Permanence des soins : la participation aux gardes médicales continue de reculer

La seizième enquête annuelle menée auprès de l’ensemble des conseils départementaux de l’Ordre des médecins (CDOM) sur la permanence des soins ambulatoires (PDSA), publiée par le conseil national de l'Ordre des médecins, permet de faire un état des lieux national de la PDSA en dégageant à la fois les modalités d’organisations en place, entre autres dues au nouveau découpage territorial engendré par la fusion de certaines régions, leurs évolutions ainsi que les problématiques rencontrées. Tour d'horizon, au 31 décembre 2018, dans un contexte où le nombre de secteurs de gardes médicales  "a continué de diminuer, et ce pour toutes les plages horaires" et où le taux de participation à la PDSA a progressé dans 19% des départements, a reculé dans 32% et est resté stable dans 36%.

Alors que l'Assemblée nationale a adopté, en première lecture, le projet de loi "relatif à l'organisation et à la transformation du système de santé" (lire notre article du 27 mars), le conseil national de l'Ordre des médecins (Cnom) publie sa seizième enquête annuelle sur la permanence des soins ambulatoires (PDSA), autrement dit les gardes médicales. Ses résultats confirment les difficultés croissantes de la PDSA, avec toutefois des écarts considérables et des évolutions divergentes d'un département à l'autre.

Moins d'un quart des secteurs couverts en nuit profonde

Un premier résultat se lit dans le nombre de secteurs de PDSA (organisation territoriale des gardes médicales) qui "a continué de diminuer, et ce pour toutes les plages horaires". Il est ainsi passé de 1.579 à 1.442 secteurs en soirée, de 1.644 à 1.485 les week-ends et jours fériés, et de 423 à 387 en nuit profonde (de minuit à huit heures). Ainsi, si 98% des territoires sont couverts les week-ends et jours fériés, ce taux tombe à 91% en soirées de semaine et, surtout, à 23% en nuit profonde. Autre façon de voir les choses : il existe au moins une "zone blanche" en soirée dans 20% des départements (17% en 2017), dans 33% les week-ends et jours fériés (30%) et dans 90% des départements en nuit profonde (87% en 2017).

Le Cnom considère qu'"il est possible de penser que, lorsque la resectorisation ne résulte pas d'une baisse de l'activité constatée, elle relève d'une recherche d'efficience financière souhaitée par certaines ARS grâce à la suppression de gardes". En outre, la nuit profonde ne représenterait que 6% des actes réalisés dans le cadre de la PDSA, selon les chiffres fournis par l'assurance maladie

Des taux de participation de 10% à 100% selon les départements

En termes de participation, la PDSA repose essentiellement sur les médecins libéraux exerçant en cabinet (93% des médecins participants), les médecins remplaçants exclusifs et ceux des centres de santé représentant respectivement 5% et 1% du total. L'investissement personnel est loin d'être négligeable, puisque les médecins participant à la PDSA ont réalisé en moyenne 31 gardes durant l'année 2018.

Mais le problème est que le taux de participation varie très fortement d'un département à l'autre. Il va en effet de 10% à 100% des médecins selon les territoires. L'écart est donc considérable, même si l'Ordre précise que "ce taux est déclaratif et les bases de calcul ne sont pas nécessairement identiques, cela peut conduire à des résultats hétérogènes et non comparables d'un département à l'autre". Il reste néanmoins que seuls 19% des départements ont connu, l'an dernier, une hausse de la participation des médecins à la PDSA, tandis que 32% ont fait face au contraire à une diminution et que 36% ont vu leur situation inchangée. En outre le conseil de l'Ordre juge la situation "particulièrement fragile" dans certains secteurs de garde, Ainsi, 36% des secteurs de garde sont aujourd'hui couverts par moins de dix médecins volontaires, et 18% par moins de cinq médecins volontaires. Pour le Cnom, "la baisse du taux de participation peut être liée à des facteurs conjoncturels tenant à la démographie médicale ainsi qu'à des facteurs structurels tenant à l'organisation de la PDSA. La tendance à la réduction du nombre de territoires de garde peut conduire à une baisse du nombre de médecins y participant [...]".

Une question de motivation

A l'occasion de ce rapport, le conseil de l'Ordre a chargé l'institut Elabe de mener une étude auprès de 4.973 médecins généralistes, afin de connaître notamment les motivations et les freins à la participation à la permanence des soins. Il en ressort que le sens du devoir (76% de citations) et la solidarité avec les autres médecins de leur secteur (75%) sont les principaux leviers de participation pour les médecins généralistes, devant les motivations financières (53% en moyenne, mais davantage chez les moins de quarante ans et chez les remplaçants).

A l'inverse, les principaux freins à la participation sont un emploi du temps professionnel déjà chargé (81%), la fatigue induite par les gardes (68%) et la difficulté de concilier gardes et vie de famille. Ce dernier motif est davantage évoqué (84%) par les moins de 40 ans, les remplaçants et les femmes.