Comment accompagner les littoraux face au changement climatique ?

En Europe, l’année 2024 a été la plus chaude jamais enregistrée*, signe que le réchauffement climatique est bel et bien installé. Les effets sont visibles partout, aussi bien dans les milieux naturels qu’en ville. Et les littoraux, particulièrement vulnérables, ne sont pas en reste avec l’érosion côtière, les risques de submersion marine ou encore les enjeux autour de la préservation des ressources naturelles. Aujourd’hui les territoires doivent anticiper les conséquences inhérentes au changement climatique mais doivent aussi faire preuve d’adaptation face à ces nouvelles conditions qui s’imposent. 

La Banque des Territoires accompagne les territoires dans leurs stratégies d’adaptation mais aussi dans la réalisation de leurs projets. Pour cela, nous mobilisons toute notre offre en vous apportant expertise, ingénierie et financements. Dans ce dossier, nous vous proposons de faire un zoom sur les territoires littoraux. 
*https://climate.copernicus.eu/esotc/2024 

Infographie : les chiffres clés

chiffres clés littoral

© Banque des Territoires

Sources : Centre de ressources pour l'adaptation au changement climatique / Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires / Météo France

La parole est à Eleonore Geneau – responsable Littoral & Développement durable, Ville de Lacanau

Nous sommes allés à la rencontre d’Eleonore Geneau, urbaniste diplômée d’une double spécialité paysage et risques, qui travaille aux côtés de Laurent Peyrondet, maire de Lacanau, sur les projets liés à l’aménagement du littoral.

  1. Pouvez-vous nous dire ce qui a amené la ville dans cette réflexion autour de la renaturation de son front de mer ? Et les enjeux qui ont été identifiés ?

La commune de Lacanau a pris le sujet de l’érosion côtière à bras le corps en 2009, aux côtés du nouvel organe régional dédié au littoral, le GIP Littoral. Après l’organisation d’un Forum du Littoral à destination des habitants permettant de partager les concepts fondamentaux concernant l’érosion marine, la commune s’est engagée comme site pilote pour l’étude de la déclinaison locale de la Stratégie Régionale de la Bande Côtière puis pour la faisabilité de la relocalisation des biens et des activités. Pendant six ans, des données ont été acquises et des travaux inédits ont été menés sur les modes de gestion du littoral adaptés aux enjeux exposés à l’érosion côtière (1 200 logements et 110 commerces sur 26 ha, représentant une valeur de près de 300 M €).

C’est dans ce contexte que la commune a adopté la première Stratégie Locale de Gestion de la Bande Côtière. Il s’agit d’un plan d’action global vis-à-vis de l’érosion imbriquant le court, le moyen et le long terme et qui se fonde sur 3 volets principaux.

  • un horizon 2050 « pivot ». L’objectif de la commune est d’assurer une pérennité de l’ouvrage de protection vis-à-vis de l’érosion hérité des années 1970 jusqu’en 2050. Cet ouvrage « horizon 2050 » est nécessaire pour préserver la bande littorale le temps soit de l’aboutissement d’un scénario de relocalisation, soit de l’édification d’un ouvrage ambitieux protégeant Lacanau Océan en 2100. L’ouvrage « horizon 2050 » vise ainsi à se donner du temps pour éviter tout sinistre et pour préparer l’avenir. 

  • une requalification ambitieuse des espaces publics littoraux, viables jusqu’en 2050. Le ré-aménagement du front de mer vise la transformation de la station balnéaire en ville océane, vivante au fil des 4 saisons et résiliente, assumant d’être un balcon sur la mer dans une perspective de disparition de la plage centrale. Deux lignes directrices guident ce projet qui concerne six hectares d’espaces publics : le paysage et les mobilités. 

  • le projet de « ville océane 2050 » est un processus bâti selon des trajectoires qui lie les deux démarches, risque et aménagement, et établit les passerelles entre elles. 

