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Patrimoine - Développement urbain et patrimoine ne font pas toujours bon ménage

La conciliation entre les objectifs du développement urbain et les nécessités de la protection du patrimoine se révèle parfois difficile. Il y a deux ans, une vive polémique avait ainsi opposé le député-maire de Lens au préfet du Pas-de-Calais autour de la rénovation de la cité 12, implantée dans le quartier du bassin minier (voir notre article ci-contre du 27 août 2010). Une rénovation qui supposait - du moins dans le projet initial - de détruire certains bâtiments sans grand intérêt architectural, mais que l'Etat entendait classer au titre de témoignage historique dans la perspective de la candidature du bassin minier du Nord-Pas-de-Calais à l'inscription sur la liste du patrimoine mondial de l'Unesco (inscription finalement advenue cet été).
Une nouvelle affaire du même ordre concerne aujourd'hui la rue des Carmes à Orléans. En l'espèce, deux au moins des immeubles de cette rue du centre d'Orléans étaient menacés de destruction, dans le cadre du projet de zone d’aménagement concerté (ZAC) Carmes-Madeleine. Parmi les objectifs de la ZAC figure en effet l'élargissement de la rue des Carmes sur une centaine de mètres, avec un alignement de certains immeubles, ce qui "offrirait continuité et confort des itinéraires vélos et piétons, et permettrait la cohabitation en toute sécurité du tramway et des autres modes de transport". En février 2012, la commission d'enquête publique a rendu un avis favorable au projet, considérant notamment que les aménagements envisagés étaient conformes aux orientations de la ZPPAUP (zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager), mise en place en 2008 (dispositif remplacé aujourd'hui par les aires de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine, ou Avap). Sur la base de cet avis, le préfet du Loiret a pris le 13 avril 2012 - à quelques jours de l'élection présidentielle - un arrêté de déclaration d'utilité publique, puis un arrêté de cessibilité le 27 avril.
Mais, dans le même temps, la commission régionale du patrimoine et des sites a émis un avis favorable à la préservation de deux façades de la rue des Carmes. Cet avis, qui n'a pas valeur contraignante, a suscité l'étonnement de la mairie, qui s'est dite surprise à la fois de son caractère tardif et du fait que ces deux bâtiments n'ont fait l'objet d'aucune mention dans le document officiel du ZPPAUP. L'avis a cependant été entendu par le ministère de la Culture. Dans un communiqué du 20 juillet, Aurélie Filippetti annonce sa décision "de placer sous le régime de l'instance de classement au titre des monuments historiques, 18 immeubles formant le front sud de la rue des Carmes". Par ailleurs, le communiqué rappelle que deux de ces immeubles - ceux évoqués plus haut - "ont fait l'objet d'une proposition d'inscription au titre des monuments historiques, en totalité, de la commission régionale du patrimoine et des sites (CRPS), le 19 novembre 2011". Cette décision de mise en instance de classement a pour conséquence que les 18 immeubles concernés ne pourront faire l'objet d'aucun travaux - et encore moins d'une destruction - pendant une période d'un an, durant laquelle le ministère statuera définitivement.
Pour Serge Grouard, le maire d'Orléans, "c'est une décision unilatérale du ministère faite dans la précipitation, sans aucune concertation, ni avec les Orléanais, ni avec les élus". La ville indique par ailleurs qu'elle étudie la possibilité d'un recours devant la juridiction administrative.

 

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