Une mission parlementaire appelle l’État à s’investir davantage pour assurer la pleine réussite des JOP 2024

La mission d’information de la commission des affaires culturelles et de l’éducation de l’Assemblée nationale a présenté mercredi 15 février un rapport d’étape sur l’évaluation des retombées de la préparation des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 sur le tissu économique et associatif local. Un rapport qui alerte sur le manque de coordination des acteurs et confirme, entre autres choses, la trop faible prise en compte des questions de sécurité et de transport, à un peu moins d’un an et demi du début des épreuves.

Les deux rapporteurs Stéphane Mazars et Stéphane Peu, respectivement députés de l’Aveyron et de la Seine-Saint-Denis, pointent deux sujets majeurs d’inquiétude à leurs yeux : la sécurité et les transports, dans leur rapport d’étape sur l’évaluation des retombées de la préparation des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 sur le tissu économique et associatif local. Sur le premier sujet, "le défi est énorme à relever", insiste Stéphane Mazars, qui rappelle qu’il faudra 20.000 agents pour assurer la sécurité de l’événement et que, "à ce jour, nous ne les avons pas". La question de leur disponibilité n’étant toujours pas réglée, notamment au regard des difficultés de recrutement d’un secteur qui souffre aujourd’hui d’un profond déficit d’attractivité. Sur une première vague de plus de 140 lots, seule une centaine a été attribuée, soit environ 10.000 agents. Les parlementaires invitent donc d’ores et déjà à "prévoir un plan B" qui consisterait à programmer l’intervention de l’État à travers la mise à disposition des forces de l’ordre qui viendraient se substituer, le cas échéant, au secteur privé.

Un appel au report de la mise en concurrence des bus pour "mettre à l’abri les JOP"

Quant à la question des transports, "18 mois avant les JOP, ils n’ont jamais aussi mal fonctionné en Île-de-France", constate Stéphane Peu, déplorant "une multiplicité d’acteurs dont les actions ne sont pas coordonnées". Dans ce contexte, les deux députés se disent favorables, à l’instar du ministre des Transports, Clément Beaune - auditionné par la mission parlementaire - et du président de la RATP, Jean Castex, à un report de la mise en concurrence des bus prévue au 1er janvier 2025, "pour mettre à l’abri les JOP", argue Stéphane Peu.
Plus globalement, le député estime "qu’il n’y aura pas de pleine réussite des JOP sans un retour en force de l’État". Un État invité à se mettre en situation de coordonner l’organisation des Jeux, "ce qui serait loin d’être le cas", déplore le député de Seine-Saint-Denis. Les rapporteurs alertent en particulier sur les difficultés de la mise en œuvre du plan "zéro délinquance" autour des sites olympiques qui manquerait, là aussi, de coordination. Un plan qui consiste à "mener une opération par jour et par département pour lutter contre la délinquance, l’occupation illégale de l’espace public, les ventes à la sauvette, les trafics de stupéfiants", rappelle le rapport de la mission parlementaire.

Une nécessité de renforcer l’ensemble de la chaîne pénale

Si la préfecture de police a pu bénéficier de renforts à hauteur d’environ 1.000 emplois supplémentaires, "pour que ce plan soit efficace, l’ensemble de la chaîne pénale doit être prise en compte", estiment les députés. Lors de leur audition par la commission, Peimane Ghaleh-Marzban et Éric Mathais, respectivement président et procureur de la République du tribunal judicaire de Bobigny (Seine-Saint-Denis), ont fait part de l’augmentation sensible des gardes à vue pour toutes les divisions du parquet du TGI sans que des moyens supplémentaires n’aient été affectés. Aussi, pour répondre aux objectifs de l’action "zéro délinquance", les députés préconisent la création en septembre 2023 et au plus tard en janvier 2024, d’une chambre supplémentaire dédiée au traitement judiciaire préparatoire des JOP, ce qui impliquerait la nomination de trois magistrats du siège, deux magistrats du parquet et de quatre greffiers supplémentaires. 
Sur la question de l’impact économique des JOP à travers le prisme du tourisme, la mission parlementaire rappelle que les retombées de l’événement sont à ce jour estimées entre 1,43 milliard d’euros et 3,52 milliards par le Centre de droit et d’économie du sport. Un retour sur investissement soumis à de nombreux facteurs comme la situation sanitaire, le contexte géopolitique et économique, ou encore l'accessibilité des transports, qui font peser un risque sur la réalisation effective de ces objectifs. Stéphane Mazars n’écarte pas la possibilité d’un "effet d’éviction" qui se traduirait par une fuite des touristes, voire des Parisiens eux-mêmes, pendant la durée de l’événement. Au final, "les retombées encore difficiles à évaluer semblent d’ores et déjà insuffisantes".

La Solideo au rendez-vous de l’insertion

Seul satisfecit : la Solideo, l'établissement public chargé de la livraison des ouvrages olympiques, est au rendez-vous sur la question de l’insertion et devrait atteindre le quota d’heures réservées dans les marchés de travaux par des personnes exclues du monde du travail (1,5 million d’heures réalisées au 1er janvier 2023 sur un objectif de 2,47 millions). Pour autant, les dispositifs d’encadrement et de suivi des 2.200 bénéficiaires ne seraient pas à la hauteur et surtout, "très peu d’emplois d’insertion sont transformés en emplois pérennes, alors que c’était l’objectif", souligne Stéphane Peu, qui préconise de confier à Pôle emploi une mission pour assurer ce suivi.
L’accès direct des PME-TPE franciliennes indépendantes aux marchés olympiques ne serait pas davantage à la hauteur des attentes, les majors du BTP et leurs filiales restant les principaux bénéficiaires de ces marchés. Même si, reconnaissent les députés, pas moins de 536 millions d’euros de marchés contractualisés l’ont été au profit de 1.429 TPE/PME et 77 structures de l’ESS, soit légèrement au-dessus de l’objectif initial. La moitié de ces marchés a été attribuée à des entreprises franciliennes dont le quart (138 millions) à des entreprises de Seine-Saint-Denis.