Habitat - Nicolas Sarkozy veut doubler le nombre de logements construits en Ile-de-France

Avec les transports, le logement constitue l'un des volets clés du projet du Grand Paris, dévoilé par Nicolas Sarkozy le 29 avril (voir notre article ci-contre). Dans son intervention à la Cité de l'architecture et du patrimoine, le chef de l'Etat a présenté le Grand Paris comme "un plan de cohésion urbaine qui prolonge et qui élargit le plan de cohésion sociale aux dimensions non plus des quartiers mais de la métropole tout entière". Or celui-ci suppose de réduire le déficit dans l'offre de logements, qui accentue au contraire les disparités sociales et pèse lourdement sur les besoins en transports en éloignant toujours davantage le domicile et le lieu de travail. Le chef de l'Etat a donc fixé un objectif de livraison annuelle de 70.000 logements en Ile-de-France, soit près du double du rythme de construction avant la crise actuelle (environ 40.000 logements par an). Sur le plus long terme, l'objectif est de construire les 1,5 million de logements nécessaires au logement des Franciliens à l'horizon 2030.

Estimant que l'obstacle en la matière ne vient pas de la disponibilité du foncier - les superficies disponibles sont trois fois supérieures aux besoins -, Nicolas Sarkozy a clairement pointé du doigt la difficulté à lever pour parvenir à ce résultat : "Le problème, c'est la réglementation." Il estime par conséquent indispensable de "déréglementer". Cette orientation se situe dans le droit-fil de la loi du 17 février 2009 pour l'accélération des programmes de construction et d'investissement publics et privés qui a déjà introduit plusieurs allègements notables en matière d'urbanisme et de logement, afin de faciliter la mise en oeuvre du plan de relance (voir nos articles ci-contre).

 

Des objectifs "difficiles à atteindre"

Le chef de l'Etat a donné plusieurs exemples des assouplissements supplémentaires à mettre en œuvre : élever les coefficients d'occupation des sols et rétablir la continuité du bâti dans les zones denses, permettre à chaque propriétaire d'une maison individuelle d'ajouter une pièce ou un étage, rendre constructibles les zones inondables pour des bâtiments adaptés à l'environnement et au risque, utiliser les interstices et les délaissés d'infrastructures... Il entend également "en finir avec tous les zonages et pas seulement ceux de la politique de la ville". Enfin, le chef de l'Etat souhaite "changer nos procédures, notre façon d'appliquer le droit, sortir du respect passif d'une réglementation de plus en plus pesante, non pour laisser le champ libre au marché mais pour que la ville vive, respire, évolue, se développe en respectant des règles fortes, compréhensibles, efficaces, écologiques". Il a, pour cela, demandé au gouvernement d'engager "une réflexion approfondie sur ce changement de philosophie de notre droit de l'urbanisme".
Le chef de l'Etat n'a pas évoqué en revanche le cas particulier du logement social, ni précisé quelle devrait être sa part dans les 70.000 logements annuels à construire. Il est vrai que cette question constitue un dossier délicat dans une région qui concentre - avec Paca - une bonne part des communes ne respectant pas le quota de 20% de logements sociaux prévu par la loi SRU.

Le maire de Paris Bertrand Delanoë a salué "l'état d'esprit constructif" du chef de l'Etat mais s'est montré dubitatif sur la capacité d'atteindre ces objectifs. "70.000 logements par an, bravo ! Moi j'essaie d'en faire 6.800 par an et pour le moment l'Etat m'en bloque quelques centaines", a-t-il déclaré, jeudi. Même tonalité chez Jean-Paul Huchon, le président de la région Ile-de-France qui a vu dans les annonces présidentielles "autant de pistes passionnantes  pour offrir  un nouveau visage"  à la région, "avec une densité maîtrisée et une véritable mixité sociale". L'objectif affiché par Nicolas Sarkozy "est légèrement supérieur aux 60.000 actés par l'ensemble des collectivités locales", a-t-il relevé. Selon lui, "il sera difficile à atteindre, car le chiffre de 60.000 était lui-même très volontariste. Mais quels que soient les chiffres, cette bataille du logement ne pourra être remportée que si le gouvernement se décide enfin à faire appliquer la loi SRU."

Jean-Noël Escudié / PCA