Temu, Shein : un baptême du feu pour le nouveau ministre Serge Papin

À peine arrivé au ministère des PME et du Commerce, Serge Papin doit affronter la polémique qui enfle sur les stratégies des plateformes asiatiques Shein et Temu.

À quelques jours de la remise d’un rapport sur le commerce en centre-ville et dans les quartiers, le nouveau ministre des PME et du Commerce, Serge Papin, doit affronter deux polémiques : celle de l’installation de la plateforme Shein dans les locaux du célèbre BHV et le partenariat passé entre La Poste et l’autre géant du e-commerce chinois Temu pour la livraison de colis… Un partenariat avec lequel l’ancien patron de Système U a pris ses distances mercredi, faisant part de son "étonnement" et de sa "déception", lors des questions au gouvernement à l’Assemblée. "Environ 15% des magasins de centre-ville sont fermés. Ces plateformes (…) font du dumping, ne respectent pas nos normes et nont que faire de nos ambitions écologiques", a-t-il déclaré, laissant le soin à Roland Lescure, le ministre de l’Économie qui a la tutelle de La Poste, le soin d’examiner le contenu de cet accord. "Il faut nous défendre parce que sinon nous en paierons le prix dans quelque temps", a-t-il dit, appelant à "activer immédiatement la taxe sur les petits colis de 2 euros par produit" (qui figure dans le projet de budget pour 2026) et à ce que cette taxe soit appliquée au niveau européen, la "bonne échelle", selon lui.

Le même jour au Sénat, la nouvelle présidente de La Poste, Marie-Ange Debon, a assumé l’accord passé avec Temu. "Sans les colis, nos tournées seraient moins pertinentes ou les facteurs auraient moins d'activités, c'est plutôt un atout pour les facteurs d'avoir cette activité", a-t-elle argué (lire notre article). Elle a aussi attiré l'attention sur d'autres plateformes comme l'américaine Amazon et la chinoise Alibaba qui "ont commencé à internaliser la distribution avec leurs propres moyens logistiques". Une "source d'inquiétude" pour La Poste. 

"Mastodontes de cette surconsommation ultra-éphémère"

La députée Anne-Cécile Violland (Haute-Savoie, Horizons) s’est livrée, mercredi, à un réquisitoire contre "les modèles des mastodontes de cette surconsommation ultra-éphémère" : "surproduction poussant à la surconsommation et à l’explosion des déchets, augmentation des pollutions et de l’empreinte carbone, absence de transparence des conditions de production, augmentation de l’impact environnemental, sanitaire et social, concurrence déloyale, destruction des emplois et du savoir-faire de l’industrie française et de notre artisanat".

Le nouveau ministre a aussi affirmé, jeudi, faire pression contre l'arrivée de Shein au sein du BHV en novembre. "Ce partenariat est un mauvais signal qu'il faut éviter", a précisé son cabinet, ajoutant que le ministre souhaitait "trouver en ce sens des solutions, alors que l'État (...) a manifesté très clairement son désaccord" à travers la Caisse des Dépôts. Après une série de défections de marques (Le Slip français, Maison Lejaby, etc.) et le retrait de la Banque des Territoires du projet de rachat des murs (lire notre article), le grand magasin parisien doit faire face à une nouvelle déconvenue : en signe de protestation contre le partenariat avec la plateforme chinoise, Disneyland Paris a renoncé au magasin éphémère et aux vitrines qu’elle comptait y installer pour les fêtes de Noël.

Taxer les entrepôts

Dans cette ambiance tendue pour le e-commerce, l’extension la taxe sur les surfaces commerciales (Tascom) aux entrepôts logistiques destinés au e-commerce, déjà évoquée l'an dernier, a refait surface. Dénonçant une "distorsion manifeste de concurrence" face au commerce physique, plusieurs amendements ont été adoptés en ce sens par la commission des finances de l'Assemblée dans le cadre du projet de loi de finances pour 2026. Si la première la partie du projet de loi (consacrée aux recettes) a finalement été rejetée dans la nuit de mercredi à jeudi, la mesure pourrait revenir en séance, comme le craignent les acteurs de la logistique pour qui elle manquerait sa cible et pourrait même profiter aux plateformes chinoises. "Alors qu’elles portent préjudice à toute l’infrastructure logistique de notre pays au détriment du tissu industriel et commercial français, [ces mesures] exonèrent de facto les acteurs économiques étrangers qui livrent sans créer de l’emploi ni investir en France", fait valoir France Logistique.

L'extension de la Tascom aux entrepôts est un serpent de mer. En 2020 déjà, l’Association des maires de France (AMF) poussait en ce sens. C’est Amazon et Alibaba qui étaient alors visées. Il était aussi question de taxer les colis (lire notre article). Mais l’Assemblée s’y était opposée.

 

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