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Projet de loi de finances : dernière salve d'amendements avant adoption

Avant d'adopter en première lecture, le 20 novembre en fin de journée, le projet de loi de finances pour 2019 (345 voix pour et 200 voix contre), l'Assemblée nationale a approuvé, au cours de la discussion de la seconde partie du texte, de très nombreuses dispositions de nature fiscale intéressant les collectivités territoriales. Localtis passe en revue les principales d'entre elles. 

Comptabilités locales

L'Assemblée nationale a adopté le principe du lancement d'une expérimentation ayant pour but de mettre en place un compte financier unique. Les collectivités territoriales et groupements intéressés pourront déposer leur candidature auprès du ministre en charge des collectivités territoriales et du ministre en charge des comptes publics, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi de finances pour 2019. Aucune taille minimale ne sera a priori exigée. Deux vagues d'expérimentation auront lieu, l'une sur la période 2020-2022 et l'autre sur la période 2021 et 2022. Les collectivités expérimentatrices n'auront plus qu'un seul compte à la place du compte administratif et du compte de gestion, sans toutefois que le principe de séparation de l'ordonnateur et du comptable ne soit remis en cause.

Un autre amendement prévoit le lancement à titre expérimental d'"agences comptables" rapprochant les services comptables des collectivités territoriales et de l'Etat. Pour une durée de trois ans reconductible, l'Etat pourra déléguer par convention la réalisation des opérations relevant de la compétence exclusive du comptable public. Les compétences déléguées seront exercées au nom et pour le compte de l’Etat, sous son contrôle. Un décret en Conseil d’Etat définira le contenu de la convention, les conditions de contrôle de l’Etat et l’obligation d’une transmission périodique à l’Etat des informations comptables et financières nécessaires à la production des comptes publics.

Évaluation de la valeur locative des locaux industriels

D'autres dispositions visent à retoucher la réforme des règles d’évaluation de la valeur locative des locaux industriels inscrite à l'article 56 du PLF 2019. Les députés ont décidé que, lorsque la valeur des installations techniques, matériels et outillages d'un local professionnel ne dépasse pas 500.000 euros (contre 300.000 euros initialement) ce local est toujours évalué en tant que local professionnel. Les députés ont aussi allongé de trois à six ans le dispositif de lissage des variations de la valeur locative d’un local industriel ou professionnel, lorsque celle-ci évolue de plus de 30% consécutivement à un changement d’affectation ou à un changement de méthode d’évaluation. Par ailleurs, si, à la suite d'un contrôle fiscal, une nouvelle méthode de détermination de la valeur locative d’un bâtiment ou d'un terrain industriel doit intervenir, son application ne sera pas rétroactive (seulement durant une période transitoire). Les députés ont encore prévu la réalisation l'an prochain par l'administration fiscale de simulations sur une extension de la méthode d'évaluation des locaux professionnels aux locaux industriels. Un rapport que le gouvernement remettra au plus tard le 1er avril 2020 permettra de mesurer les conséquences d'une telle modification notamment pour les finances des collectivités territoriales.

Imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux

Les mesures adoptées par les députés visent à :
- exonérer d'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (Ifer) pendant les cinq ans suivant leur installation les stations radioélectriques de téléphonie mobile que les opérateurs mobiles ont l’obligation d’installer pour couvrir les zones présentant un déficit de couverture ;
- réviser le tarif de l’Ifer déterminé par la seconde loi de finances rectificative pour 2017 - qui doit s’appliquer à compter de 2019 - à la fois aux lignes des réseaux de communications électroniques cuivre, mais aussi aux réseaux en câble ou fibre optique. Le nouveau tarif ne modifie pas le prélèvement global opéré sur les opérateurs téléphoniques et "préserve le rendement de l’imposition" au profit des collectivités territoriales ;
- garantir aux communes, quel que soit le régime fiscal de l'EPCI à fiscalité propre auquel elles appartiennent, qu'elles percevront 20% des recettes d'Ifer lorsque des éoliennes sont implantées sur leur sol. 

Petites taxes

Un amendement du gouvernement vise à réformer la taxe de balayage. Si un certain nombre de députés ont appelé à la suppression de cette taxe qui n'a été instaurée que par cinq communes – dont Paris –, l'Assemblée nationale a toutefois validé l'amendement, qui vise à simplifier la gestion de cette taxe. 
Une autre mesure tend à modifier les modalités de versement mensuel aux communes concernées de la contribution sur les eaux minérales. Objectif : assurer une plus grande prévisibilité des recettes pour les budgets locaux.

Financement du Grand Paris Express

Les députés ont adopté une série d'amendements visant à compléter le financement du Grand Paris Express, aujourd'hui évalué à 35 milliards d'euros. Ces dispositions inspirées notamment par le rapport de Gilles Carrez sur les ressources du Grand Paris, prévoient : 
- la création d'une quote-part de taxe de séjour, qui fonctionnerait comme la part départementale de taxe de séjour de 10%. Elle concernerait l’ensemble de l'Ile-de-France et serait affectée directement à la Société du Grand Paris (SGP). Gain espéré : une vingtaine de millions d'euros par an ;
- une réforme de la taxe sur les bureaux, locaux commerciaux et artisanaux, surfaces de stockage, entrepôts et stationnements, qui est aujourd'hui partagée entre la région Ile-de-France et la société du Grand Paris. L'assiette de la taxe est rénovée (les parkings commerciaux en feront partie) et son tarif est majoré à Paris et dans les Hauts-de-Seine. Les recettes supplémentaires pourraient atteindre une centaine de millions d'euros ;
- l'affectation à la SGP de la dynamique de la taxe annuelle sur les surfaces de stationnement. La région Ile-de-France, actuel bénéficiaire de la taxe, continuera à la percevoir dans la limite de 66 millions d'euros ;
- l'amélioration du suivi des coûts du Grand Paris Express. A l'initiative du gouvernement, une "règle d’or" a été définie pour contenir le niveau d’endettement de la SGP dans la limite de 35 milliards d'euros.

Paiements locaux

Une disposition permet d'aménager le dispositif de saisie administrative à tiers détenteur instauré par la loi de finances rectificative de fin 2017, qui entrera en vigueur le 1er janvier prochain. Il s'agit d'introduire la notion de cantonnement, dans le but que la totalité des fonds présents sur les comptes bancaires de la personne débitrice ne soient pas bloqués.

Exonérations de taxe foncière

Plusieurs mesures sont relatives aux exonérations de taxes foncières. Elles tendent à :
- permettre l'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties des bâtiments à usage agricole utilisé pour des activités annexes, lorsque la part des recettes tirées de ces activités ne dépasse pas en moyenne 10% des recettes totales des activités réalisées dans les bâtiments au cours des trois dernières années ;
- exonérer les établissements publics de santé du paiement de la taxe foncière sur les propriétés bâties lorsqu'ils intègrent un groupement de coopération sanitaire (GCS) de moyens ;
- exonérer des taxes foncières sur les propriétés bâties et non bâties les biens acquis et construits par un grand port maritime et "affectés à une mission de service public ou d'utilité générale et non productifs de revenus".

Les députés ont aussi adopté plusieurs amendements intéressant le secteur de la culture (lire notre article du 21 novembre) et deux amendements concernant les plateformes d'intermédiation locative de type Airbnb (lire notre autre article du 21 novembre).