Commande publique - Prestations d'action sociale : doit-on respecter le Code des marchés publics ?
Doit-on respecter les procédures de publicité et de mise en concurrence prévues par le Code des marchés publics pour organiser son arbre de Noël – et choisir son Père Noël -, mettre en place des séjours linguistiques pour les enfants des agents, gérer une crèche ou un restaurant administratifs ?
C’est à cette question posée par la députée Michèle Tabarot (UMP) - dont on se souvient par ailleurs du rapport sur la petite enfance rendu en juillet 2008 qui engageait le gouvernement à développer les crèches d’entreprise -, qu’a répondu le ministre de l’Intérieur. Et quelle est la réponse ? Si on est bien dans le cadre de l’action sociale, si l’on veut charger un organisme à but non-lucratif ou une association de cette activité, il n’est pas nécessaire de respecter les procédures de publicité et de mise en concurrence du Code des marchés. Explications :
l'article 9 de la loi du 17 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires définit l’action sociale comme étant destinée "à améliorer les conditions de vie des agents publics et de leurs familles, notamment dans les domaines de la restauration, du logement, de l'enfance et des loisirs, ainsi qu'à les aider à faire face à des situations difficiles. Le bénéfice de l'action sociale implique une participation du bénéficiaire à la dépense engagée sous réserve des dispositions propres à chaque prestation. Cette participation tient compte, sauf exception, de son revenu et, le cas échéant, de sa situation familiale". Ce même article dispose que "l’Etat, les collectivités locales et leurs établissements publics peuvent confier à titre exclusif la gestion de tout ou partie des prestations dont bénéficient les agents à des organismes à but non-lucratif ou à des associations" loi 1901.
La loi du 19 février 2007 (art 70 et 71) a intégré dans les dépenses obligatoires des collectivités territoriales celles relatives aux prestations sociales au bénéfice des agents territoriaux. L’assemblée délibérante fixe donc le périmètre de ces actions, c'est-à-dire la nature des prestations que la collectivité ou l’établissement public entend engager à ce titre ainsi que les modalités de mise en œuvre de l’action sociale, soit, directement, soit, par l’intermédiaire d’un ou plusieurs prestataires de service.
A condition que l’on soit bien dans le cadre d’une prestation d’action sociale – dont le Conseil d’Etat a donné une définition dans son avis n°369315 du 23 octobre 2003 (voir ci-dessous) –, une collectivité peut donc choisir librement et sans mise en concurrence un ou plusieurs organismes à but non-lucratif pour gérer ses prestations d’action sociale.
Hélène Lemesle
Références : Question écrite n°68012, de la député Michèle Tabarot, réponse publiée au Journal officiel du 16 mars 2010, p.3115.
Qu’est ce qu’une prestation d’action sociale ?
L’action sociale d’un employeur public en faveur de ses agents n’est pas définie précisément dans la loi. Mais, dans un avis du 23 octobre 2003 n° 369315, le Conseil d’Etat a expliqué ce qu'est une prestation d’action sociale : "La qualification d'action sociale ne peut être reconnue à des prestations que si, par leur contenu, elles présentent des caractéristiques garantissant leur vocation sociale et les distinguant des prestations à caractère purement marchand ; ce qui suppose notamment qu'elles ne se bornent pas à offrir des services disponibles et aisément accessibles, en termes de localisation et de prix, sur le marché et que leurs conditions d'octroi et de tarification les rendent accessibles à l'ensemble des agents, en particulier ceux à revenus modestes."
Selon le Conseil d'État, relèvent de l'action sociale "toutes les prestations à caractère individuel versées, au cas par cas, après examen de la situation particulière des agents et qui sont, au demeurant, d'un montant souvent modeste, ainsi que les prestations à caractère collectif tournées vers les catégories de personnel les moins favorisées, comme les séjours linguistiques, les séjours dits de découverte, les séjours réservés aux enfants handicapés, la gestion des crèches et des restaurants administratifs ou de l'arbre de Noël qui constituent les éléments les plus traditionnels de l'action sociale de l'Etat".
Dans une telle hypothèse, le Conseil d'État a estimé que les dispositions de l'article 9 de la loi du 17 juillet 1983 permettaient aux collectivités publiques "de choisir un ou plusieurs organismes pour gérer de telles prestations sans avoir à respecter les procédures de publicité et de mise en concurrence prévues par le Code des marchés publics".