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Intercommunalité - Réforme de la carte intercommunale : un verre à moitié plein ?

Deux départements sur trois ont adopté leur schéma de coopération intercommunale. L'ADCF, qui présentait ses voeux ce 18 janvier, estime que les situations de "blocage" sont peu nombreuses. Mais souligne aussi que ces schémas ne sont qu'une première étape et pourraient donc évoluer dès 2012.

Le hasard fait parfois bien les choses. Le jour même où l'Assemblée des communautés de France (ADCF) organisait, ce 18 janvier, sa cérémonie de voeux et recevait pour l'occasion le ministre des Collectivités ainsi que les représentants d'autres associations d'élus, dont le président de l'Association des maires de France,… la proposition de loi Pélissard visant à assouplir les règles relatives à la refonte de la carte intercommunale était enfin inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée. Plus précisément, si l'on savait déjà depuis quelques jours qu'elle serait examinée en commission le 25 janvier, on sait désormais aussi qu'elle passera en séance publique le 9 février. Depuis que l'AMF se fait entendre pour faire valoir l'urgence de l'examen de ce texte, rejointe hier par l'Association des petites villes de France
Reste maintenant à savoir si elle pourra être définitivement adoptée d'ici la fin de la session parlementaire. "Etant donné le calendrier, cela paraît un peu difficile", a estimé Daniel Delaveau, le président de l'ADCF, s'exprimant devant la presse avant d'accueillir le ministre Philippe Richert. Selon lui toutefois, "il peut y avoir un accord entre l'Assemblée et le Sénat sur les dispositions les plus urgentes", sachant que la proposition de loi "comprend, au-delà du report de la date d'adoption des schémas départementaux de coopération intercommunale, plusieurs autres dispositions".
Selon la dernière analyse en date de l'ADCF (pour le détail, voir encadré ci-dessous), 65 ou 66 schémas départementaux de coopération intercommunale (SDCI) avaient été adoptés au 1er janvier 2012. Autrement dit, les deux tiers (voir aussi notre article du 10 janvier ci-contre). Mais, souligne Daniel Delaveau, cela ne signifie pas qu'il y ait une situation de blocage dans un tiers des départements : le plus souvent, dans les départements n'ayant pas encore adopté leur schéma, il y a eu "un accord entre le préfet et la commission départementale de coopération intercommunale pour se donner un peu plus de temps", au-delà de la date du 31 décembre 2011 fixée par la loi de réforme des collectivités. Dans plusieurs d'entre eux, les réunions conclusives seraient prévues pour les jours qui viennent. En sachant aussi que dans le cas particulier des départements de la première couronne francilienne, le calendrier était moins contraint puisque ceux-ci étaient exclus de l'obligation inscrite dans la loi. Ainsi, l'Essonne devrait adopter son schéma la semaine prochaine tandis que le préfet du Val-de-Marne entend "poursuivre la concertation en 2012" puisqu'il n'a présenté son projet de schéma à la CDCI que le 16 décembre dernier.
Les situations difficiles se limiteraient donc à "quelques cas". Comme celui de la Charente-Maritime où, résume le président de l'ADCF, "les élus n'ont pas réussi à amender le projet du préfet, faute de majorité des deux tiers, mais ont en revanche pu réunir une majorité pour voter contre".

"Dès 2012, les schémas vont évoluer"

