les conditions de ressources et les montants de l'allocation de base de la prestation d'accueil du jeune enfant (Paje) sur le niveau du complément familial. L'allocation de base de la Paje passera ainsi de 184 à 169 euros par mois, pour les enfants nés ou adoptés à compter du 1er avril 2018. Les familles concernées, au nombre d'environ 150.000 et parfois modestes, pourraient y perdre environ 500 euros sur trois ans, pour une économie pour la sécurité sociale de l'ordre de 500 millions d'euros sur la même période.

Santé : priorité à la prévention

Enfin, en matière de santé, la LFSS 2018 intègre plusieurs mesures de la stratégie nationale de santé, finalement adoptée le 20 décembre, en particulier en matière de prévention. C'est le cas avec les mesures de "fiscalité comportementale", comme la majoration progressive du prix du paquet de cigarettes jusqu'à 10 euros ou le relèvement de la taxe sur les sodas.
C'est le cas aussi avec le passage de trois à onze vaccins obligatoires depuis le 1er janvier 2018. Le respect de ces nouvelles obligations vaccinales devrait conditionner l'entrée en structures d'accueil collectif de la petite enfance, ainsi qu'en école maternelle.
Outre des mesures en faveur du développement de la télémédecine, la LFSS 2018 comporte également une nouvelle disposition prévoyant la prise en charge à 100%, par l'assurance maladie, d'une consultation unique de prévention des cancers du sein et du col de l'utérus pour toutes les assurées à l'âge de 25 ans.
Toujours en matière de santé, le texte prévoit la possibilité d'expérimenter d'autres modes de financement des établissements de soins que l'actuelle tarification à l'activité (T2A), dont la ministre des Solidarités et de la Santé a souligné les limites à plusieurs reprises. Ces expérimentations pourraient notamment porter sur le financement au parcours, qui engloberait l'ensemble de la chaîne des soins.
Si ces différentes mesures ont recueilli un large assentiment, il n'en va pas de même pour la suppression de l'obligation de généralisation du tiers payant dès 2018, prévue par le précédent gouvernement. L'objectif reste toutefois maintenu et le gouvernement remettra au Parlement, avant le 31 mars 2018, "un rapport sur le calendrier de mise en œuvre opérationnelle du tiers payant intégral", élaboré à partir d'une concertation avec l'ensemble des acteurs concernés, à commencer par les professions de santé.

Censure minimum du Conseil constitutionnel

Cette remise en cause du caractère obligatoire du tiers payant a été validée par le Conseil constitutionnel, de même que la majoration de la CSG. Ce dernier s'est en effet contenté de censurer des dispositions relativement mineures, sans se prononcer sur le fond des mesures concernées, mais au regard de leur caractère de "cavalier social", sans effet ou avec un effet trop indirect sur les dépenses des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale, objet de la LFSS.
Il s'agit en l'occurrence de diverses dispositions de l'article 58, relatif aux produits de santé et aux dispositifs médicaux, de l'article 52 permettant aux pharmaciens biologistes de consulter le dossier pharmaceutique du patient et de l'article 71 prévoyant l'affectation d'une partie de la contribution additionnelle de solidarité pour l'autonomie (Casa) au financement des dépenses de fonctionnement des conférences des financeurs de la prévention de la perte d'autonomie des personnes âgées.
Pour les mêmes raisons, le Conseil constitutionnel a également censuré deux articles (38 et 48) prévoyant la remise par le gouvernement de rapports consacrés, d'une part, à l'exposition des salariés aux risques chimiques et, d'autre part, aux modalités d'attribution des places au sein des établissements et services d'accueil des enfants de moins de six ans et à l'opportunité d'une modulation des aides financières versées par les CAF, en fonction de leurs pratiques en matière d'attribution de places.

Référence : loi du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018 (Journal officiel du 31 décembre 2017).

 

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