Archives

Convention de l'ADCF - Réforme de la DGF : le gouvernement sera "ferme", mais "ouvert sur des points techniques"

Il l'a dit aux élus intercommunaux réunis à Tours ces 8 et 9 octobre : lors de la discussion sur le projet de loi de finances pour 2016 qui débutera le 13 octobre à l'Assemblée nationale, le gouvernement acceptera des amendements sur la réforme de la DGF, notamment sur les critères utilisés pour la répartition des dotations... Mais ne laissera aucune chance à une remise en cause de la baisse des dotations.

Le secrétaire d'Etat au Budget s'est montré ferme, ce 8 octobre, sur l'intention du gouvernement de parvenir à la mise en œuvre dès 2016 de la réforme de la dotation globale de fonctionnement (DGF), tout en se disant prêt à des amendements sur cette réforme durant le débat parlementaire sur le projet de loi de finances (PLF) pour 2016.
Présent à la 26e convention nationale de l'Assemblée des communautés de France (ADCF) qui s'est tenue à Tours les 8 et 9 octobre, Christian Eckert a résumé l'état d'esprit de l'exécutif sur la réforme, à quelques jours du début de la discussion à l'Assemblée nationale : "Nous avons la volonté d'y aller, de l'achever avant la fin de l'année et de la mettre en œuvre". Aussi, "le gouvernement sera ferme". Mais, a-t-il ajouté, il fera preuve d' "ouverture" sur "un certain nombre de points techniques". Le secrétaire d'Etat au Budget s'est dit en particulier intéressé par un nouveau critère qui pourrait servir à la répartition de la DGF, notamment la dotation de centralité : le rapport entre le produit fiscal total perçu par l'habitant et le revenu moyen par habitant. "La question de l'effort fiscal me paraît importante, a-t-il reconnu, c'est une question de justice." Si ce critère était ajouté au PLF, les élus locaux seraient entendus. Ils en avaient exposé les principes devant le gouvernement lors de la séance du Comité des finances locales du 29 septembre dernier. Des maires ruraux aux maires de grandes villes, il y a "un relatif consensus" sur le sujet, a précisé, en s'en félicitant, Charles-Eric Lemaignen, président de l'ADCF.

"Une territorialisation de la DGF trop timide"

Si l'association représentant les élus de l'intercommunalité approuve la réforme de la DGF, elle n'en conteste pas moins certaines des modalités. Selon elle, les dotations forfaitaires d'un montant unique allouées à toutes les communes quelles qu'elles soient et la dotation de centralité (avec une part affectée à l'intercommunalité qui est plafonnée à 40%) ne prennent pas suffisamment en compte "les situations individuelles des communes, leur potentiel financier et leur intégration au sein d'une intercommunalité".
Par ailleurs, l'association a redit son regret de ne pas voir l'introduction de la "DGF locale". Certes, a reconnu son président, le PLF prévoit de territorialiser la dotation de centralité. Mais c'est insuffisant, a-t-il poursuivi avec le soutien d'une partie importante des présidents d'intercommunalité qui, lors de l'assemblée générale de l'ADCF, se sont exprimés sur le sujet via un sondage. Avec la DGF locale, "nous ne voulons pas bien sûr priver les communes de leurs ressources, mais analyser en 'bloc' les réalités communales et intercommunales", a expliqué Charles-Eric Lemaignen. Le président de la communauté d'agglomération d'Orléans tente, en vain, de rassurer ses collègues maires sur la question. Ceux-ci refusent tout pas en cette direction. Et c'est justement pour ne pas "entrer en guerre" avec les associations de maires que le gouvernement – au regret de certains membres de l'exécutif, comme Christian Eckert et Marylise Lebranchu - n'a pas retenu l'option d'une territorialisation appliquée à l'ensemble de la DGF.

