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Patrimoine, archives, architecture : l'Assemblée dresse un bilan en demi-teintes de la loi LCAP

La commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale publie un rapport d'information sur la mise en oeuvre de la loi du 7 juillet 2016 dite LCAP, s'attachant en particulier au volet architecture et patrimoine, y compris les archives et l'archéologie.

Il y a un an, la commission de la culture du Sénat organisait une table ronde consacrée à l'application des dispositions de la loi relative à la liberté de création, à l'architecture et au patrimoine (LCAP) du 7 juillet 2016 (voir notre article ci-dessous du 29 octobre 2018). Aujourd'hui, c'est au tour de la commission des affaires culturelles et de l'éducation de l'Assemblée nationale de publier un rapport d'information sur l'évaluation de la loi LCAP (sur le contenu de la loi, voir notre article ci-dessous du 12 juillet 2016). Celui-ci est présenté, au nom de la commission, par Emmanuelle Anthoine, députée (LR) de la Drôme, et Raphaël Gérard, député (LREM) de Charente-Maritime.

Les services d'archives des collectivités légitimés

Comme dans le cas du Sénat, le rapport de l'Assemblée n'embrasse pas tout le champ de la loi LCAP – "l'un des textes les plus marquants de la XIVe législature" –, mais choisit de "s'attacher à l'examen des mesures phares de cette loi, celles ayant le plus d'impact sur la vie quotidienne des Français, en d'autres termes sur les volets relatifs à l'architecture et au patrimoine – au sens large du terme, c'est-à-dire en incluant les archives et l'archéologie".

Même s'il n'est pas sûr que les archives sont l'un des domaines ayant le plus d'impact sur la vie quotidienne des Français, le rapport n'en dresse pas moins un bilan détaillé des mesures de la loi sur le sujet. Celui est partagé. Côté positif, il salue la réussite de la mutualisation des archives numériques, proposée désormais dans "la plupart des départements et régions". Et cela même si l'inscription des données numériques dans le champ des archives ""nécessite encore beaucoup de travail".

Il se félicite également de l'élargissement de la notion d'archives publiques, qui "légitime les services d'archives des collectivités dans la collecte des documents et données de leurs délégataires, quel que soit leur statut : société d'économie mixte, société publique locale, syndicat, association". Le rapport est en revanche plus réservé sur les possibilités de mutualisation des archives pour les communes, qui "ne sont pas encore pleinement exploitées".

Du mieux sur l'archéologie préventive

Sur l'archéologie préventive, qui avait donné lieu à de vifs débats lors de la discussion du projet de loi LCAP, les avancées sont jugées incontestables, mais le système reste "en tension", tiraillé entre le poids de l'État, incarné par l'Inrap (Institut national de recherches archéologiques préventives), et le recours accru à la concurrence.

Si les rapporteurs ne trouvent rien à redire sur le renforcement du contrôle de l'État sur la qualité scientifique des opérations ou sur le fonctionnement des commissions territoriales, ils sont en revanche plus dubitatifs sur la procédure d'analyse préalable des offres, dans la mesure où les services régionaux de l'archéologie (SRA) font une lecture différente des textes. De même, le rapport estime qu'il conviendrait de valoriser davantage, auprès des collectivités et du public, les découvertes réalisées dans le cadre de l'archéologie préventive.

Patrimoine : le nouveau dispositif peine à s'imposer

Les rapporteurs se montrent plutôt positifs sur les dispositions de la loi LCAP relatives au patrimoine, même s'il faut encore les préciser "pour leur donner leur pleine efficacité". Ils jugent ainsi "encourageant" le premier bilan des nouvelles commissions consultatives chargées du patrimoine", davantage ouvertes aux élus et aux associations. De même, la redéfinition, opérée par la loi, du régime des abords est jugée "plus adaptée à la réalité et aux enjeux du terrain".

En revanche la création des sites patrimoniaux remarquables, qui remplacent des dispositifs de protection antérieurs – les zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager (ZPPAUP) et les aires de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine (Avap) – rencontre "un succès encore timide". Il convient également de lever le risque de blocage qui existe dans le cadre de l'intercommunalité et de faciliter l'acculturation des élus locaux sur ce nouveau dispositif.

Échec sur l'architecture

Mais c'est sur l'architecture que le bilan de la loi LCAP apparaît le plus mitigé. Côté positif : la mesure consistant à rendre obligatoire l'intervention d'un architecte pour établir le projet architectural, paysager et environnemental exigé pour l'instruction des demandes de permis d'aménager relatifs aux lotissements. Appréciée par les architectes, mais très contestée par les géomètres experts, cette mesure "a conduit les acteurs au dialogue et à l'interdisciplinarité" et doit contribuer à une amélioration de la qualité architecturale des nouveaux lotissements. Il reste néanmoins encore quelques difficultés à lever, notamment sur le moment de l'intervention de l'architecte, jugé trop tardif.

En revanche, les rapporteurs dressent un constat d'échec sur les mesures relatives à l'innovation architecturale, comme le permis d'innover et le permis d'expérimenter. Trop complexes, celles-ci restent encore largement inutilisées. Il en est de même pour le bonus de constructibilité en cas d'innovation ou de création architecturale.

Enfin, le rapport souligne "le faible impact des mesures incitatives dans le domaine de la maison individuelle". Le recours obligatoire à un architecte à partir de 150 m2 est une simple mesure correctrice, qui "n'a pas suffi à combler les attentes de la profession, qui revendique, dans le cadre du Grand Débat national, un abaissement à 100 m2, voire à zéro". De même, la possibilité de réduire les délais d'instruction dans le cas où le particulier a recours à un architecte alors qu'il n'y est pas légalement tenu, n'a pas été mise en œuvre. Un échec que les rapporteurs imputent à la méconnaissance des services des collectivités ou à des délais très contraints dans les faits rendant cette faculté inaccessible.

 

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