PLF 2024 : toutes les dispositions concernant les collectivités

Le "marathon budgétaire" débute ce 10 octobre, à l'Assemblée nationale, avec l'examen en commission de plus de 2.900 amendements sur la première partie du projet de loi de finances (PLF) pour 2024. Refonte des redevances des agences de l'eau, réforme des zones de revitalisation rurale, ajustement des modalités de certaines dotations, nouvelle exonération de taxe foncière pour les logements sociaux anciens, minoration des variables d'ajustement… Une kyrielle de mesures financières et fiscales sont à surveiller de près, compte tenu de leur impact potentiel sur les collectivités. Revue de détail.

  • PREMIERE PARTIE (RECETTES)

Instauration d’une nouvelle exonération de taxe foncière de 25 ans pour les logements sociaux achevés depuis au moins 40 ans, lorsqu’ils font l’objet de travaux de rénovation énergétique (article 6). Ces derniers devront permettre une amélioration sensible de la performance énergétique et environnementale - passage d’un classement "F" ou "G" à un classement "B" ou "A" - et le respect d’un certain nombre de normes. Sous ces conditions, cette exonération serait de droit et ne serait pas compensée aux communes et aux intercommunalités.

Aménagement des dispositifs fiscaux zonés bénéficiant aux territoires ruraux en difficulté (article 7). Principale mesure : la fusion au 1er juillet 2024 des zones de revitalisation rurale (ZRR), des bassins d’emploi à redynamiser (BER) et des zones de revitalisation des commerces en milieu rural (ZoRCoMiR). Dénommé France Ruralités Revitalisation, le zonage unique doit se voir appliquer "des allègements fiscaux simplifiés". Le même article proroge d'autres dispositifs, dont celui des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV). Ce dernier est prolongé jusqu'en 2024, année de sa révision. Le bénéfice de l’abattement de taxe foncière sur les propriétés bâties pour les logements sociaux dans les QPV est aussi prorogé en 2024 (pour les contrats de ville en cours) et au-delà, puisque sa reconduction sur la durée de la prochaine génération de contrats de ville est prévue.

Etalement sur quatre ans de la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) restante (comme annoncé dès la fin du mois d’août par le gouvernement). La CVAE sera totalement supprimée en 2027 (article 8). Le taux du plafonnement de la contribution économique territoriale - la "CET", c'est-à-dire la somme de la CVAE et de la cotisation foncière des entreprises, ou CFE - en fonction de la valeur ajoutée, est lui aussi ajusté, puisqu’il est progressivement abaissé sur quatre ans.

Encadrement de l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (Ifer) sur les réseaux de télécommunications fixes : le tarif de cette imposition dont bénéficient les régions serait ajusté à la baisse en année n chaque fois que le produit dépasserait 400 millions d'euros en année n-1 (article 9). Le plafond, fixé d'abord à 400 millions d'euros, serait revalorisé chaque année en fonction de l'inflation.

Réforme des redevances des agences de l'eau au 1er janvier 2025 pour "augmenter les ressources des agences de l’eau" et "assurer le financement des mesures du plan eau" annoncé par le président de la République le 30 mars dernier (article 16). Elle instaure deux "redevances pour la performance des réseaux d’eau potable et des systèmes d’assainissement collectif", qui seront dues par les communes ou leurs groupements. Les tarifs ou l’encadrement tarifaire prévus pour le calcul de chacune des redevances des agences de l’eau seront indexés chaque année sur l’inflation.

Fixation de la dotation globale de fonctionnement (DGF) à 27,1 milliards d'euros en 2024 (article 24). La hausse de 222,5 millions d'euros par rapport à 2023, est destinée principalement au financement de la croissance des dotations de péréquation. Avec cette enveloppe supplémentaire, plus de 60 % des communes doivent voir leur DGF "augmenter" en 2024.

Toutefois, pour permettre "la stabilisation" des concours financiers aux collectivités à la hauteur fixée par la loi de finances pour 2023, les "variables d'ajustement" – un ensemble de dotations et compensations d'exonérations fiscales – sont ponctionnées. Alors qu'en 2023, seuls les départements avaient été concernés, tous les niveaux de collectivités le sont en 2024 : les régions (- 30 millions), le bloc communal (- 27 millions) et les départements (- 10 millions). La dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP) de chaque catégorie de collectivité doit être minorée – de même que le fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle (FDPTP) pour le bloc communal. Les montants individuels dus doivent être calculés au prorata des recettes réelles de fonctionnement.

Mise en place d’une compensation par l'Etat (de 24,7 millions d'euros en 2024) au profit des communes et intercommunalités qui percevaient jusqu'à présent la taxe d'habitation sur les logements vacants (THLV) et, qui, dans le cadre de la réforme du périmètre des zones tendues, devront abandonner cette ressource (article 25). Pour rappel, quand elles entrent dans le périmètre des zones tendues, les communes peuvent instituer la majoration de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires. Mais lorsqu'il est actionné, ce levier ne permet pas toujours de compenser la perte de la THLV – une perte liée au fait qu'en zone tendue, la taxe sur les logements vacants (TLV) perçue par l'Etat se substitue à la THLV.

Accompagnement financier de la mobilisation des collectivités pour la réussite des zones à faible émission (ZFE). En premier lieu, le produit des amendes de la circulation dans les ZFE est exclu du compte d’affectation spéciale "contrôle de la circulation et du stationnement routiers". Par ailleurs, dans ces ZFE, les recettes des amendes forfaitaires (y compris les amendes majorées) générées par des systèmes de contrôle automatisés sont affectées aux collectivités mettant en place les contrôles. Ces mesures entreront en vigueur le 1er janvier 2025 (article 26).

