Valérie Debord (région Grand Est) : "L’IA au service de la fluidité du marché du travail"

Première vice-présidente de la région Grand Est et présidente déléguée de la commission formation-emploi de Régions de France, Valérie Debord revient sur la signature à l’occasion du congrès des régions de France d’une convention entre France Travail et son territoire, visant à généraliser l’utilisation de l’intelligence artificielle au service de la formation professionnelle.

Localtis - Quel est l’objet de cette convention signée entre la région Grand Est et France Travail et sur quel constat s’appuie-t-elle ?

Valérie Debord - Le constat de départ, c’est le fait que nous rencontrons de grandes difficultés à remplir nos stages sur un certain nombre de métiers en tension, alors même que sur notre territoire s’expriment beaucoup de besoins dans les secteurs de l’industrie, du bâtiment mais aussi des services à la personne. Actuellement, on dépense beaucoup d’énergie à présenter nos actions, recontacter les candidats, leur proposer des solutions de garde pour leurs enfants, évaluer la possibilité d’organiser du covoiturage pour se rendre sur le lieu de formation. Autant de difficultés "logistiques" qui sont des irritants et qui demandent des temps d’échange extrêmement longs pour aboutir à des stages qui ne sont pas remplis, alors même que les entreprises sont en attentes de personnes formées.

Vous avez, dites-vous, choisi d’être un territoire volontaire pour accueillir cette expérimentation d’un outil développé par France Travail...

France Travail a présenté en début d’année cet outil s’appuyant sur l’IA et permettant de faciliter l’identification des candidats, de renforcer l’attractivité des métiers en tension ainsi que de simplifier la vérification des prérequis. À cette occasion, j’ai dit à Thibaut Guilluy (directeur général de France Travail, ndlr) : "Nous voulons être une région expérimentatrice !" Il s’agit donc d’un outil France Travail avec l’aide duquel nous mettons en œuvre notre stratégie de sélection de candidats pour des stages de formation. C’est l’IA au service de la fluidité du marché du travail.

Concrètement, comment cela fonctionne-t-il ?

On fixe une date de stage pour un métier donné ; un conseiller fait une requête auprès des personnes qui ont exprimé le souhait de faire un stage ; et l’outil en question envoie directement un SMS au candidat pour s’assurer de sa disponibilité. C’est là que l’IA prend le relais et que la discussion s’enclenche : disponibilité physique, moyens de locomotion, modes de garde... l’intelligence artificielle est alors en mesure de faire des propositions et peut ainsi adresser au conseiller une liste de candidats motivés avec lesquels il va pouvoir se concentrer sur l’essentiel, à savoir la sortie de formation. Bien entendu, on s’assure au préalable que les personnes contactées sont d’accord pour engager cette conversation avec un outil qui est capable de s’adapter aux modes d’expression des candidats en fonction de leurs réponses.

Depuis quand cette solution d’IA générative est-elle en place dans la région Grand Est ?

Nous avons démarré l’expérimentation il y a une quinzaine de jours et nous prévoyons de dresser un premier bilan avant l’été 2026 pour confirmer que le niveau de remplissage des stages est en augmentation, ou pas.

Quels sont dans le Grand Est les secteurs dans lesquels les besoins s’expriment en priorité ?

D’une manière générale, nous commençons à ressentir les effets de la baisse de la démographie dans de nombreux métiers du soin : les aides-soignants, les auxiliaires de vie ou encore les aides à domicile. A fortiori dans des secteurs très ruraux où l’enjeu est pour nous de trouver des lieux de formation accessibles aux candidats et pour eux, de trouver des moyens de locomotion adéquates. On s‘adresse souvent à des mères seules qui ne peuvent pas se déplacer sans solution de garde d’enfant, et ce sont des aides que la région est de mesure de leur apporter. Je suis donc intimement persuadée que cet outil va nous aider à faire en sorte que nos stages qui sont actuellement remplis à 50%, le soient demain à 70 ou 75%.

Au-delà de la région Grand Est, cet outil d’IA a-t-il vocation à être déployer plus largement ?

Nous avons proposé à Thibaut Guilluy de venir très prochainement en faire une présentation devant la commission emploi-formation de Régions de France. Je reste persuadée que c’est quelque chose qui doit avoir une visée nationale.

 

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