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Emploi - L'aide à domicile lance un cri d'alarme sur l'avenir des services à la personne

Les acteurs de l'aide à domicile s'inquiètent des conséquences de la suppression des exonérations de charges patronales et de l'abattement de 15 points pour les particuliers déclarant leur employé au salaire réel. Des mesures entrées en vigueur le 1er janvier.

"Depuis un an on attend des mesures concrètes et on crie au secours ; on a eu zéro réponse et un nouveau coup de massue avec la suppression des exonérations de charges pour le secteur des services à la personne." C’est dans ces termes qu’Hugues Vidor, directeur général d’Adessa A domicile (la fédération des associations d'aide à domicile), a exprimé ses craintes lors d’une conférence de presse organisée par le collectif de l’aide et du soin à domicile le 10 janvier 2011. Au centre des préoccupations : la suppression de l’exonération de cotisations patronales de sécurité sociale en faveur des entreprises ou des associations intervenant dans le champ des services à la personne et de l’abattement de 15 points pour les particuliers employeurs qui déclarent leur employé à domicile au salaire réel et non au forfait. Des mesures mises en place dans le cadre de la loi du 26 juillet 2005, dite Borloo, le 1er janvier 2006, pour favoriser le développement d’un secteur jugé créateur d’emplois. Leur suppression est prévue dans l’article 90 du projet de loi de finances pour 2011 et sont effectives depuis le 1er janvier 2011. Et d'après le collectif, elles ne sont pas sans conséquence. Premier point : la suppression des exonérations de charges patronales risque d’entraîner une augmentation du coût d’intervention des services d’aide à domicile. "Pour ceux qui interviennent auprès des personnes âgées ou en situation de handicap et autres publics fragiles, le surcoût sera de l’ordre de 2%, ces services ne bénéficiant plus d’exonérations sociales patronales que pour leur personnel administratif et d’encadrement, explique le collectif, pour les services intervenant auprès de familles vulnérables, l’augmentation sera de l’ordre de 12 à 15%, soit de 2 à 3 euros par heure." Ces augmentations pourraient être fatales pour certains organismes si elles n'étaient pas compensées. Et les associations doutent de la capacité des conseils généraux et des caisses d'allocations familiales (CAF) à le faire. Les dépôts de bilan, qui ne sont déjà pas rares dans le secteur, risquent de se multiplier, avertit encore le collectif. L’impact sur l’emploi  pourrait également se faire ressentir avec une prévision de 20.000 salariés en moins pour cette année.

Un fonds d'intervention doté de 100 millions d'euros

Autres conséquences : une augmentation du travail au noir, voire la suppression d’une offre de prestation pourtant utile comme la garde d’enfants, et des recettes moindres pour l'Etat en matière de cotisations, alors que le gouvernement entend économiser 450 millions d’euros avec ces nouvelles dispositions. La baisse de la qualité des prestations et de la rémunération des salariés est aussi redoutée par les porefessionnels du secteur, les structures cherchant elles aussi à faire des économies. Une situation jugée paradoxale par le collectif pour un secteur jugé depuis la loi de 2005 comme prometteur, capable de créer en quelques années 500.000 emplois. Depuis 2005, un paquet de mesures a été mis en place pour développer les services à la personne, avec deux plans successifs. Mais les résultats n’ont pas été à la hauteur des attentes du gouvernement. Le rapport de Joseph Kergueris, sénateur du Morbihan, réalisé au nom de la délégation sénatoriale à la prospective ("Services à la personne : bilan et prospective") faisait état de 82.000 créations d’emploi équivalents temps plein entre 2006 et 2008, soit cinq fois moins que l’objectif visé. Le secteur reste toutefois prometteur, sa part dans l'emploi étant passée de 3,5% à 3,7% en 2008. 
Pour remédier à cette situation, le collectif demande la création d’un fonds d’intervention pour le secteur, doté de 100 millions d’euros. Une demande qui date de 2009. Autres revendications : un rendez-vous tripartite avec l’Etat, l’Association des départements de France (ADF), et le collectif "pour revisiter un système qui est pour tous obsolète", la publication du rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) sur le sujet, remis au gouvernement mais qui n’a jamais été rendu public, et le maintien des politiques de professionnalisation et de qualification "mises à mal depuis quelques années". Pour aborder toutes ces questions, le collectif demande à ce qu’un conseil de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) se tienne d’ici la fin du mois de janvier 2011. Le gouvernement, quant à lui, avait fait savoir il y a quelques jours que la question de l'offre de services à domicile pour les personnes âgées serait abordée dans le débat sur la dépendance.