Estimation des montants des prélèvements effectués sur les recettes de l'Etat et destinés aux collectivités en 2024 (article 27). Leur total est évalué à 44,8 milliards d'euros (soit + 783 millions d'euros par rapport à la loi de finances pour 2023). Parmi les facteurs de progression : la hausse de la DGF (+ 220 millions d'euros), la croissance du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (+ 364 millions d'euros) – cette dernière étant liée à la bonne tenue de l'investissement ces deux dernières années et à la décision du gouvernement de rendre les aménagements de terrain éligibles au FCTVA. A noter par ailleurs : alors que le gouvernement annonçait un coût du filet de sécurité en matière de dépenses énergétiques de 1,5 milliard d'euros en 2023, ce dispositif est évalué désormais à un coût de 400 millions d'euros.

Evaluation pour 2024 des crédits de la mission "Relations avec les collectivités territoriales" - qui financent les dotations d'investissement au bloc communal et aux départements - à un montant de 4,359 milliards d'euros en autorisations d'engagement et à 4,275 milliards d'euros en crédits de paiement - contre 4,280 milliards et 4,368 milliards dans le PLF pour 2023 (article 35, annexe B).

  • SECONDE PARTIE (DEPENSES)

Maintien en 2024 du bouclier tarifaire permettant de limiter la hausse des tarifs réglementés de l'électricité (article 52). Un dispositif auquel, pour rappel, sont éligibles les collectivités employant moins de 10 équivalents temps plein (ETP), avec moins de 2 millions d'euros de recettes et ayant contractualisé une puissance inférieure ou égale à 36 kVa.

Suppression du fonds de soutien au développement des activités périscolaires (article 54). Destiné à soutenir financièrement les communes et les intercommunalités compétentes dans le développement des activités périscolaires des élèves des écoles maternelles et élémentaires publiques et privées sous contrat, le FSDAP a représenté au cours de l'année scolaire 2022-2023 une aide de 41 millions d'euros pour 1.262 communes.

Répartition détaillée de la DGF en 2024 (article 56). La dotation de solidarité urbaine (DSU) progresse de 90 millions d'euros et la dotation de solidarité rurale (DSR) de 100 millions (au moins 60% de cette dernière étant affectés à la fraction "péréquation", que perçoit la quasi-totalité des communes de moins de 10.000 habitants). La dotation d'intercommunalité augmente de 90 millions d'euros (30 millions d'euros étant financés par l'Etat, les 60 autres millions venant de l'écrêtement de la dotation de compensation des groupements de communes à fiscalité propre). Les dotations de péréquation des départements croissent de 10 millions d'euros (par redéploiement depuis la dotation forfaitaire des départements). Enfin, 2,5 millions d'euros supplémentaires sont alloués au fonds d’aide au relogement d’urgence (FARU).

Ajustement des indicateurs financiers des départements à la suite du transfert aux communes de la taxe foncière sur les propriété bâties (article 56). Le PLF introduit un lissage sur trois ans (2024-2026) de la prise en compte du remplacement de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) par la TVA dans le potentiel financier des départements. Pour rappel, les indicateurs financiers servent au calcul et à la répartition des dotations et des dispositifs de péréquation. Il est également prévu de remplacer le recours au dernier taux de foncier bâti départemental (celui de l’année 2020), pour la répartition du fonds national de péréquation des droits de mutation à titre onéreux (DMTO), par un renforcement progressif jusqu’en 2027 de la pondération du revenu par habitant.

Modification des modalités de prise en compte du revenu par habitant pour l'éligibilité à la fraction cible de la dotation de solidarité rurale (DSR), afin de réduire d’environ 15% le nombre de communes entrant ou sortant chaque année de l’éligibilité à cette part de la DSR (article 56).

Création d'une garantie de sortie pour les communes qui perdent l’éligibilité à la part "majoration" de la dotation nationale de péréquation (article 56).

Précisions et clarifications concernant les dotations des communes nouvelles (article 56).

Renforcement de la dotation "biodiversité", qui devient la dotation de "valorisation des aménités rurales" (article 57). Comme annoncé le 15 juin par la Première ministre dans le cadre du plan France Ruralités, elle est dotée de 100 millions d'euros (soit 58,4 millions d'euros de plus que pour la dotation "biodiversité" en 2023). Elle serait attribuée à l’ensemble des communes rurales (au sens de l'Insee), dont une partie "significative" du territoire est couverte par une aire protégée ou jouxte une aire marine protégée.

Définition des modalités de répartition de la dotation pour les titres sécurisés, dont l'enveloppe passe de 52,4 millions d'euros en 2023 à 100 millions d'euros en 2024 (article 58). Objectif : donner les moyens aux communes de prendre en charge dans des délais maîtrisés les demandes de passeports et cartes nationales d'identité.

Réforme de la dotation particulière élu local (108,9 millions d'euros). Le but est d'introduire une prise en charge par l'Etat de la protection fonctionnelle des élus locaux de l'ensemble des communes de moins de 10.000 habitants (article 59). Jusque-là cette prise en charge existait pour les communes de moins de 3.500 habitants. Le coût de la mesure (0,4 million d'euros) est financé par l'Etat.

 

L'examen de la première partie du PLF 2024 débutera le 17 octobre dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale, et s'achèvera par un vote, en principe le 24 octobre. En sachant que la menace du 49-3 plane sur les débats.

 

 

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