Entre domicile parental et logement individuel, un long chemin vers l'autonomie résidentielle entre 18 et 30 ans
Une nouvelle étude de l'Injep et du Crédoc analyse les parcours résidentiels des jeunes de 18 à 30 ans, marqués par des allers-retours entre logement individuel et domicile parental, des contraintes économiques et des formes de soutien familial dont seulement certains bénéficient.
© Nicolas TAVERNIER/REA
"Loin d’être linéaires, les trajectoires résidentielles des jeunes sont ponctuées d’allers-retours" entre le logement indépendant et le domicile parental, confirme l'Institut national de la jeunesse et de l'éducation populaire (Injep) dans une étude rendue publique le 25 novembre 2025 sur le logement des jeunes. Dans le cadre du baromètre Djepva 2025 conduit avec le Crédoc (voir notre article du 17 septembre 2024), l'Injep a interrogé au printemps dernier 4.500 jeunes de 15 à 30 ans, ainsi qu'un échantillon témoin de 1.000 personnes âgées de plus de 30 ans.
Portant sur les 18-30 ans, les résultats indiquent que 45% des jeunes vivent exclusivement dans un logement indépendant (30% des 18-24 ans et 63% des 25-30 ans), 31% logent exclusivement chez leurs parents (43% des 18-24 ans et 17% des 25-30 ans) et 12% alternent entre leur propre logement et le domicile parental. Une minorité de jeunes vivent chez un autre membre de la famille (6% exclusivement et 5% en alternance avec le domicile parental). Un quart des jeunes vivant exclusivement dans leur propre logement sont en outre déjà retournés vivre chez leurs parents.
"L’autonomie résidentielle – c’est-à-dire l’occupation exclusive de son propre logement – progresse avec l’âge, la situation professionnelle, la vie en couple et le sexe, les jeunes femmes vivant plus souvent que les hommes dans un logement indépendant de manière permanente", analyse l'Injep. Les retours chez les parents sont d'abord liés aux transitions pendant les études ou à la fin d'un stage (24%) mais aussi à des séparations amoureuses ou des deuils (18%).
Le poids financier du logement est "devenu écrasant pour nos jeunes"
Ce sont principalement des raisons économiques qui expliquent le fait de résider chez ses parents : les jeunes concernés interrogés déclarent vouloir "trouver un emploi avant de chercher un logement" (34%) et estiment que "le coût du logement et de la vie est trop élevé" (33% dont 39% parmi les 25-30 ans). Quant aux jeunes qui occupent exclusivement un logement indépendant, ils sont nombreux à considérer que ce logement représente pour eux une charge lourde (43%), très lourde (11%) et parfois même "insurmontable".
Ce poids financier est "devenu écrasant pour nos jeunes", a jugé Thibaut de Saint Pol, directeur de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative (Djepva), lors d'un webinaire organisé à l'occasion de la sortie de l'étude. "Le logement creuse très fortement les inégalités sociales", ajoute le délégué interministériel à la jeunesse, relevant que ceux qui peuvent "compter sur leur famille sont clairement favorisés, à chaque étape" (recherche du logement, déménagement, équipement, paiement du loyer…). En outre, près de la moitié des jeunes interrogés dans l'enquête déclarent avoir déjà subi "au moins un type de discrimination ou un traitement inégalitaire" dans leur recherche de logement, principalement du fait de leur âge.
Il importe donc d'"apporter du réseau à ceux qui n'en ont pas", a rebondi Marianne Auffret, directrice générale de l'Unhaj (Union nationale pour l'habitat des jeunes). Ce réseau, qui a récemment fêté ses 70 ans, fédère des résidences de type foyers de jeunes travailleurs mais aussi des "services logement" qui aident les jeunes à "s'orienter dans ce paysage ultra complexe", précise Marianne Auffret.
Une aspiration à la propriété et à la maison individuelle
Occupant des logements plus petits que leurs aînés, les jeunes - en particulier les jeunes qui vivent de manière alternée entre leur logement et le domicile parental - subissent par ailleurs davantage de nuisances (manque d'isolation thermique, nuisances sonores, insalubrité…).
L'enquête met enfin le projecteur sur les aspirations des jeunes. Comme leurs aînés, les jeunes souhaitent majoritairement être propriétaires (alors que 70% d'entre eux sont locataires, dont 41% dans le parc privé, 23% dans le parc social et 6% en résidence étudiante) et habiter dans une maison individuelle (ils résident pour la majorité en appartement).
Les préférences divergent sur le lieu de vie : les jeunes interrogés souhaitent d'abord vivre dans une grande ville (33% contre 14% chez les plus de 30 ans), là où les plus de 30 ans plébiscitent la campagne (39%, contre 22% pour les 18-30 ans) et les petites et moyennes villes. Autre différence bien connue : les jeunes sont plus ouverts à la mobilité, 55% des 18-30 ans interrogés aspirant à changer de lieu de vie (20% dans une autre commune de la région, 20% dans une autre région et 15% à l'étranger), contre 35% pour les plus de 30 ans.