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La loi "gaz hilarant" parue au Journal officiel

La loi visant à prévenir l’usage détourné de protoxyde d'azote ("gaz hilarant") par les mineurs est parue. La vente de ce produit, qu'on trouve dans le commerce, est désormais interdite aux mineurs et, dans certains lieux, aux majeurs. Le texte pénalise également l’incitation d’un mineur à en faire un usage détourné. Mais il ne répond que partiellement à la consommation de gaz hilarant, notamment dans les soirées étudiantes où le phénomène est en forte progression.

La loi tendant à prévenir les usages dangereux du protoxyde d’azote, autrement appelé "gaz hilarant"; est parue au Journal officielle, le 2 juin, une semaine après son adoption définitive par le Parlement. Mais plus d’un an après son premier examen au Sénat. Le texte vise à lutter contre l’usage détourné de ce gaz, notamment chez les jeunes.

Le texte, émanant du Sénat, punit de 15.000 euros d'amende "le fait de provoquer un mineur à faire un usage détourné d'un produit de consommation courante pour en obtenir des effets psychoactifs". Une quantité maximale de vente de ces produits peut être autorisée par arrêté conjoint des ministres chargés de la santé et de l'économie.

Interdiction de vente aux mineurs

Le texte interdit plus précisément le fait "de vendre ou d'offrir à un mineur du protoxyde d'azote, quel qu'en soit le conditionnement", sous peine de 3.750 d’euros. Le vendeur doit demander à l’acheteur la preuve de sa majorité. Les sites de commerce en ligne "doivent spécifier l'interdiction de la vente aux mineurs de ce produit sur les pages permettant de procéder à un achat en ligne de ce produit, quel que soit son conditionnement". Les ventes dans les débits de boissons sont prohibées, même pour les majeurs. Enfin, il est interdit de "vendre et de distribuer tout produit spécifiquement destiné à faciliter l'extraction de protoxyde d'azote afin d'en obtenir des effets psychoactifs". Enfin, chaque unité de conditionnement fera l'objet d'un étiquetage "indiquant la dangerosité de l'usage détourné du protoxyde d'azote" (les précisions seront données par décret).

Le protoxyde d'azote est un gaz à usage médical mais il est aussi en vente dans le commerce sous forme de cartouches gris métallisé ou de bonbonnes, par exemple pour les siphons de crème chantilly. Depuis quelques années, il est très prisé des jeunes pour ses effets euphorisants immédiats. Ils en détournent l’usage en déversant le gaz dans un ballon de baudruche avant de l’inhaler. "À Tourcoing et dans d’autres villes, on ne connaît que trop bien les ravages que peut causer ce geste d’apparence anodine, qui consiste à aspirer une petite quantité de gaz issu d’un banal contenant, a appuyé le secrétaire d’État chargé de l’Enfance, Adrien Taquet, le 25 mai, lors de l’ultime vote du Sénat. Un geste, qui, reproduit deux, trois, dix, parfois des douzaines de fois peut en effet causer chez son auteur des problèmes physiques et neurologiques extrêmement graves." 

Les policiers municipaux habilités


En l'absence de loi, plusieurs maires ont tenté jusqu’ici de juguler le phénomène en prenant des arrêtés d’interdiction (voir notre article du 12 septembre 2019), sans grand succès. Désormais, les agents de police municipale, les gardes champêtres, les agents de surveillance de Paris ainsi que les agents de la ville de Paris chargés d'un service de police seront habilités à constater par procès-verbal toutes les infractions contenues dans la loi. Ils pourront "exiger que le cessionnaire établisse la preuve de sa majorité par la production de tout document officiel muni d'une photographie".

"Nous pouvons être très heureux d’avoir fait en sorte que nos élus et tous les acteurs de terrain disposent, dès demain, d’un arsenal législatif opérant, qui leur permettra enfin de n’avoir plus recours à des arrêtés municipaux, lesquels n’étaient à vrai dire qu’un cataplasme sur une jambe de bois", s’est félicité Valérie Létard (Union centriste, Nord), auteur de la proposition de loi. "La consommation de protoxyde d’azote a flambé, jusqu’à s’étendre sur tout le territoire national. Elle est encore montée en puissance avec l’instauration du confinement", a-t-elle constaté. Pourtant, le texte donne l'impression d'une demi-mesure puisqu'il laisse de côté, en grande partie, les jeunes adultes, alors que l'usage des gaz hilarants est très répandu dans les soirées étudiantes, notamment. La moyenne d'âge des consommateurs se situe à 21 ans, comme l'a rappelé Alain Marc (Les Indépendants, Aveyron). Une étude menée par l’université de Bordeaux auprès de plus de 10.000 étudiants montre que 13% d’entre eux sont des consommateurs actifs de protoxyde d’azote et que plus de 25% en ont déjà consommé. "Des réseaux très bien organisés trouvent là une source de revenus bien moins risquée pénalement que le trafic d’autres substances", a alerté le sénateur de Paris Bernard Jomier (Socialistes et républicains). Curieusement, le comité interministériel de lutte contre les stupéfiants de vendredi dernier a à peine effleuré le sujet.

Référence : loi n° 2021-695 du 1er juin 2021 tendant à prévenir les usages dangereux du protoxyde d'azote, JO du 2 juin 2021.

 

 

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