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Santé - Hôpital : Marisol Touraine annonce des engagements, pas encore des réformes

Le 4 mars, Edouard Couty a remis à Marisol Touraine la synthèse et les propositions du groupe de travail sur "le pacte de confiance pour l'hôpital". La ministre des Affaires sociales et de la Santé avait confié cette mission à l'ancien directeur des hôpitaux en septembre dernier (voir nos articles ci-contre du 5 et du 10 septembre 2012). Issu d'une large concertation avec les acteurs de l'hôpital public, le document développe pas moins de 46 propositions, réparties en plusieurs grandes thématiques : le service public hospitalier et les missions de service public de santé sur le territoire ; le financement des hôpitaux ; la gouvernance, l'organisation, le management et le dialogue social ; les relations avec l'Etat et les agences régionales de santé (ARS). Le rapport estime que "le retour de la confiance des patients, des professionnels et des autorités de régulation passe prioritairement par une évolution des méthodes et des pratiques dont il faut rappeler qu’elles doivent se fonder sur des valeurs fortes".

"Tourner la page" de la loi HPST

Mais, autant que le rapport Couty, ce sont les annonces de réforme de la ministre qui étaient attendues. L'éventualité de la présentation d'un plan global de réforme de l'hôpital public dès la remise du rapport était même évoquée avec insistance. Mais Marisol Touraine s'est gardée d'annoncer des mesures concrètes, évoquant plutôt, à ce stade, des "engagements", des "réflexions" et des "orientations". Si ces différents points ont été plutôt bien accueillis par la communauté hospitalière, une certaine déception s'est manifestée sur le flou de plusieurs pistes de réforme et sur l'absence de toute information sur le financement. Sur ce point, la coïncidence entre la remise du rapport et l'annonce des évolutions budgétaires des hôpitaux pour 2013 n'a sans doute pas arrangé les choses.
La ministre de la Santé a notamment affirmé son intention de "tourner la page" de la loi Hôpital, patient, santé et territoires (HPST) du 21 juillet 2009 et de "redonner de la force, de l'élan et de la fierté à l'hôpital". Outre une présence plus forte du service public hospitalier dans la loi - mais celui-ci ne sera pas véritablement défini avant la loi sur la santé publique, prévue pour 2014 -, le retour le plus symbolique sur la loi HPST devrait résider dans la recherche d'un meilleur équilibre entre les pouvoirs du directeur - sensiblement renforcés par la loi de 2009 - et ceux du corps médical, ainsi que dans une présence plus importante des patients, à travers la création de "comités techniques des usagers". La réforme de l'hôpital devrait également passer par la définition d'une mission nouvelle, dont les contours et la mise en oeuvre restent également à préciser : le service public territorial de santé.

Vers une "tarification au parcours"

En revanche - suivant en cela les recommandations du groupe de travail animé par Edouard Couty, quasi unanime à rejeter l'idée d'un retour en arrière -, le gouvernement ne devrait pas supprimer la T2A, autrement dit, la tarification à l'activité. Mais Marisol Touraine a cependant affirmé que la T2A a aujourd'hui "trouvé ses limites" et présente des effets "inflationnistes". Le gouvernement pourrait donc s'orienter vers son inclusion dans un mécanisme plus large - évoqué sous le terme de "tarification au parcours" -, qui prendrait en compte à la fois le volet hospitalier et le volet libéral autour d'une même pathologie d'un patient ou d'un groupe de patients. A ce stade, aucune précision n'a été donnée sur le contenu et le fonctionnement de ce nouveau mode de financement. Prudente, la ministre a indiqué que "ce ne sera pas une refonte totale de la tarification, mais il faudra qu'à ce moment-là [lors du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale, ndlr], on ait changé de cap". Le comité de réforme de la tarification hospitalière doit en effet remettre ses premières préconisations au mois de juin. L'objectif du gouvernement est alors d'intégrer les premiers éléments de la réforme dans le PLFSS pour 2014, qui sera examiné à l'automne 2013. Mais, si l'on se réfère à la complexité d'une telle réforme et aux délais qui ont été nécessaires à l'élaboration de la T2A, des délais aussi courts apparaissent assez peu réalistes, d'autant plus qu'une éventuelle introduction par voie d'amendement gouvernemental en cours de débat s'exposerait - pour une réforme de cette ampleur - aux foudres du Conseil constitutionnel.
Une autre annonce de Marisol Touraine semble en revanche moins complexe à mettre en oeuvre, du moins en termes administratifs et juridiques. Il s'agit en l'occurrence de la mise en place d'un plan d'investissement hospitalier de 45 milliards d'euros sur dix ans. Il restera toutefois à en préciser le financement, la situation budgétaire des hôpitaux ne permettant guère d'accroître l'autofinancement et le recours à l'emprunt.