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Transports - Réforme ferroviaire : les députés pointent des zones de flou

Plusieurs articles du projet de loi de réforme ferroviaire, qui va faire l'objet d'une procédure accélérée et sera discuté en séance publique du 17 au 19 juin, ont été examinés ces 27 et 28 mai par la commission du développement durable de l'Assemblée nationale.

Ce ne sont pas moins de 450 amendements (en partie rédactionnels) au projet de loi de réforme ferroviaire qui ont été passés au tamis, et ce jusque tard dans la nuit du 27 mai, puis ce 28 mai dans la matinée, par les députés de la commission du développement durable. "Une soif de clarté" s'est exprimée sur des volets intéressant directement les collectivités. "Dont les régions, qui ont grandement financé le matériel sans en avoir la propriété", n'a pas manqué de tacler Joël Giraud. Ce député (Parti radical de gauche) des Hautes-Alpes a insisté pour en savoir plus sur le poids que prendra la représentation des régions au sein du conseil de surveillance du futur gestionnaire d'infrastructure, où l'Etat restera majoritaire. Et ce sans grand retour car il semble, comme l'a relevé le député de Haute-Savoie Martial Saddier, que "plusieurs amendements sur le rôle des régions dans le dispositif soient renvoyés au débat en séance publique".

Accords et désaccords

Les débats en commission ont avant tout porté sur le rôle de l'Etat stratège et sur les moyens qu'aura le Parlement pour suivre les engagements pris à la suite de cette réforme. Entre l'Etat et les trois futurs Epic - SNCF en Epic de tête, SNCF Mobilités et SNCF Réseau regroupant SNCF Infra, Réseau Ferré de France et la Direction de la circulation ferroviaire -, des contrats d'objectifs révisables tous les trois ans seront passés pour fixer le cap. Gilles Savary, député de Gironde et rapporteur socialiste du projet de loi à l'Assemblée nationale, estime cela suffisant. Il a également rappelé que l'objet du texte est de "stabiliser le modèle économique du système ferroviaire, qui va actuellement droit dans le mur". En s'inspirant du modèle du rail allemand et en le rendant eurocompatible, tout en préparant l'arrivée de la concurrence et "en donnant plus de cohérence fonctionnelle au groupe SNCF". Des députés, à l'instar de Martial Saddier, affûtent néanmoins leurs arguments car ils sont en total désaccord avec l'un des points clés de la future architecture, à savoir la création et le rôle dévolu à l'Epic de tête (future SNCF). L'indépendance de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires (Araf), dont la tutelle ministérielle reste pour l'heure marquée, a aussi suscité des remous mais un accord semble en vue pour "professionnaliser" un peu plus cette structure (recrutement de deux vice-présidents) sans qu'elle ne change trop de statut.

Gestion des gares

Les discussions restent crispées sur le sujet complexe de la gestion des gares. Un amendement fixant une comptabilité séparée entre les services du transporteur et la gestion de ces gares a certes reçu un avis favorable, mais plusieurs députés proposent d'aller plus loin sur le sujet, sur lequel le rapporteur prescrit au contraire de la prudence et du temps nécessaire à prendre. Comme le fixe un décret de 2003, les gares sont actuellement réparties en trois catégories (gares d'intérêt national, régional et local) suite à un classement revu en 2013 par Gares & Connexions. Dans les plus petites et rurales notamment, les financements proviennent en grande partie de collectivités. Ce point sur la répartition des rôles fait débat et sera revu en séance.

Cession de biens

Tout comme un chapitre du projet de loi sur la gestion domaniale (section 4, art. L. 2102-13). Celui-ci fixe que "les biens immobiliers de la SNCF peuvent être cédés à l'Etat ou à des collectivités territoriales pour des motifs d'utilité publique, moyennant le versement d'une indemnité égale à la valeur de reconstitution". Collectivité municipale ou intercommunale portant l'utilité publique, emprise faisant l'objet d'un droit de préemption lui-même délégué : une pluralité de cas seront possibles. Joël Giraud estime que la SNCF ayant fait "rénover son patrimoine avec l'argent des régions ou communautés d'agglomération", il serait logique que si cession il y a et qu'une autorité organisatrice de transports (AOT) ayant déjà investi dans ce bien s'en saisisse, il soit défalqué du prix le montant de la subvention qu'elle a déjà versé. "Pas question que les collectivités paient deux fois", a soutenu Martial Saddier. Le secrétaire d'Etat aux Transports, Frédéric Cuvillier, promet que ce problème de rachat suite à subvention doit, "avant d'ouvrir la boîte de Pandore sous prétexte de bien faire" et d'ensuite le regretter, être étudié de près par l'administration financière car il réclame une expertise approfondie. D'autres clarifications demandées par les députés relèvent, selon lui, plus du cadre général que du ferroviaire en soi.

Cri d'alarme sur les TET

Des députés reprochent au texte de trop peu tenir compte de l'enjeu croissant du sauvetage des trains d'équilibre du territoire (TET). Une convention de financement de la première tranche du renouvellement des ex-trains Corail a certes été signée en décembre dernier mais, à leurs yeux, ce portage par l'Etat n'est pas sans défauts. Valérie Lacroute, députée UMP de Seine-et-Marne, a ainsi alerté sur la situation de ces "trains au milieu du gué" et pourtant fondamentaux pour "tout un pan de l'aménagement du territoire". Un amendement proposant d'inclure dans le projet de loi la mise en place d'un nouveau schéma national de services de transport, afin d'avoir "plus de visibilité sur les projets", comme l'a défendu François Michel-Lambert, député EELV des Bouches-du-Rhône, devrait revenir en séance publique.