Transition énergétique : des angles morts entre citoyens et élus
Publiée ce 26 novembre, l’édition 2025 de l’Observatoire de la transition énergétique réalisé par Ipsos pour Idex et Villes de France, fait apparaître un décalage très important entre les attentes des citoyens et la perception des élus. Si 87% des Français font de la transition énergétique un facteur "important ou prioritaire" dans le choix de leur vote aux municipales de 2026, seuls 64% des maires estiment que ce sujet sera majeur pour leurs électeurs. Alors que 92% des collectivités se déclarent actives sur le sujet, 41% des citoyens seulement partagent ce sentiment.
© Couverture des résultats de l'enquête Ipsos pour Idex et Villes de France Édition 2025
Au vu des résultats 2025 de l’Observatoire de la transition énergétique réalisé par Ipsos pour Idex et Villes de France, publiés ce 26 novembre, un fossé sépare les attentes des citoyens en matière de transition énergétique de la perception qu’en ont les élus. Pour cette deuxième édition, les concepteurs de l’Observatoire ont confronté pour la première fois les deux visions*, dans la perspective des prochaines municipales.
Pas de "backlash" écologique mais une forte contrainte économique
L’enquête bat d’abord en brèche l’idée de "backlash" ou rejet écologique. 91% des élus déclarent ainsi privilégier une énergie propre et locale, même si elle coûte plus cher, et 65% des citoyens partagent en théorie cette conviction, même si elle se heurte à la réalité du portefeuille, 49% d’entre eux refusant tout surcoût pour une énergie locale. 60% des citoyens souhaitent en outre être davantage impliqués dans les décisions locales de transition énergétique et 45% se disent intéressés par la possibilité de réaliser des placements financiers dans des projets d’énergies renouvelables locaux. De leur côté, 44% des maires envisagent le financement participatif pour ces projets mais seuls 28% sont favorables à une gouvernance partagée (SEM, coopératives).
Des citoyens dans l'attente d'actions concrètes...qu'ils ne perçoivent pas toujours
La transition énergétique apparaît comme un facteur déterminant de leur choix de vote aux municipales de 2026 pour 87% des Français – 32% en font même une priorité absolue. Un écart de 23 points sépare ainsi leurs attentes de la perception qu’en ont leurs élus qui ne sont que 64% à les anticiper. Les citoyens plébiscitent en particulier des actions concrètes telles que la valorisation énergétique des déchets (85%) et la création de réseaux de chaleur renouvelable (85% également).
Autre fossé entre élus et administrés : 92% des collectivités se déclarent actives ou très actives en matière de transition énergétique alors que seuls 41% des citoyens partagent ce sentiment et que 59% pensent que leur commune n’est pas engagée ou n’ont aucune opinion sur le sujet. "Ce fossé de perception de 51 points est largement dû à l'invisibilité des projets structurants (réseaux de chaleur, valorisation des déchets) dont l'action massive n'est pas convertie en capital politique", analysent Idex et Villes de France.
De fait, "à l’exception de la rénovation énergétique des bâtiments publics, dont 42% des Français ont connaissance, la quasi-totalité des autres chantiers demeure méconnue", observe Brice Teinturier. "Près de 4 Français sur 5 déclarent que rien n’a été entrepris ou ignorent si quelque chose a été fait dans leur commune concernant des initiatives aussi structurantes que l’installation de panneaux solaires sur la patrimoine public (67% de 'non' ou 'ne sait pas', la création d’un réseau de chaleur (77%) ou la valorisation énergétique des déchets (79%)", commente le directeur général délégué d’Ipsos qui note également que cette perception varie selon la taille de l’agglomération. Elle est la plus faible dans les communes rurales (31%) et augmente progressivement pour atteindre 47% dans les villes de 100.000 habitants et plus et 48% dans l’agglomération parisienne.
Le coût de l'énergie en tête des préoccupations
L’Observatoire met aussi en exergue la subordination de l’écologie à l’économie, avec un coût de l'énergie qui s’affirme comme préoccupation numéro un pour 72% des citoyens et 83% des élus. Le lien entre contrainte budgétaire et désengagement apparaît nettement : confrontés à la réduction des financements nationaux (comme le fonds vert), 69% des maires placent le besoin "d'aides financières plus importantes" en tête de leurs priorités, soulignant un point de rupture dans l'accélération de la transition, tandis que 57% des citoyens se disent bloqués par le coût trop élevé des travaux de rénovation. Face à la contrainte budgétaire, 77% des maires se disent "prêts à envisager davantage de partenariats entre public et privé" pour financer leurs projets.
Pour concilier impératif écologique et contrainte économique des ménages, les citoyens plébiscitent des solutions qui garantissent la stabilité financière. 68% des Français se disent ainsi intéressés par un raccordement à un réseau de chaleur renouvelable local, en se disant principalement motivés par des économies sur la facture (60%).
*Enquête citoyens réalisée par Ipsos auprès de 2.000 Français représentatifs de la population, interrogés du 16 au 18 juin 2025 et enquête élus et cadres territoriaux réalisée auprès de 502 responsables de collectivités à l’automne 2025.