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Elus locaux - Statut de l'élu local : en finir avec un "serpent de mer"

La mission d'information de l'Assemblée nationale sur le statut de l'élu vient de remettre 29 propositions. Certaines vont au-delà de celles faites par les sénateurs et pourraient trouver leur place dans la proposition de loi Gourault-Sueur qui arrive en discussion en juillet au Palais Bourbon. Des avancées concernant la retraite et la reprise d'une activité en fin de mandat sont préconisées. De même qu'une revalorisation des indemnités de certains élus.

Réformer les règles régissant les droits et devoirs des élus locaux, plutôt que les modifier en profondeur. Telle est l'idée du rapport que la mission d'information de l'Assemblée nationale sur le statut de l'élu local que ses présidents, Philippe Doucet (PS) et Philippe Gosselin (UMP), ont présenté ce mercredi 19 juin au terme de très nombreuses auditions menées durant ces derniers mois. "Aucune des associations d'élus locaux que nous avons rencontrées ne souhaite revenir sur le principe de la gratuité des fonctions, qui est un héritage de la Révolution française", a expliqué Philippe Doucet. Lequel a aussi d'emblée évacué une proposition radicale, régulièrement entendue, celle qui consisterait à "supprimer cent mille élus locaux". 72% des détenteurs de mandats locaux ne touchent aucune indemnité et ceux-ci constituent un "précieux amortisseur social", particulièrement en temps de crise, a-t-il rappelé. Dans la foulée, Philippe Gosselin a rendu hommage aux élus locaux, qui peuvent être sollicités "jour et nuit" par leurs concitoyens.
C'est pour accorder à ces personnes les moyens nécessaires à leurs fonctions, pour leur permettre aussi de mieux concilier leur vie professionnelle et leur mandat que les députés appellent de nouvelles avancées. L'enjeu est par ailleurs de favoriser l'accès de tous aux fonctions électives, alors qu'aujourd'hui les retraités et les agents publics sont surreprésentés."On espère bien en finir avec ce serpent de mer que constitue le statut de l'élu local depuis trente ans", a résumé Philippe Doucet.
De nombreuses propositions de la mission sont identiques à celles de la proposition de loi Gourault-Sueur visant à favoriser l'exercice du mandat local, que le Sénat a adopté en première lecture fin janvier. Mais elles sont complétées par d'autres mesures, qui font dire à la mission qu'elle se veut "plus ambitieuse" que le Sénat.

Charte des droits et devoirs

Alors que l'Assemblée débat en ce moment du projet de loi sur la transparence de la vie publique, Philippe Doucet a débuté la présentation à la presse du rapport par les mesures concernant, précisément, la transparence et la déontologie. Dans ce domaine, la mission souhaite l'instauration d'une charte des droits et devoirs, qui serait lue devant le conseil nouvellement élu. La haute autorité de la transparence et de la vie publique mise en place par le projet de loi actuellement débattu serait chargée de répondre aux questions que se posent les élus locaux - lorsque, par exemple, ils souhaitent prévenir des situations de conflits d'intérêts.
La mission veut aussi que la transparence sur les indemnités des élus locaux progresse. Aujourd'hui, le Code général des collectivités territoriales mentionne une indemnité maximale brute correspondant à un pourcentage d'un indice de la grille de la fonction publique. Ce que seuls les spécialistes peuvent finalement comprendre. Au lieu de cela, il faudrait "rendre public un montant net des indemnités perçues par les élus", soulignent les députés. Lesquels voudraient, par ailleurs, rendre obligatoire pour les élus locaux l'établissement d'une déclaration annuelle, auprès de l'administration fiscale, des indemnités perçues. Les députés entendent ainsi donner à l'administration les moyens de contrôler la mise en œuvre de l'écrêtement des indemnités des élus en cas de cumul de mandats, une situation qui concerne quelque 2.000 élus.

Indemnités : plus 10% pour certains élus

S'agissant toujours des indemnités des élus, les députés n'hésitent pas à proposer une hausse de 10% pour les indemnités des élus des communes de 3.500 à 50.000 habitants, soit ceux des collectivités moyennes, qui représentent des "pôles d'équilibre" pour le territoire, souligne la mission. La facture ne s'élèverait "qu'à 3 millions d'euros par an", a indiqué Philippe Doucet. Pour les élus des petites communes, les députés proposent que les indemnités soient automatiquement fixées au taux maximum.
Enfin, en ce qui concerne les conseils départementaux et régionaux, les députés préconisent une réduction de l'écart des indemnités entre les élus des territoires ruraux et urbains, écart qui est actuellement de un à deux. Au cours de son audition par la mission, la ministre de la Réforme de l'Etat, de la Décentralisation et de la Fonction publique s'est clairement exprimée en faveur de cette mesure.
Autre avancée voulue par les députés : l'obligation pour les élus qui perçoivent des indemnités de fonctions de cotiser à un régime de retraite par rente, y compris ceux qui perçoivent de faibles indemnités et qui ne sont pas concernés par les dernières mesures de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013. Notamment du fait de son coût (entre 60 et 130 millions d'euros), le Sénat n'a pas introduit cette disposition dans la proposition de loi Gourault-Sueur. Ce que Marylise Lebranchu a regretté.
Pour permettre notamment à un plus grand nombre de salariés du privé d'exercer un mandat local, la mission préconise de faciliter la reprise de leur emploi, une fois qu'ils ont raccroché leur écharpe d'élu. Le bénéfice de l'allocation différentielle de fin de mandat serait élargi à un plus grand nombre d'élus, pour une durée deux fois plus longue (un an). Les maires auraient aussi la possibilité d'obtenir une validation des compétences acquises lors de l'exercice de leurs fonctions.

Des élus mieux formés

En matière de formation, les députés s'inscrivent globalement dans les pas des sénateurs, en souhaitant davantage de droits. "Les élus se forment très peu", a déploré Philippe Doucet. Ce qui incite la mission à aller plus loin que le Sénat. Et à préconiser notamment que le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) devienne compétent pour la formation des élus locaux. L'établissement présidé par François Deluga aurait donné son accord de principe.
Le calendrier parlementaire offre "une chance inouïe" pour voter des avancées en faveur des élus locaux, a souligné Philippe Gosselin. Transparence de la vie publique, restriction du cumul des mandats et exercice des mandats locaux : ces trois textes qui sont en discussion en ce moment ou qui le seront au cours des jours prochains à l'Assemblée pourraient en effet donner à la mission l'occasion de transformer rapidement l'essai.

 

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