Outre-mer : des contrats signés avec l'Etat d'ici l'automne

En clôture des Assises de l'Outre-mer, le 28 juin, Emmanuel Macron a détaillé ses priorités pour "l'archipel France". Priorités qui s'inscrivent dans le Livre bleu présenté par la ministre Annick Girardin, le même jour. Pour le chef de l'Etat, la mère des batailles est "la création d'emplois". Il a aussi insisté sur l'ouverture à la concurrence et le renforcement de l'ancrage régional des territoires ultramarins. La réforme constitutionnelle pourrait donner plus de marges de manoeuvres aux collectivités. Ces mesures seront déclinées dans chaque territoire dans un contrat, cet automne.

Sur chacun des territoires d’Outre-mer "il y aura des feuilles de route qui seront déclinées d'ici à l'automne et qui seront l'objet d'un contrat entre les représentants du gouvernement et les élus et qui impliqueront la responsabilité de chacun et l'action à venir". En conclusion des Assises de l’Outre-mer, jeudi 28 juin, Emmanuel Macron a fixé le cap de sa politique pour les territoires ultramarins. Une politique qui s’appuie sur un "Livre bleu" présenté le jour même par la ministre des Outre-mer Annick Girardin, venant ainsi ponctuer ces assises auxquelles 26.000 ultramarins ont participé pendant un an.
Le Livre bleu regroupe plusieurs dizaines de mesures qui s’articulent autour de quatre grands thèmes : l'amélioration du cadre de vie (sécurité, niveau de vie, accès aux services publics, etc.), la transformation accompagnée des territoires (développement économique, évolution juridique, etc.), les territoires pionniers (innovation en matière environnementale, économique) et "des territoires d'influence et de rayonnement". 

Priorité à l'emploi

"La priorité sera la bataille pour la création d'emplois", a martelé le chef de l’Etat, alors que le taux de chômage est de 28% à La Réunion et de plus de 20% partout ailleurs, soit le double de ce qu'il est en métropole. "Il y a des défis de sécurité et de santé qui sont plus vivaces dans tel ou tel territoire, c'est tout à fait vrai, mais il y a une bataille mère c'est celle pour la création d'emplois et l'activité économique", a-t-il insisté, après avoir longuement passé en revue les enjeux propres à chacun des territoires ultramarins, dans ce qu’il a appelé une "Odyssée de l’archipel de France". Cette bataille ne passera pas par "la création d'emplois publics", qui représentent "déjà un actif sur deux dans certains territoires" ultramarins. Elle reposera sur les "compétences", "l’éducation" et la "formation". 700 millions d’euros sur les 15 milliards d’euros d’un programme d’investissements dans les compétences (PIC) en cours de déploiement sont ainsi fléchés vers l’outre-mer. Le Livre bleu insiste à cet égard sur la coexistence paradoxale entre un chômage de masse et le nombre important d’emplois non pourvus. Il propose d’expérimenter un contrat de professionnalisation adapté, le développement des formations de pré-emploi des jeunes, le recours au service civique ou encore un accompagnement renforcé pour les bénéficiaires des minimas sociaux dont les détails "seront annoncés dans le cadre de la lutte contre la pauvreté en juillet".

Plus de concurrence

Le chef de l’Etat entend ouvrir davantage les entreprises à la concurrence et les inciter "à prendre les risques, à créer davantage d'emplois". Des décisions seront prises d’ici la fin de l’année sur la base des préconisations de l’Autorité de la concurrence. Bercy désignera "un délégué à la concurrence outre-mer au sein de la direction générale de la concurrence du ministère de l’Economie". Ce travail sera mené "sans relâche". Emmanuel Macron a estimé que "la vie chère" avait été organisée par "une politique de sur-rémunération" et "un système d'économies de rente".
Le livre bleu repose aussi sur une grande réforme des aides aux entreprises (avec création d’un système unique de zone franche) et sur la création d'un fonds d'intervention économique pour soutenir les initiatives privées d'un montant de 400 millions d'euros. Il est aussi prévu d’abonder le fonds exceptionnel d’intervention (créé en 2009) de 500 millions d’euros sur la durée du quinquennat pour soutenir les projets locaux…
Emmanuel Macron s’est aussi adressé aux collectivités, "donneurs d’ordres majeurs pour les entreprises". "Il faut enfin, pour gagner cette bataille de l’emploi, des collectivités publiques dont la gestion est saine", a-t-il lancé, rappelant que plusieurs d’entre elles, "et non des moindres", allaient signer "les contrats de maîtrise des dépenses". Il entend ainsi créer "un véritable mécanisme de redressement donnant/donnant avec l’ensemble des collectivités volontaires, qu’il s’agisse du département et de la région de La Réunion, de la région Guadeloupe, de la collectivité de Mayotte, de la ville de Fort-de-France" ou encore de la Guyane.
Le gouvernement travaillera en outre à "structurer les filières" et présentera d’ici l’été 2019 un projet de loi pour la prévention et la protection contre les risques naturels outre-mer.