 

  1. Quel est l’objectif du projet « ville Océane 2050 » ? Les grandes étapes associées ?

Le ré-aménagement du front de mer, symbole de la nouvelle image de Lacanau et porteuse de nouveaux usages, fait l’objet d’une maîtrise d’œuvre confiée à un groupement conduit par une agence de paysage et le chantier a véritablement démarré, sur les mythiques allées Ortal, en janvier 2023. Aujourd’hui, mi-2025, deux des trois phases du chantier sont réalisées et l’avant-projet du pôle d’échanges multi-modal qui doit compenser la suppression des parkings littoraux et accompagner le changement des pratiques est validé. La dernière phase à réaliser concerne la scène principale du front de mer qui nécessite une articulation ciselée, sur les plans techniques et paysagers, ainsi que calendaires et financiers, avec l’ouvrage « horizon 2050 »

 

  1. Quel regard portez-vous sur l’accompagnement de la Banque des Territoires ? Comment se concrétise-t-il ?

La Banque des Territoires fait preuve d’une approche bienveillante, à l’écoute aussi bien des enjeux du territoire que des projets des élus. Cet accompagnement s’exprime à travers le partenariat que noue la Banque des Territoires avec le GIP Littoral, qui a été renforcé récemment pour accentuer l’appui apporté aux collectivités littorales face aux changements globaux, au sein d’un accord scellé à Lacanau en mars 2022. La Ville de Lacanau bénéficie ainsi d’un soutien financier précieux, par l’attribution de subventions qui accélèrent les phases opérationnelles de sa transformation. Enfin, l’accompagnement de la communauté de communes Médoc Atlantique par la Banque des Territoires agit aussi directement sur Lacanau, par exemple dans le cadre de la compétence Gemapi et des problématiques d’érosion côtière.

 

  1. Quelle est votre définition d’une ville côtière durable ?

Ce qui a été accompli par Lacanau depuis 15 ans est inspirant et donne un cap : une ville côtière durable, c’est un territoire qui considère les enjeux d’adaptation, définit une feuille de route « développement durable » et témoigne d’une approche systémique. Cette démarche s’inscrit dans une vision qui s’appuie sur plusieurs facteurs : les sciences, l’engagement d’études pour connaître, agir et prévoir, l’implication de l’art, la concertation citoyenne et la sensibilisation des jeunes, l’ouverture aux autres et la démarche partenariale. Et de manière générale, la confiance en l’homme en la nature et en l’avenir. S’adapter pour continuer d’être attractif, être précurseur oser et expérimenter, s’entourer de compétences et animer une gouvernance, et enfin avoir un projet global : tous ces éléments participent à la définition d’un territoire durable.

 

  1. Selon vous, quelles sont les perspectives pour les années à venir pour Lacanau et les villes côtières en général ?

Mon point de vue plus personnel sur l’avenir des villes côtières peut se résumer en 4 points : 

  1. continuer à travailler sur les évolutions de l’économie touristique, vers la diversification économique et vers l’éco-responsabilité comme la décarbonation ;
  2. envisager la relocalisation pour les biens et activités concernés, sans en faire un dogme ni sous-estimer les nécessités de structuration, de trouver des solutions de portage mais aussi prendre en compte les besoins de financement ;
  3. ne pas craindre le spectre de la maladaptation car, dans une démarche de trajectoires, les actions peuvent cohabiter dans l’espace et dans le temps à des stades transitoires ou non et les redirections sont possibles et même prévues ;
  4. être une vitrine du développement durable dont l’adaptation au changement climatique et la préservation de l’océan.

Résilience côtière et urbanisme : comment les littoraux s’adaptent ?

Stratégies d’aménagement, renaturation ou encore modernisation et préservation des infrastructures, les villes côtières doivent se réinventer pour mieux s’adapter. Comment la Banque des Territoires permet la concrétisation de ces projets d’envergure ? Retour sur deux exemples de projets réussis à Lacanau et à Saint-Jean-Cap-Ferrat.

 

Renaturation du front de mer à Lacanau (Nouvelle Aquitaine)

Lacanau, comme de nombreuses villes côtières, fait face à des enjeux environnementaux majeurs, notamment l'érosion côtière. Chaque année, son trait de côte recule d’un à trois mètres. Dans ce cadre, la commune s’est inscrite dans une démarche d’aménagement durable de sa station, pilotée par le GIP Littoral. A l’issue d’une étude diagnostic, la ville a défini deux actions prioritaires : les mobilités douces et la requalification du front de mer.

