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Transports - Front commun contre le report sine die de l'écotaxe poids lourds

Si le report sine die de l'écotaxe poids lourds décidé par le gouvernement le 9 octobre a donné satisfaction aux transporteurs routiers, ainsi qu'aux organisations agricoles, il a suscité un véritable déluge de réactions négatives de la part des associations environnementales mais aussi des élus locaux, usagers, opérateurs, industriels du transport public et entreprises de travaux publics. Dans un communiqué commun diffusé ce 10 octobre, le Groupement des autorités responsables de transport (Gart), l'Assemblée des communautés de France (AdCF), la Fédération nationale des associations d'usagers des transports (Fnaut), l'Union des transports publics et ferroviaires (UTP), la Fédération des industries ferroviaires (FIF) ainsi que l'association TDIE regroupant l'ensemble des parties prenantes du monde des transports "déplorent" le nouveau report de l'écotaxe et "réclament unanimement une remise à plat des modes de financement de la mobilité durable".

Des dommages collatéraux

"De report en reculades par les différents gouvernements qui se sont succédé depuis 2010", ils voient dans la décision gouvernementale "l'acte de décès de cette fiscalité, pourtant basée sur la prise en compte du principe 'pollueur-payeur' qui figure dans la Charte de l'environnement, partie intégrante du bloc constitutionnel depuis 2005". "Concrètement, sans cette ressource, c'est l'avenir de l'Agence de financement des infrastructures de transport (Afitf) qui se trouve posé et, plus encore, le financement d'une centaine de projets de transport en commun en site propre et le volet transport des contrats de plan Etat-régions qui se trouvent directement menacés". Les associations signataires demandent donc au gouvernement de "définir enfin une politique de long terme qui permette d'assurer des ressources pérennes et stables pour le financement de la mobilité dans notre pays".

Un manque à gagner de 300 millions d'euros en 2015

Elles rappellent entre autres les engagements pris par la France pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre d'ici 2050 et soulignent qu'"il n'y a pas d'autres alternatives [sic] que de développer les politiques de mobilité durable pour atteindre cet objectif ambitieux". Elles mettent aussi en avant le poids des transports publics dans l'économie : le secteur représente "plus de 600.000 emplois directs et indirects en France". "Par définition, la filière 'Transports collectifs' génère des emplois qui présentent le double avantage d'être à la fois locaux et non délocalisables", soulignent encore les associations.
Dans l'immédiat, la FNTP (Fédération nationale des travaux publics) a demandé à l'Etat ce même 10 octobre un "abondement d'urgence pour 2015 en provenance du budget (…) ou d'autres recettes, à hauteur du manque de financement". Selon elle, il manquera en effet 300 millions d'euros en 2015 "pour que l'Etat puisse respecter ses engagements en matière d'infrastructures". "Ces 300 millions, avec les cofinancements, ce sont 1 milliard d'euros de travaux bloqués et 10.000 emplois menacés, estime-t-elle. Et encore faut-il que l'augmentation des 2 centimes de la taxe sur le diesel soit effectivement votée." Alors que les députés s'apprêtent à examiner le projet de loi de finances 2015, la FNTP appelle à une manifestation des chefs d'entreprise et des salariés des travaux publics le 14 octobre devant l'Assemblée nationale.

Anne Lenormand

Une "regrettable erreur" pour Jean-Paul Chanteguet
Le président socialiste de la commission du développement durable de l'Assemblée, Jean-Paul Chanteguet, a qualifié jeudi de "regrettable erreur" la suspension sine die du dispositif de l'écotaxe annoncée par Ségolène Royal, qui "équivaut évidemment à son abandon".
"La mission d'information parlementaire que j'ai conduite en début d'année était pourtant parvenue, en 4 mois de travail, à refonder la légitimité de cette redevance d'usage de la route par les camions", a regretté le député de l'Indre dans un communiqué. Ses propositions avaient obtenu "le soutien de la plus importante organisation de transporteurs, tout en permettant de se dégager de la pression des mécontentements et d'une contestation reposant largement sur un déficit de pédagogie et de courage politique", a-t-il ajouté.
Pour Jean-Paul Chanteguet, l'écotaxe "bénéficiait d'une grande force, puisqu'elle prenait racine dans le consensus politique des lois de Grenelle adoptées à la quasi-unanimité" et répondait à "la nécessité de mettre en place une politique durable du transport routier, en réorientant notre économie vers un modèle moins dépensier en énergie, moins polluant". Le président de la commission du développement durable a également fait valoir qu'elle reposait sur "deux principes incontestables" : celui de l'utilisateur-payeur, car "ce n'est pas aux contribuables de payer pour le passage des camions sur les routes", et du pollueur-payeur. Et, a encore souligné l'élu, "cette écotaxe présentait l'avantage de procurer à l'Etat des ressources, qui lui permettent de financer l'entretien des routes mais aussi le développement d'infrastructures alternatives de transport durable comme le chemin de fer ou les voies fluviales". "Sans ces moyens, l'Etat n'est plus en mesure d'assurer sa responsabilité" en la matière, a-t-il déploré.
 

 

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