Renforcer l'ancrage régional

A côté de l’environnement économique, la deuxième grande priorité du chef de l’Etat est le renforcement de "l’ancrage régional" des collectivités ultramarines. "Deux grands bassins sont concernés, les Amériques et l’Indopacifique, et plusieurs voisinages, Caraïbes, Amérique du Sud, océan Indien, Océanie... Sur chacun, il nous faut construire une stratégie", a-t-il dit. A titre d’exemple, La Réunion et Mayotte affichent le plus faible taux d’ouverture de toute leur région et plus de la moitié de leurs importations proviennent de la métropole.
Rappelant que la France était la deuxième puissance maritime du monde, Emmanuel Macron a proposé de bâtir une "stratégie îlienne" autour de la croissance verte et bleue. "Je souhaite en 2020 accueillir un sommet des îles du monde sur le territoire français, mais qui ne sera pas forcément un territoire hexagonal, où nous rassemblerons l'ensemble de ces îles du monde qui portent toutes des défis comparables, en termes de vulnérabilité, d’innovation, de défi de mobilité, de défi éducatif, et cette stratégie est aussi une stratégie transversale que nous devons porter", a-t-il annoncé.
Enfin, Emmanuel Macron a fait l’éloge de la "différenciation", rappelant les possibilités nouvelles qu’offrirait la révision de l’article 73 de la Constitution, "pour faciliter l'habilitation des collectivités qui souhaitent adapter les normes qui leur sont applicables". "Toutes les collectivités de la République, et c'est encore plus vrai pour les collectivités ultramarines, ont des défis très différents (…). Je souhaite que ce texte constitutionnel puisse ainsi cheminer et permettre à chacun, sur les sujets qu'il choisira, en matière de transport, en matière d'énergie, de logement, en matière d'urbanisme ou de santé, d'adapter les règles pour répondre aux besoins du terrain."

 Les principales mesures du Livre bleu outre-mer
- Création d'un nouveau dispositif d'intervention économique doté de 400 millions d'euros sur le quinquennat "pour soutenir les initiatives privées"
- Le fonds exceptionnel d'investissement (FEI) sera abondé pour accompagner les projets locaux (près de 500 millions d'euros sur le quinquennat)
- 700 millions pour les outre-mer dans le cadre des plans d'investissement dans les compétences et l'expérimentation d'un contrat de professionnalisation adapté
- Réforme des aides économiques outre-mer pour mieux accompagner les entreprises et les secteurs-clés avec la création d'un dispositif unique de zone franche et des exonérations de charges simplifiées
- Prolongation jusqu'en 2025 des dispositifs d'aide fiscale
(défiscalisation) à l'investissement outre-mer pour assurer de la visibilité aux opérateurs du logement social
- 500 gendarmes et policiers supplémentaires sur le quinquennat et une conférence nationale pour la sécurité des outre-mer au second semestre 2018, présidée par les ministres
- Projet de loi pour la prévention et la protection des risques naturels outre-mer en 2019
- Fonds dédié à la prévention en matière de santé; contrats d'installation spécifiques outre-mer pour les médecins libéraux
- Plan Eau pour la Guadeloupe avec l'objectif de faire cesser les "tours d'eau" sous 24 mois
- Création de 100 postes de médecins hospitaliers sur des spécialités non-pourvues
- Développement des dispositifs d'accueil collectifs des enfants de moins de trois ans, en priorité à Mayotte, en Guyane et à la Réunion, soit 6.500 places de crèches sur le quinquennat
- Meilleur accompagnement des familles en cas d'évacuation sanitaire vers la métropole
- Extension des programmes de réussite éducative dans tous les quartiers relevant de la politique de la ville outre-mer
- Grande conférence à la rentrée "pour donner un nouveau souffle à la politique du logement outre-mer"
- Création en 2019 d'un Fonds pour la préservation de la biodiversité ultramarine
- Création d'une plateforme de recherche par bassin géographique pour mettre en cohérence les acteurs et les réseaux
- Installation en Guyane du service "valorisation économique de la biodiversité" de l'Agence française de biodiversité (AFB)
- Création, en lien avec les collectivités locales, de deux réserves naturelles d'ici 2022 outre-mer
- Installation d'une Mission nationale pour l'innovation et la French Tech outre-mer
- Mise en place de filières de valorisations locale et régionale des déchets
- Création d'un conseil stratégique du tourisme outre-mer
AFP
 

 

 

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