Accès à l’eau potable dans les outre-mer : des ONG dénoncent une "discrimination environnementale"
Associations et collectifs ultramarins dénoncent une "grave discrimination environnementale" en matière d'accès à l'eau potable dans les territoires d'outre-mer, dans un rapport publié ce 23 juin et transmis aux Nations unies. "Près de trois millions de personnes en France subissent de graves problématiques pour accéder à un service public vital, l'eau potable", écrivent ses auteurs, parmi lesquels l'Assaupamar (Martinique), Guyane Nature Environnement, Mayotte Nature Environnement et l'ONG environnementale Notre affaire à tous, qui coordonne le rapport.
Coupures régulières, pollution de l'eau, tarification "extrêmement élevée" par endroits malgré un service défaillant : le rapport dresse un "état des lieux accablant" des réseaux d'eau potable dans les départements et régions ultramarins, où les conséquences sanitaires et sociales sont particulièrement lourdes, notamment pour les enfants qui perdent 20% de jours d’école à cause du manque d’eau, selon l’Unicef.
"Les territoires d'outre-mer ne sont pas traités comme le reste du territoire français. Nulle part ailleurs en France on accepterait une telle situation, dénonce Jérémie Suissa, le délégué général de Notre affaire à tous. On parle ici d’accéder à de l’eau potable, la première condition de toute vie humaine, en 2025."
Dans l’ouest de la Guyane, l'accès à l'eau reste précaire, notamment dans les communes isolées, soulignent les auteurs du rapport. À Mayotte, lors de la sécheresse de 2023, "l'eau au robinet n'était disponible qu'environ 8 heures tous les trois jours" et un mois après le cyclone Chido, toute l’île restait affectée par une pénurie d’eau potable. En Guadeloupe, les coupures d’eau, quotidiennes, peuvent durer plusieurs semaines dans certains secteurs. Bien que l’eau soit régulièrement impropre à la consommation à cause de la pollution - le réseau est dans un tel état qu'un rapport publié en 2018 le place dans la catégorie D, la plus mauvaise -, son prix est l’un des plus élevés de France. "Depuis 2021, l'ONU a interpellé la France à de nombreuses reprises sur la crise de l'eau en Guadeloupe et la pollution au chlordécone aux Antilles", rappelle Sabrina Cajoly, fondatrice de Kimbé Rèd FWI.
Les auteurs du rapport demandent une reconnaissance officielle de cette situation comme relevant d’une "discrimination environnementale territoriale", une "augmentation forte des crédits alloués par l’État, à la hauteur minimale des besoins précisément évalués pour assurer à ces territoires un accès normal à l’eau potable", "une responsabilisation des acteurs impliqués et une intégration réelle des populations à la construction des politiques publiques".
Les ONG appellent à l'instauration d'un "droit opposable à l'eau potable pour toutes et tous" dans les territoires ultramarins et à l'augmentation des crédits pour l'eau en outre-mer, dont les besoins sont estimés dans le rapport à 2,36 milliards d'euros uniquement pour rattraper l'Hexagone.