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Sports / Education - La réforme des rythmes scolaires met le sport à rude épreuve

Le passage d'une semaine de quatre jours à une semaine de quatre jours et demi dans les écoles primaires ne va pas bouleverser le seul secteur de l'éducation. Ainsi, toute l'organisation du sport territorial va en ressentir les conséquences en profondeur. Deux enquêtes récentes recensent inquiétudes et interrogations sur le sujet.

Le secteur du sport ne sera pas le moins impacté par la réforme des rythmes scolaires. Loin s'en faut. Créneaux horaires des équipements, encadrement des activités et même transport des enfants sont quelques-unes des équations que les élus et responsables des sports des collectivités auront à résoudre dans les prochains mois. Mais leur préoccupation la plus forte reste pour l'heure celle de l'information. Au même moment, l'Association nationale des élus en charge du sport (Andes) et l'Association nationale des directeurs et des intervenants d'installations et des services des sports (Andiiss) tirent en effet la sonnette d'alarme dans deux enquêtes dont les premières conclusions viennent d'être dévoilées.
"La plus grande problématique, pointée par la majorité des élus, relève du manque d'informations à leur disposition concernant cette réforme et sa mise en place, ainsi qu'à leur méconnaissance du dispositif, des textes gouvernementaux et au manque de repères officiels : Quels horaires ? Quels besoins d'encadrement ?", explique l'Andes, qui poursuit : "[Les élus] sont donc face à une réelle difficulté de compréhension et d'anticipation, les empêchant d'identifier clairement les conséquences financières et organisationnelles de cette réforme au niveau local." Pour l'Andiiss, Bruno Lapeyronie, directeur des Sports de la ville de Montpellier, va dans le même sens : "Nous sommes à quelques mois de la mise en place de la réforme et nous ne savons rien, nous ne savons pas comment la mettre en place, avec qui." Avant de nuancer : "Cette inquiétude diffère selon le type de collectivité. Schématiquement, plus la collectivité est importante, plus on a d'informations et on se trouve rassuré par rapport à ce que l'on va faire à la rentrée, contrairement à un petit service des sports où l'on manque d'informations et où l'on se trouve un peu en situation de crise."

Impacts sur les communes

Si ce manque d'information est autant dénoncé, c'est que l'enjeu est de taille. "Cette réforme impacte le monde éducatif, ce qui n'est pas de notre ressort, mais aussi et, de façon importante, les collectivités", expose Jacques Thouroude, président de l'Andes.
En termes d'organisation, "la modification de ces rythmes scolaires aura des conséquences sur les plannings et les interventions des agents sportifs des collectivités et modifiera très certainement les temps d'intervention et de mission des éducateurs et des accompagnateurs", explique l'Andes, pour qui, "les communes devront, avec une demi-journée d'école supplémentaire et des rythmes scolaires différents, anticiper les modifications en termes de transports (rotations supplémentaires, déplacements vers les équipements sportifs, …), notamment en milieu rural".
Autre difficulté mise en avant : l'ouverture de nouveaux créneaux pour les activités sportives dans un contexte de "saturation de la très large majorité des équipements, déjà utilisés par les collégiens, les lycéens et les clubs. Dans ce cadre, certaines collectivités envisagent une organisation des activités sportives au sein même de l'école". Un problème qui se posera avec d'autant plus d'acuité pour les piscines : "Les élus rencontrent un certain nombre de difficultés particulières, notamment dues à la contractualisation des créneaux d'utilisation, qui ne peut être modifiée unilatéralement", poursuit l'Andes. Pour l'Andiiss, en revanche, "les conflits avec d'autres usagers (collèges, etc.) sur les créneaux ne provoquent pas énormément d'inquiétudes même si un impact est attendu".
En termes financiers, les premiers retours de l'enquête de l'Andes démontrent que les collectivités évaluent le coût de mise en place de cette réforme entre 20.000 euros par an pour une commune de 1.000 habitants, et 475.000 euros par an pour une ville de 50.000 habitants. Et l'association de préciser : "Ces différences, très significatives, peuvent s'expliquer par la taille de la commune concernée, mais aussi par les orientations et les options choisies pour la mise en place concrète de ce dispositif." A l'heure actuelle, la plupart des villes attendent donc d'avoir mené une concertation avec l'ensemble des acteurs pour chiffrer les charges nouvelles liées au dispositif qu'elles mettront en place. "Financièrement, à un moment où les dotations ont tendance à être gelées, nous souhaitons que celles-ci soient pérennisées", plaide Jacques Thouroude, dont l'association a déjà mené plusieurs réunions de travail avec les services des ministères de l'Education et des Sports.

Les écoles municipales des sports menacées

Au delà de l'impact direct sur l'organisation et les finances des collectivités, l'Andes comme l'Andiiss pointent enfin des répercussions dont les effets pourraient bouleverser le paysage du sport territorial en profondeur. D'abord les écoles municipales des sports. "Jusqu'à présent, nous avions les enfants le mercredi matin dans ces écoles municipales des sports, et l'après-midi les enfants étaient dans les clubs, explique Jacques Thouroude. Comment cela va-t-il s'articuler aujourd'hui ? On ne veut pas rentrer en concurrence avec les pratiques sportives en club. Or, en bougeant le système, on peut avoir un effet domino." Pour Bruno Lapeyronie, "il y a une inquiétude le mercredi matin en ce qui concerne les écoles municipales des sports, généralement implantées dans ce créneau. Beaucoup nous disent qu'elles vont très certainement disparaître purement et simplement". La découverte d'activités sportives devra alors être faite autrement, le créneau périscolaire, en fin d'après-midi, restant le seul disponible.
Enfin, la menace sur une catégorie d'associations sportives ressort des deux enquêtes. "Les clubs qui ont leurs activités le mercredi matin sont inquiets pour leur organisation, au regard surtout de la disponibilité des éducateurs bénévoles qui ont par ailleurs des obligations professionnelles", affirme Jacques Thouroude. L'Andiiss confirme : "Les associations qui ont des salariés se disent qu'il suffit de décaler les horaires, ce qui n'est pas ressenti comme très grave. Au contraire des associations fonctionnant uniquement avec des bénévoles. Là on a vraiment peur que les parents ne puissent pas se libérer à 15 heures et arrêtent donc leur action bénévole. On est très inquiets pour les petites associations."
Dans ce dossier des rythmes scolaires, le temps presse et le travail est encore considérable. "Aujourd'hui, ce dossier est une pierre brute, avec un certain nombre d'angles assez abrasifs à polir", conclut Jacques Thouroude. Pour le faire avancer, son association sollicite le ministère de façon régulière et entretient des contacts privilégiés avec l'AMF pour faire remonter les points d'achoppement. La balle semble donc dans le camp de l'Etat.