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Fonction publique - Revalorisation des traitements des agents : le gouvernement abat ses premières cartes

Dans le cadre de la négociation sur l'avenir de la fonction publique, le gouvernement vient de mettre sur la table ses premières propositions de recomposition et de revalorisation des grilles de rémunération des 5,6 millions d'agents publics. Une partie des primes perçues par les agents va être transformée en points d'indice et les durées des carrières en catégorie C vont être allongées.

Les organisations syndicales ont discuté ce 21 avril dans la matinée avec les représentants du ministère en charge de la fonction publique d'un projet de revalorisation des grilles de rémunération des agents de catégorie C des trois fonctions publiques.
"La restructuration de la catégorie C comporte de réelles avancées", défend l'entourage de la ministre, Marylise Lebranchu, dans le document de travail qu'il a fait parvenir aux représentants syndicaux quelques jours avant la réunion. Principale évolution proposée par le ministère : la réduction de 4 à 3 du nombre d'échelles de la catégorie C. La mesure doit se traduire par la fusion de l'échelle 4 avec l'échelle 5 et par l'intégration des agents de l'échelle 3 dans une nouvelle échelle 4. Cette architecture n'entraînerait pas de modifications des modalités d'accès à la catégorie C (recrutement avec ou sans concours).
Par ailleurs, les grilles de la catégorie C vont être revalorisées. Dans un premier temps, une partie des primes des agents vont être transformées en rémunération indiciaire. Ce sont au total 4 points supplémentaires qui seront ainsi attribués aux agents de catégorie C, même à ceux qui ne perçoivent pas de prime. "Les primes transformées en points d'indices ne devront pas correspondre à la rémunération de travaux supplémentaires effectifs ou à la compensation de sujétions spécifiques", précise le ministère en charge de la fonction publique. Il devra plutôt s'agir de "primes versées à l'ensemble ou à la quasi-totalité des membres d'un corps ou d'un cadre d'emplois au titre de l'exercice de leurs missions".
A l'intégration partielle des primes dans la rémunération indiciaire, s'ajouteront des mesures complémentaires de revalorisation des grilles, prévues par étapes successives jusqu'en 2022.

Un déroulement de carrière amélioré

Le ministère défend un projet qui augmenterait l'amplitude du déroulement de carrière des agents. Par exemple, ceux qui se trouvent à la fin du grade accessible par concours auraient une rémunération indiciaire supérieure de 26% par rapport aux agents se situant au début de ce grade (contre un taux de 18% aujourd'hui). En outre, le bas et le sommet de la grille seraient revalorisés (de 2,2% pour l'indice plancher). Mais, dans le même temps, les durées des carrières seraient allongées, de 22 ou 26 ans actuellement, à 30 ans à l'avenir. Seule la durée de l'échelle 6 ne serait pas modifiée.
Autre proposition, la procédure d'avancement de grade des agents de catégorie C serait alignée sur celle des agents de catégorie B, c'est-à-dire en fonction d'un tableau de classement.
Les agents de catégorie B, dont le sort n'a pas été examiné lors de la réunion, bénéficieraient, d'après le document de travail du ministère, de 6 points d'indice supplémentaires du fait de l'intégration d'une partie des primes dans la rémunération indiciaire. Par ailleurs, le bas du premier grade serait revalorisé de 10 points et celui du deuxième grade de 13 points. Avec le relèvement du sommet de la grille, l'amplitude indiciaire de celle-ci serait de 72%.
S'agissant des grilles des agents de catégorie A, qui feront l'objet d'une réunion ultérieurement, il est prévu une revalorisation indiciaire de 9 points par l'intégration partielle des primes à la rémunération indiciaire. Là encore, le plancher et le plafond de la grille seraient aussi améliorés (+ 2,7% pour le bas).

"L"objectif n'est pas atteint"

La réduction de 4 à 3 du nombre d'échelles dans la catégorie C semble plutôt bien accueillie. Répondant à une demande de plusieurs organisations syndicales, elle aura pour effet d'harmoniser la structure des corps et cadres d'emplois des catégories C et B. De plus, selon Pascal Kessler, en charge des questions statutaires à la Fédération autonome de la fonction publique (FA-FP), "le déroulement de carrière des agents concernés, plus fluide, comportera moins de freins".
Au-delà de cette évolution perçue positivement, les responsables syndicaux restent sur leur faim. "La ministre voulait une grille ambitieuse donnant de l'amplitude aux carrières. L'objectif n'est pas atteint", réagit Claude Simoneau, secrétaire général adjoint de la Fédération générale des fonctionnaires Force ouvrière (FO). Les grilles de rémunération des agents ne seraient donc pas améliorées par le projet de l'administration. Bien au contraire, selon le responsable syndical. En prenant en compte les augmentations dans les années à venir des cotisations salariales pour la retraite, un agent situé au 9e échelon de la nouvelle échelle 5 de la catégorie C perdrait, par rapport à aujourd'hui, plus de 130 euros nets par an. De son côté, Pascal Kessler attend d'en savoir plus. "On manque de précisions sur l'économie globale du projet. On ne sait pas non plus précisément quel sera le calendrier de mise en œuvre", souligne-t-il.

Le ministère pourrait faire des gestes

Les syndicats tenteront de faire pression sur le ministère pour décrocher des avancées. D'autant que ce dernier a affirmé disposer encore de marges de manœuvre. Pour Pascal Kessler, le ministère pourrait ainsi accepter la répartition de points d'indice supplémentaires "à l'intérieur des grilles". Mais, il serait moins ouvert à une nouvelle augmentation du sommet des grilles, celle-ci étant plus coûteuse.
Le ministère n'a pas chiffré le coût global des mesures. La transformation de primes en points doit être en partie autofinancée. Elle mettrait aussi à contribution les employeurs publics pour compenser les écarts de cotisations. Pour financer l'augmentation des points d'indice, le ministère pourrait utiliser, au moins en partie, la manne dégagée par la suppression progressive, à partir du 1er mai, de "l'indemnité exceptionnelle" octroyée depuis 1997 aux fonctionnaires lésés par le transfert des cotisations sociales vers la CSG. Annoncée mi-avril, la suppression de cette prime "avant la fin 2017", doit permettre d'économiser 500 millions d'euros.
La négociation sur les parcours, carrières et rémunérations des 5,6 millions d'agents publics doit se conclure le 2 juin prochain.