Pour un autre tempo

Enfin, l'ADCF est en désaccord sur le calendrier, partageant en cela la position des autres associations d'élus locaux. Elle souhaite que le projet de loi de finances "fixe l'architecture générale de la réforme, mais laisse une année de plus pour en préciser les critères et les différents paramètres". Cette réforme en deux étapes aurait l'avantage de faire débuter l'application de la réforme de la DGF au 1er janvier 2017, c'est-à-dire au moment où naîtront les nouvelles communautés définies par les projets de carte présentés ce mois-ci par les préfets. Cette question de la synchronisation des réformes pourrait d'ailleurs resurgir lors des débats parlementaires. On notera en effet qu'un député comme Olivier Dussopt, qui préside aussi l'Association des petites villes de France (APVF) préconise de passer par deux étapes. Il s'agirait de prendre d'ici la fin de l'année une série de mesures sur "tout ce qui est 'facile'", à savoir les questions relatives aux dotations de péréquation. Puis, dans un second temps, le législateur s'attellerait à "l'architecture" des dotations.
Des simulations sont absolument indispensables sur ce volet de la réforme, ont convenu l'ensemble des élus locaux, qui craignent, malgré les garanties prévues par le PLF, qu'il ait des effets déstabilisants pour les ressources de nombreux territoires. Si au grand dam des édiles, le gouvernement tarde à les communiquer, c'est parce qu'il dispose pour l'heure de chiffres qui ne prennent pas en compte la DGF des futures métropoles du Grand Paris et d'Aix-Marseille, a confié Christian Eckert. Le secrétaire d'Etat a aussi avoué sa gêne. "Tout le monde est d'accord sur les principes. Puis tout le monde demande des simulations et se précipite sur la ligne qui le concerne quand il les a. Et à ce moment-là, les principes deviennent un peu plus vacillants", a-t-il ainsi déploré.

Christian Eckert : "la baisse des dotations, une forme de solidarité"

Comme sur la réforme de la DGF, le secrétaire d'Etat a fait preuve de fermeté sur la baisse des dotations de l'Etat, mais sans proposer cette fois d'"ouverture". La baisse [de 11 milliards d'euros] pour les trois années [2015 à 2017] "ne sera pas remise en cause", a-t-il insisté lors d'une conférence de presse organisée à l'occasion de son déplacement. Tout en relativisant l'importance de cette baisse, comme il le fait depuis des mois, il a considéré que cette mesure est une "nécessité" et une "forme de solidarité". Une expression qui faisait écho à l'intitulé du forum de la convention consacré aux "solidarités territoriales". Il s'est aussi agacé de "l'alarmisme" dont selon lui fait preuve l'Association des maires de France (AMF). La France "doit être le champion du monde des pays qui cherchent à se faire peur". Cette attitude pourrait d'ailleurs, selon lui, nuire à l'investissement public local, alors que les associations d'élus locaux pointent les menaces qui pèsent sur celui-ci du fait de la baisse des dotations.
Comme l'AMF, l'ADCF réclame une atténuation de la réduction des dotations et son étalement dans le temps. Elle considère, de plus, que la part de l'effort d'économies auquel contribuent les collectivités locales (22% des 50 milliards d'euros) est supérieure à leur poids dans la dépense publique totale (18%). L'écart viendrait du fait que l'Etat a assimilé les collectivités territoriales aux administrations publiques locales, alors que le champ de celles-ci couvre aussi les hôpitaux.
L'ADCF s'élève par ailleurs contre la répartition de la baisse des dotations du secteur communal entre les communes qui en supportent 70% et les intercommunalités, qui, elles, doivent fournir un effort de 30%. En ne comptabilisant pas les reversements financiers aux communes, ce qui serait plus équitable selon l'ADCF, ce taux passerait à 23%. A la satisfaction de l'association, le secrétaire d'Etat au Budget s'est dit "prêt à ce que l'on bouge au Parlement" sur cette question. Mais l'issue du débat dépendra en grande partie de la position des parlementaires.