Avec un coût total estimé à 12 M€, l’ambition du projet est de dessiner la ville océane de demain, à horizon 2050, en renforçant sa résilience pour mieux protéger les infrastructures et les habitants. Concrètement, il s’agira de construire un nouvel ouvrage de protection vis-à-vis de l’érosion. Au programme : un réaménagement du front de mer, pensé dans sa globalité pour favoriser les mobilités douces tout en faisant la part belle aux paysages dunaires et océaniques. Végétalisation, désimperméabilisation, sobriété ou encore modularité, cette transformation se fonde sur une réflexion globale d’adaptation aux effets du changement climatique. La Banque des Territoires a apporté un soutien financier à travers deux prêts : un prêt relance verte de 3 M€ pour le réaménagement du front de mer et un Mobi-Prêt de 2,3 M€ pour la création d'une liaison douce en front de mer.

Pour en savoir plus, retrouvez la fiche réalisation

Préservation du patrimoine naturel : Saint-Jean-Cap-Ferrat acquiert l’ancienne carrière (PACA)

Face à l’érosion côtière et à la pression foncière croissante, certaines communes font le choix de réinventer les usages du littoral. À Saint-Jean-Cap-Ferrat, l’acquisition par la commune d’une ancienne carrière désaffectée marque une étape clé vers un aménagement plus résilient du littoral.

Soutenu par la Banque des Territoires, via un prêt Gaïa Territorial d’un montant de 5,6 M€, ce projet de reconversion permet de préserver un site historique et fragile, tout en offrant un nouveau poumon vert aux habitants. L’objectif : transformer cet espace artificialisé en un espace naturel protégé, favorisant la biodiversité et une gestion raisonnée de l’eau.

En facilitant l’acquisition de ce foncier stratégique, la Banque des Territoires accompagne la transformation écologique des territoires littoraux. Ce projet illustre une démarche proactive d’adaptation : repenser l’aménagement urbain pour faire face durablement aux effets du changement climatique.

Pour en savoir plus, retrouvez la fiche réalisation 

Data intelligence et prévention

Avec l’intensification des épisodes climatiques extrêmes, les territoires doivent renforcer leur capacité à anticiper et à gérer les risques, notamment liés aux inondations pour les littoraux. Des outils d'aide à la gestion et décision existent pour répondre aux besoins des territoires et leur permettre ainsi d’intégrer le scénario obtenu dans le processus de gestion de crise et limiter les impacts.

VorteX-io : anticiper et prévenir les risques d’inondations et sécheresse grâce à la donnée

La Banque des Territoires accompagne le développement d’une solution innovante, Vortex-io, une technologie de surveillance en temps réel du niveau des cours d’eau.

Cet outil d’aide à la décision pour les territoires, permet, grâce à un réseau de microcapteurs, de collecter des données hydrologiques précises, utiles à la prévention des crues et à la gestion des ressources en eau. Cette solution vise à accompagner une gestion plus proactive des ressources en eau et vient compléter les dispositifs existants d’alerte proposant une approche prédictive à haute résolution. Soutenu par la Banque des Territoires, Vortex-io vise à mieux anticiper les événements extrêmes et sécuriser les populations, les infrastructures et les écosystèmes. À travers cet investissement, nous favorisons une gestion durable de l’eau qui constitue l’un des leviers stratégiques d’adaptation au changement climatique.

Pour en savoir plus, retrouvez la fiche réalisation 

Face aux bouleversements climatiques qui affectent les littoraux, les territoires côtiers démontrent leur capacité à agir et à innover. À travers des projets de renaturation, de protection du trait de côte ou encore de requalification urbaine, ils esquissent les contours de villes plus durables. Même s’il faut agir aujourd’hui, ces projets s’inscrivent dans une vision de long terme et ces initiatives locales montrent la voie d’une transformation concrète, fondée sur l’anticipation, la protection des populations et la valorisation des ressources naturelles. C’est dans cette dynamique que nous nous mobilisons, à la Banque des Territoires, en mettant à disposition l’ensemble de notre offre pour accompagner chaque territoire, à chaque étape, vers une transformation durable.

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