Brigades cynophiles dans les lycées, sûreté ferroviaire… les régions continuent d’investir le champ de la sécurité

Alors que le "bouclier sécurité" de la région Île-de-France est toujours suspendu à une décision de justice, d’autres régions continuent d’avancer... parfois sur un chemin de crête. Ainsi le conseil régional d’Auvergne-Rhône-Alpes vient-il d’autoriser, par délibération du 16 octobre, l’intervention de brigades cynophiles dans "les lycées particulièrement exposés au narcotrafic". Quant à la région Grand Est, elle entend assurer directement le pilotage de la sûreté ferroviaire.

Vifs échanges le 16 octobre dans l’hémicycle de la région Auvergne-Rhône-Alpes. À l’ordre du jour : "la lutte contre le fléau de la drogue". À cette occasion, la majorité a voté pour une expérimentation visant "à autoriser l’intervention de brigades cynophiles dans "les lycées particulièrement exposés au narcotrafic". À l’appui d’un rapport montrant "l’augmentation vertigineuse à la fois du trafic et de la consommation de drogue", le vice-président délégué à la sécurité, Renaud Pfeffer (LR), a évoqué un "tsunami blanc qui se diffuse partout, y compris aux abords et dans nos lycées". "Cette expérimentation se fera en lien étroit avec nos partenaires, au premier rang desquels les académies, la police, la gendarmerie et les parquets", a-t-il souligné. Elle se traduira par des "passages inopinés dans les espaces communs pour dissuader, détecter et sécuriser". L’élu régional a insisté sur la "dangerosité des substances nouvelles" telles que le PTC ("pète ton crâne"), un cannabis de synthèse responsable de plusieurs intoxications dans un lycée de Saint-Étienne le 19 septembre dernier. "Depuis 2020, on constate même un emballement dans les métropoles de Lyon, Clermont-Ferrand et Grenoble, qui se situent largement au-dessus de la moyenne nationale", argue encore la région, dans un communiqué. Cette décision s’inscrit dans une série de mesures prises depuis 2016 par la région dans le domaine de la sécurité : "Ce sont près 102 millions d’euros qui ont déjà été investis pour sécuriser nos lycées", s’est félicité Renaud Pfeffer, avec récemment le lancement d’une expérimentation de scanners corporels inspirés de ceux utilisés dans les aéroports et de caméras algorithmiques. 

Autorisation préfectorale

N’ayant pas compétence en matière de sécurité, la région doit donc demander à l’État l’autorisation de pouvoir mener l’expérimentation des chiens renifleurs, comme elle l’avait fait pour les scanners et les caméras algorithmiques. Ce que n’a pas manqué de relever l’opposition. "Au lieu d’agir dans les compétences de la région, vous poursuivez (…) dans la politique de l’incantation. La région n’a pas la compétence pour établir cette politique, elle doit demander une expérimentation au ministère de l’Intérieur", a fait valoir Émilie Marche (CIC), dénonçant la "politique du tout répressif" menée depuis les années 1970. "Vous manquez de flair en proposant des brigades de chiens dans les lycées", a-t-elle ironisé. Or la préfecture du département semble plutôt vouloir enterrer cette initiative régionale qui, selon la préfète du Rhône (et de la région) Fabienne Buccio, elle serait même "inutile". "Ces interventions relevant de la compétence départementale des autorités judiciaires et administratives ne pourront être envisagées qu’à cette échelle, dans le cadre d’échanges entre les préfets et les procureurs de la République, les chefs d’établissement et les forces de sécurité intérieure", développe la représentante de l'État, citée par le site Actu Lyon. 

Interpellé sur des affirmations du site Médiacités selon lesquelles l'expérimentation des scanners aurait été menée sans autorisation de la préfecture, le président de la région, Fabrice Pannekoucke, s'est montré catégorique : "C'était non seulement légal, mais aussi fait en concertation avec le rectorat", a-t-il répondu, expliquant avoir renouvelé l'expérience "à l'occasion de notre cérémonie de la bourse aux mérites". S'agissant des contrôles inopinés dans les lycées, le successeur de Laurent Wauquiez a expliqué avoir déjà mené ce genre d'opérations "à plusieurs reprises" à Moutiers (Savoie), la ville dont il a été maire jusqu'en 2024, "dans un cadre tout à fait légal, avec le procureur, avec le recteur, avec le chef d'établissement, avec même un vote du conseil d'administration".

Sûreté ferroviaire

De son côté, la région Grand Est entend assurer directement le pilotage des prestations de sûreté ferroviaire, dont la cynodétection et le relais d'appel d'urgence (3117), à compter du 1er janvier 2026. Elle en attend "une meilleure réactivité et un suivi précis des actions de sécurité sur l'ensemble du réseau régional", notamment via la réunion d'un comité technique mensuel. En parallèle, un comité de pilotage trimestriel assurera la coordination entre la région, la sûreté ferroviaire, SNCF Voyageurs, SNCF Réseau et SNCF Gares & connexions.

Autre objectif recherché avec la prise en main de ces prestations, la capacité d'assurer l'équité entre les différents opérateurs lorsque l'ensemble des lignes régionales seront ouvertes à la concurrence, au plus tard en 2034. Une ouverture déjà entamée dans cette région avec l'attribution de la concession de la ligne Nancy-Contrexéville, dont la réouverture est attendue en décembre 2027, à Transdev (lire notre article du 24 mai 2024).

En 2024, dans la perspective des Jeux olympiques, la région Île-de-France avait créé la première brigade régionale des transports, composée d'une centaine d'agents de sécurité privée. Le 10 octobre, la présidente de la région, Valérie Pécresse, a annoncé vouloir pérenniser cette brigade qui a déjà effectué 3.500 interventions dans 200 communes, notamment aux arrêts des lycées. Cette unité se veut complémentaire des services existants déjà, en particulier la Suge (SNCF) et le groupe de protection et de sécurité des réseaux de la RATP (GPSR).

Pour rappel, la loi Tabarot qui devait renforcer les moyens des agents de sûreté ferroviaire, a été largement amputée par le Conseil constitutionnel (lire notre article du 25 avril).

 

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