La mobilité quotidienne des Français en baisse, selon une étude du Cerema
Depuis la pandémie de Covid-19, les Français se déplacent relativement moins au quotidien, à la faveur du télétravail et des achats en ligne notamment, constate une étude publiée ce 7 novembre par le Cerema qui évalue cette baisse de la mobilité à près de 10%.
© Florian Pépellin CC BY-SA 4.0/ Un bus à Chambéry
Une baisse de près de 10% de la mobilité quotidienne par résident, en nombre et en kilomètres, depuis le début des années 2010, au sein des aires urbaines : c’est ce que constate le Centre d'études d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema), dans une étude publiée ce 7 novembre. En attendant la prochaine enquête nationale 2026-2027 du ministère chargé des transports, l’organisme public a réalisé une synthèse des enquêtes mobilités menées depuis 2021 par des collectivités avec son appui. Ces enquêtes ont été réalisées dans dix agglomérations, hors région parisienne et territoires ruraux (Caen, Angers, Angoulême, Bordeaux, Toulouse, Toulon, Nice, Clermont-Ferrand, Saint-Étienne, Chambéry).
Cette diminution de la mobilité, poursuit le Cerema, est "nouvelle et constatée quelle que soit la typologie de territoire : du centre-ville d'agglomération dense aux territoires ruraux des aires urbaines".
Influence du télétravail et des achats en ligne
Ce sont les personnes en âge de travailler, entre 25 et 65 ans, qui sont principalement à l’origine de cette baisse : "9% d'entre elles ne sortent pas de chez elles un jour de semaine, contre 7% il y a 10 ans", explique le Cerema. Par ailleurs, le nombre de leurs déplacements a chuté, passant de 4,7 à 4,3 par jour, soit une baisse de près de 10%. En revanche, les 75 ans et plus sont davantage mobiles : "30% ne sortent pas de chez eux un jour de semaine contre 35% dix ans auparavant, et ceux qui sortent de chez eux effectuent toujours en moyenne 3,4 déplacements par jour."
La baisse de la mobilité en semaine ne concerne pas que le travail, même si, quel que soit le territoire, on observe un recul de 15% des déplacements quotidiens domicile-travail par personne, sans doute portée par la pratique du télétravail, qui s’est diffusée plus largement dans certaines professions à partir de 2020, indique la synthèse. Mais "tout le monde ne télétravaille pas", rappelle le Cerema, en précisant que sur les territoires étudiés, "seuls 6% des actifs sont en télétravail un jour de semaine, une proportion qui atteint 13% chez les cadres".
Les déplacements pour le motif achats sont aussi en diminution souligne l’organisme, du fait de l’augmentation des pratiques d’achats en ligne et de livraisons à domicile. Une tendance "d’autant plus forte qu’on s’éloigne des centres urbains", ajoute le Cerema. Quant aux déplacements pour motifs "démarches", "santé" et "accompagnement", ils diminuent eux aussi, et "d’autant plus fortement que l’on se rapproche des grands centres urbains", constate l’étude.
Hausse de l'utilisation des transports en commun en ville
Côté modes de transport, l’utilisation des transports en commun poursuit sa progression dans les grands centres urbains, mais reste stable dans les autres territoires. 13% des déplacements des résidents des grands centres urbains sont réalisés en transports en commun, contre 11% dix ans auparavant. "La population des grands centres urbains ayant augmenté de 7% (contre 5% ailleurs), l’offre de transports en commun a donc réussi à répondre au besoin de cette population croissante", en déduit le Cerema.
Le nombre moyen de véhicules par adulte continue de diminuer légèrement, mais uniquement dans les grands centres urbains (-3%). Les enquêtes réalisées depuis 2020 témoignent de l’inscription dans le temps long du recul de la voiture en ville, estime le Cerema, avec des taux de motorisation par adulte qui diminuent légèrement chez les habitants des grands centres urbains (0,64 véhicule par adulte contre 0,66 dix ans auparavant). "En revanche, le nombre moyen de véhicules par adulte demeure stable hors des grands centres urbains, voire augmente en rural périurbain", relève la synthèse.
Le taux de possession du permis de conduire chez les 18-40 ans est en recul quel que soit le type de territoire : cette baisse va de 3 points en rural périurbain à 5 points dans les grands centres urbains. 73% des 18-40 ans résidant dans les grands centres urbains possèdent ainsi le permis dans les enquêtes 2021-2023, contre 78% dans les enquêtes 2007-2013. Déjà constatée chez les plus jeunes, la diminution du taux de possession du permis de conduire concerne désormais également les personnes de plus de 30 ans, note le Cerema. Ce phénomène pourrait confirmer, selon lui, un recul de l’usage de la voiture chez les nouvelles générations.
Progression des modes actifs
La part des déplacements à vélo, mais aussi de la marche augmentent dans tous les territoires et particulièrement dans les centres urbains. En moyenne 44% des déplacements de moins de 10 km des résidents des grands centres urbains sont réalisés à pied et à vélo, soit 9 points de plus par rapport à la période 2007-2013, constate l’étude. Cet essor des modes actifs est largement visible dans les grandes agglomérations depuis 2020 avec le développement des "corona pistes" réservées aux cyclistes pendant la crise sanitaire puis leur pérennisation, les requalifications- d’espaces publics pour favoriser les mobilités actives, etc.
Les trajets en trottinettes électriques représentent pour leur part moins de 0,5% des déplacements quotidiens. Ces nouveaux engins sont davantage sollicités par les résidents des grands centres urbains, masculins et non motorisés et sont utilisés pour des trajets plutôt courts, en concurrence avec le vélo et la marche, relève le Cerema.
La voiture toujours en tête des modes de transport
Même si la voiture reste prédominante, la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) de la mobilité est amorcée depuis une dizaine d’années dans les grands centres urbains, affirme l’organisme. Dans ces territoires denses, "la part de la voiture y est moindre, d’une part car l’offre alternative s’est développée (transports en commun et modes actifs) d’autre part car les distances quotidiennes parcourues sont deux fois plus faibles que pour un résident du rural périurbain : 12,2 km contre 27,6 km en moyenne (2021-2023)", indique le Cerema. Malgré cela, même dans les centres urbains, 66% des kilomètres sont encore réalisés en voiture en 2021-2023 contre 72% une dizaine d’années auparavant.
"Dans les territoires moins denses aux franges des aires urbaines, la voiture recule à la marge, sans doute en lien avec le vieillissement de la population, et reste fortement prédominante : plus de 85% des kilomètres parcourus y sont encore réalisés en voiture", poursuit l’étude. Pour les longs déplacements quotidiens, celle-ci reste prépondérante (plus de 80% des trajets). Si les déplacements du quotidien de plus de 10 km représentent seulement 13% du nombre de déplacements, ils constituent une part croissante des kilomètres parcourus (56%, en hausse de 3 points par rapport à 2007-2013 (53 %). Or, la voiture individuelle est prédominante sur ces trajets et cette tendance se renforce.