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Sport - Elus en charge du sport : "Nous allons définir des chefs de file en fonction de l'envergure des projets"

L'Association nationale des élus en charge du sport (Andes) s'est beaucoup investie durant la dernière réforme des collectivités en faveur du cumul des subventions d'investissement dans le domaine du sport. Son président, Jacques Thouroude, conseiller régional en Midi-Pyrénées et adjoint au maire de Castres, revient sur ce point et sur les principaux dossiers du moment pour les politiques sportives des collectivités.

Localtis : Vous avez rencontré Chantal Jouanno deux fois en huit jours. Quel message lui avez-vous fait passer ?

Jacques Thouroude : Nous souhaitons que les collectivités aient toute leur place dans la nouvelle gouvernance du sport voulue par la ministre. Nous sommes les plus gros financeurs du sport en dehors des ménages. Ce serait la moindre des politesses de nous faire participer un peu plus qu'aujourd'hui. Nous souhaitons donc une voix délibérative et non plus seulement consultative dans les commissions territoriales du CNDS [Centre national pour le développement du sport, NDLR]. Dans le cadre de l'attribution des subventions d'équipement, nous souhaitons également que soit pris en compte l'aménagement du territoire.

Avec quelles enveloppes budgétaires travaillent aujourd'hui les responsables du sport en collectivité ?

Les budgets varient selon la réalisation ou non d'un équipement important pour la collectivité. Globalement, on est sur des taux de 9-10% du budget de fonctionnement d'une commune - une part inférieure à celle consacrée à la culture, bien qu'on touche une part très importante de la population. Sur une ville de 50.000 habitants, on arrive à avoir entre 13 et 15.000 licenciés, parfois avec des doubles licences, ce qui est considérable.

Comment la compétence Sport s'articule-t-elle aujourd'hui entre les différents niveaux de collectivités ?

Pour le département ou la région, le sport n'a jamais été une compétence première. Mais grâce à la clause de compétence générale, ils se sont progressivement immiscés dans le sport. Aujourd'hui, les départements apportent 800 millions d'euros et les régions 500 millions pour le fonctionnement. L'un des aspects de la dernière réforme des collectivités, c'est de pouvoir clarifier ces éléments. Mais la loi nous dit "mettez-vous d'accord entre vous pour vous répartir ces compétences", elle n'impose rien. Notre but est donc de mettre le délai avant l'application de la réforme à profit pour trouver les solutions les plus intelligentes. Nous allons travailler avec l'Assemblée des départements de France et l'Association des régions de France, avec lesquelles nous allons avoir des réunions, pour définir des chefs de file selon l'envergure de chaque projet. Il semblerait logique qu'un équipement d'envergure régionale soit financé en grande partie par la région, et non à hauteur de 15% comme actuellement.

L'intercommunalité se développe dans le sport comme ailleurs. Faut-il lui faire une place plus grande ?

C'est le sens de l'histoire. Dans le cadre d'équipements structurants du territoire, il doit y avoir un transfert à la fois de propriété et de compétences vers l'intercommunalité. Aujourd'hui, une piscine ou une patinoire, ce ne sont pas que des équipements de communes-centres, cela touche des populations plus grandes, vous ne pouvez pas mettre des piscines partout, les coûts de fonctionnement sont importants. On voit bien que progressivement, sans prendre la compétence Sport, les intercommunalités prennent en charge les bâtiments.

Avez-vous le sentiment que le sport est parfois instrumentalisé par les autres politiques ?

Il y a une implication de plus en plus importante du sport dans l'ensemble des politiques locales, les collectivités émettent de plus en plus de critères où l'on retrouve les notions de développement durable, d'insertion. On demande aux clubs de s'impliquer dans les priorités de la ville. C'est aussi une façon d'habiller les subventions. On met parfois beaucoup d'obligations dans ces "marchés" mais il ne faut pas que la mise en place de critères soit là pour diminuer les subventions, et surtout, il ne faut pas demander au sport de régler tous nos problèmes de société.

La place des collectivités dans la gestion des équipements sportifs à vocation professionnelle fait actuellement débat. Quelle est votre position ?

Dans le sport professionnel, on a souvent eu une privatisation des recettes et une socialisation des dépenses, mais on ne peut plus continuer à suivre avec les niveaux de budget actuels. La priorité est le sport pour tous, le sport fédéral, pas le sport professionnel. Je ne suis pas opposé à ce que les équipements deviennent les propriétés de partenaires privés. Les baux emphytéotiques administratifs servent aussi à faire entrer le secteur privé dans le dispositif. C'est ce que je préconise à Castres. Il faut séparer les entités privées que sont les clubs professionnels des collectivités qui n'ont plus les moyens de financer des stades à plus de 300 millions d'euros. Quant aux partenariats public-privé, ils ne vont pas résoudre le problème financier, au contraire, ils peuvent alourdir la facture quand on fera le total en fin de vie de l'équipement. Mieux vaut trouver un bon compromis aux côtés d'un partenaire privé plutôt que de mettre le doigt dans un engrenage dont on ignore où il va nous mener.

Propos recueillis par Jean Damien Lesay

Les maires de grandes villes partie prenante de la future Assemblée du sport
Michel Destot, le président de l'Association des maires de grandes villes de France (AMGVF), et Valérie Fourneyron, député-maire de Rouen et présidente de la commission "Sports" de l'AMGVF, ont rencontré Chantal Jouanno le 25 janvier afin de "défendre la spécificité des grandes villes et agglomérations dans le sport français". Selon de l'association, la ministre des Sports a assuré qu'elle tiendrait compte de cette spécificité lors de la composition de la future Assemblée du sport (voir ci-contre notre article du 19 janvier), qui sera finalisée en février et devra d'ici le mois de juin "définir les priorités des politiques publiques et clarifier les responsabilités des différents acteurs". Cette assemblée devrait être composée de 30 membres répartis dans cinq collèges : Etat, mouvement sportif, collectivités territoriales, acteurs économiques, société civile. Chantal Jouanno aurait proposé à l'AMGVF de prendre la présidence de l'un des groupes de travail, ce que les maires de grandes villes considèrent comme "un premier pas vers une meilleure représentation des grandes villes et grandes intercommunalités au sein des instances clés du sport".