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Référé provision : le paiement du titulaire du marché n'éteint pas le droit au paiement direct du sous-traitant

Dans un arrêt du 23 octobre 2017, le Conseil d'Etat tranche la question de savoir sous quelles conditions un sous-traitant peut obtenir une provision. La Haute Juridiction administrative a ainsi précisé que le paiement des prestations du sous-traitant au titulaire du marché n'exonérait pas le maître d'ouvrage de son obligation de paiement direct.

En l’espèce, la société Lesueur TP a sous-traité à la société Colas une partie de l’exécution du lot "Terrassements, voirie et aménagements des extérieurs" d’un marché de construction passé par la commune de Vivier-au-Court. Le montant de ce lot était de 235.399,23 euros et le maître d'ouvrage (MOA) a agréé les conditions de paiement direct du sous-traitant à hauteur de 126.762,67 euros. Cependant, ce dernier a saisi le tribunal administratif (TA) de Châlons-en-Champagne d’une demande en référé provision, estimant que la part lui revenant pour cette prestation était en réalité de 230.324,90 euros. Sa demande portait sur une provision de 77.721,45 euros, correspondant à la différence entre ce qu’il estimait lui être dû et ce qu’il avait déjà perçu. Le TA et la cour administrative d’appel (CAA) de Nancy ont rejeté cette requête. La Société Colas a alors saisit le Conseil d’Etat d’un pourvoi en cassation contre cette ordonnance.

Si le MOA a agréé les conditions de paiement d’un sous-traitant, ce dernier est en droit d’obtenir le paiement direct de ses prestations auprès du MOA. Sa demande de paiement doit alors être adressée en temps utile au MOA et au titulaire du marché.
Selon la CAA, deux obstacles s’opposaient à ce que la société Colas perçoive une provision. Elle a tout d’abord estimé que la demande de paiement direct n’avait pas été faite en temps utile. Les juges d’appel ont également considéré que les prestations en litige ayant déjà été payées au titulaire du marché, le sous-traitant ne pouvait prétendre à l’obtention d’une provision devant le juge des référés.
Le Conseil d’Etat a toutefois infirmé cette position. Il a tout d’abord rappelé qu’une demande de paiement direct faite avant l’établissement du décompte général et définitif devait être regardée comme effectuée en temps utile. Cette affaire à été pour lui l’occasion d’aller plus loin, estimant même ici que "l’établissement du décompte général et définitif du marché ne saurait faire obstacle à ce qu’il soit ordonné au maitre d’ouvrage de verser à un sous-traitant une provision au titre d’une obligation non sérieusement contestable". En outre, le caractère non contestable de la créance ayant été établi par une analyse du bureau en charge de cette opération, cet argument ne pouvait être utilement soutenu par la collectivité.

Concernant l’articulation entre le droit au paiement direct et l’obtention d’une provision : le Conseil d’Etat a rappelé que le paiement des prestations du sous-traitant au titulaire du marché n’exonérait pas le MOA de son obligation de paiement direct. La société Colas était donc bien fondée à demander une provision au juge, et cela même si la prestation, objet du litige, avait déjà été payée au titulaire du marché. La Haute Juridiction administrative a donc condamné la commune à verser une provision de 77.721,45 euros à la société Colas.


Référence : CE, 23 octobre 2017, n° 410235

 

 

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