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Refondation de l'école - Rythmes scolaires : les maires ruraux ne veulent pas de moratoire, mais de la souplesse

Le représentant français des maires ruraux, Vanik Berberian, n'est pas pour un moratoire de la réforme des rythmes scolaires, ni pour le libre-choix donné aux maires d'appliquer ou non la réforme. Lui, il la veut, la réforme des rythmes scolaires. Et tant pis si tout n'est pas parfait tout de suite.

"Je serais maire aujourd'hui, je serais très heureux de mettre en œuvre la réforme des rythmes scolaires", a assuré Claudy Lebreton, président de l'Association des départements de France, lors de la présentation à la presse, dans les locaux parisiens de l'ADF, mardi 6 mai, d'un guide intitulé "Le maire et l'école", publié par l'Association des maires ruraux de France (voir notre encadré ci-dessous).
Vanik Berberian, président de l'AMRF, ne conteste pas. "La réforme est nécessaire", est-il convaincu. Une réforme "dans l'intérêt de l'enfant : le confort des enseignants, des élus et des professionnels du tourisme, ça passe après", avait-il assuré la veille à Benoît Hamon. "Mais chez nous, il y a un principe : celui qui décide, c'est celui qui paye", estime-t-il encore, rappelant que les marges de manœuvre en la matière sont très diverses d'une commune à l'autre. D'ailleurs, selon lui, le clivage n'est pas tant entre communes rurales et communes urbaines, qu'entre communes riches et communes pauvres. D'où son appel récurrent (et solitaire, il faut bien le dire) à un financement des temps d'activités périscolaires par la péréquation.

Pas question d'enterrer la réforme

Mais de moratoire, Vanik Berberian ne veut pas en entendre parler. Selon lui, cela "enterrerait la réforme pour encore 30 ans". Pas question non plus de donner le libre-choix au maire d'appliquer ou non la réforme, comme le suggèrent plusieurs parlementaires UMP (voir nos articles ci-contre). Le représentant des maires ruraux milite quant à lui pour davantage de "souplesse".
Il faut "donner le temps aux communes", insiste-t-il. C'est pour cela que l'assouplissement du futur décret "Hamon", permettant de regrouper les 3 heures de temps d'activités périscolaires sur une demi-journée quitte à revenir à une journée scolaire de 6 heures, est une solution. Une solution de "moyen terme", précise-t-il, "car l'objectif demeure l'allègement de la journée d'école". "Ce n'est pas idéal, mais c'est mieux que rien", explique-t-il encore, "et si on parvient à monter en puissance avec davantage d'animateurs formés, on pourra revenir (aux termes du décret "Peillon")".

En phase avec le gouvernement

Le représentant des maires ruraux serait ainsi en phase avec le gouvernement qui, en changeant de ministre de l'Education nationale, a aussi changé la tonalité de son discours. François Hollande a ainsi reconnu ce même 6 mai au matin, sur BFMTV-RMC, qu'il y avait pu avoir "des difficultés d'adaptation" dans l'application de la réforme des rythmes scolaires. "Raison pour laquelle" il avait demandé à Benoît Hamon "d'adapter, simplifier et assouplir" le dispositif conçu par son prédécesseur. "Faisons en sorte que dans la plupart des communes, ça se passe bien et nous en ferons l'évaluation. Je ne suis pas dogmatique. Si dans deux ou trois ans il y a des retours qui ne sont pas ceux que l'on a espérés, nous en ferons le bilan", a ajouté le président de la République.
Comme Benoît Hamon, Vanik Berberian ne pousse pas à l'excellence immédiate, et se réfère au "principe de réalité". Selon lui, une commune peut par exemple débuter des TAP d'une heure par semaine pendant quelques mois (au lieu de 3 heures), et pas forcément dès la rentrée scolaire. Il fait d'ailleurs remarquer que, dans son académie (l'académie d'Orléans-Tours), qui annonce que 93% des communes ont adressé leur projet, seuls trois dossiers comprennent de véritable projet éducatif, "les autres, ce ne sont que des emplois du temps", rapporte-t-il.

"Education territoriale" ?

Le nouveau ministre de l'Education nationale aurait été sensible à ces arguments, et totalement conscient des difficultés financières. C'est toute la différence entre "un ministre qui a exercé un mandat d'élu, avec de la terre à ses godasses" et un autre "qui n'avait pas compris que l'Education nationale ne peut plus fonctionner sans les collectivités locales", souligne Claudy Lebreton.
L'élu des Côtes-d'Armor va d'ailleurs jusqu'à s'interroger : "Faudrait-il encore parler d'Education nationale ?" Pour sa part, il plaide pour l'"Education territoriale", donnant pour exemple un enseignement de la musique qui pourrait être plus important en Bretagne qu'ailleurs. Voilà un débat dans l'air du temps de la décentralisation et de la réforme territoriale (surnommée "implosion territoriale" par Vanik Berberian). Pour qui ne craint pas de beaucoup fâcher le corps enseignant...

Valérie Liquet

 
"Le maire et l'école, guide pratique à l'usage des maires ruraux"

L'Association des maires ruraux de France publie "Le maire et l'école, guide pratique à l'usage des maires ruraux". Pourquoi ce guide ? "Parce que j'en avais besoin", confie Vanik Berberian, président de l'AMRF et maire depuis 1989. Le document s'adresse aussi bien aux anciens comme aux nouveaux élus, pour les aider à y voir clair dans "ce domaine touffu en réglementation". Validées par les services du ministère de l'Education nationale, les 10 fiches qui composent aujourd'hui le guide portent sur les domaines aussi variés que : les acteurs de l'école, la compétence scolaire, le financement de l'école, le service d'accueil, la restauration scolaire, l'accueil périscolaire, les transports scolaires, la scolarisation des "tout petits", les fermetures et ouvertures de classes et l'organisation de la scolarité.
Ces fiches sont "volantes" et perforées pour permettre une actualisation aisée de ce document qui se veut "évolutif". Une fiche sur le numérique à l'école serait par exemple bienvenue (le sujet fait l'objet de quatre lignes et demi dans la fiche "Le financement de l'école", un peu maigre quand on sait combien c'est un enjeu pour les maires ruraux, porté d'ailleurs par l'AMRF, voir notre dossier Localtis Les TICE, un plan numérique pour l'éducation).
La version papier du guide sera diffusée en exclusivité aux communes adhérentes à l’AMRF, par voie postale, courant mai. Pour les autres, il faudra attendre la rentrée. Une version électronique sera alors disponible sur le site internet de l’AMRF, "avec les premières évolutions", promet l'association.
V. L.
 

 

 

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