"Les blocages sont minimes, car les élus ont globalement fait prévaloir le principe de réalité", considère de même Charles-Eric Lemaignan, président délégué de l'ADCF. Ce qui signifie aussi que si "le minimum fixé par la loi est respecté" - que ce soit en termes de seuils de population ou de continuité territoriale -, "la rationalisation de la carte intercommunale n'est en réalité qu'en partie engagée". Daniel Delaveau le dit également : au-delà de la "partie prescriptive" inscrite dans les schémas adoptés, se dessine "une deuxième étape". Autrement dit, "dès 2012, les schémas vont évoluer". Certains schémas, par exemple, ne disent rien sur la question pourtant importante des syndicats intercommunaux, renvoyant ce volet à plus tard. "Certains y verront un verre à moitié plein, d'autres un verre à moitié vide… Je fais partie des premiers", assure le président de Rennes métropole.
Philippe Richert a pour sa part considéré que l'on compte finalement "beaucoup plus de schémas adoptés que ce qui avait pu être dit çà et là", que "le débat continue" en effet dans certains départements et que tout cela sera "peaufiné" en 2012... Globalement, il a souligné que "le travail sur les collectivités doit continuer" cette année avec, en ligne de mire, la nécessité de réfléchir à "une redéfinition des relations entre l'Etat et les collectivités".
Plus concrètement, on saura que le programme de travail 2012 de l'ADCF, au-delà de la mise en oeuvre de la nouvelle carte intercommunale, sera notamment centré sur la fiscalité et la péréquation, l'urbanisme, les ressources humaines (effectifs, mutualisation des services…) et sur "les questions économiques". L'opération "tour de France" organisée l'an dernier sera renouvelée avec, d'ores et déjà, une quinzaine de réunions en région prévues entre février et juin. En juin viendront les "universités d'été" de l'ADCF afin, à l'issue des élections nationales, d'"approfondir [nos] propositions en vue d'une deuxième phase de l'évolution de l'intercommunalité". Des propositions qui seront ensuite présentées lors de la convention nationale de l'association, du 3 au 5 octobre à Biarritz.
Enfin, l'actualité matérielle de l'ADCF, c'est aussi son emménagement dans des locaux communs à six associations (AMGVF, Acuf, Gart, Ville et banlieue, Fnau), lequel symboliserait "l'amorce d'une coopération renforcée" entre ces instances (le président de l'AMGVF l'évoquait lui aussi la semaine dernière lors de ses voeux. Voir notre article du 11 janvier ci-contre). Parallèlement, Daniel Delaveau a fait savoir qu'un groupe de travail allait être mis en place pour "étudier les modalités d'un rapprochement plus étroit entre l'Association des maires de France et l'ADCF, qui représentent les deux grandes associations généralistes du monde local". Un rapprochement devenu logique, a-t-il relevé, à l'heure où "l'intercommunalité devient la règle commune".

Claire Mallet

20% des communautés et 24% des syndicats vont disparaître
Au printemps dernier, les préfets faisaient preuve d'un volontarisme certain, avec l'objectif de réduire en moyenne d'au moins un tiers le nombre des communautés. La concertation au cours des mois suivants avec les communes et communautés, ainsi que les travaux des commissions départementales de coopération intercommunale (CDCI) menés principalement à l'automne, les ont conduits à revoir leurs ambitions à la baisse. La réforme intercommunale devrait finalement entraîner à moyen terme la suppression de 20% des communautés, d'après les analyses que l'ADCF a tirées de l'étude de 58 schémas adoptés avant le 31 décembre 2011. Un chiffre moyen qui masque des disparités très importantes d'un département à un autre. Supérieure à 50% dans les Deux-Sèvres, les Hautes-Alpes et la Dordogne, la réduction du nombre de communautés sera nulle dans l'Allier. Dans le Loiret et en Haute-Corse, les communautés seront même plus nombreuses après la réforme.
L'agrandissement des périmètres des communautés va impliquer de nombreuses fusions entre des communautés existantes. L'ADCF en comptabilise 226 dans les 58 départements étudiés. Le nombre des nouvelles communautés "XXL" (plus de 50 communes) demeurera modeste, avec 17 projets entérinés dans les 58 schémas. 8 nouvelles communautés d'agglomération sont par ailleurs prévues par ces schémas.
Du côté des syndicats, le gouvernement "voulait faire le ménage dans le maquis actuel", rappelle l'ADCF. Une ambition qui s'est parfois heurtée à l'opposition des élus locaux. Résultat : seul un quart des syndicats des 58 départements sera supprimé. Avec, comme pour les communautés, des différences notoires entre les départements. La Dordogne, par exemple, subira une réduction de 64% du nombre de ses syndicats, tandis que le Pas-de-Calais et le Loiret connaîtront des baisses respectives de 14 et 4%. Les domaines d'action les plus concernés par les fusions et les dissolutions sont l'eau, les déchets et le scolaire (malgré le souhait exprimé par l'Association des maires de France de préserver les syndicats compétents sur ce dernier thème).
Les 35 départements où le schéma devrait être adopté au cours des mois prochains (en général au premier trimestre 2012) "ne seront en général pas les plus ambitieux", affirme l'ADCF. Aussi, la baisse du nombre des communautés devrait rester proche en moyenne de 20%, lorsque la phase d'adoption des schémas sera achevée. 
Thomas Beurey 

 

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