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Accès aux soins - L'AME dérape à nouveau et relance la polémique

Lors de son audition par la commission des affaires sociales du Sénat, le 3 juin, Marisol Touraine a indiqué que les dépenses de l'aide médicale d'Etat (AME) se sont élevées, en 2013, à 744 millions d'euros. Ce chiffre est supérieur de 26% au montant des crédits budgétés au titre de l'année 2013, soit 588 millions d'euros. La ministre des Affaires sociales et de la Santé a expliqué ce nouveau dérapage des dépenses d'AME par "la forte poussée du nombre de bénéficiaires".

Un nombre de bénéficiaires en progression de 10,2%

Cette annonce ne constitue pas vraiment une surprise : la Cour des comptes n'avait pas manqué de relever, une nouvelle fois, ce dérapage des crédits d'AME dans un récent rapport sur l'exécution du budget 2013. La Cour précisait au passage que "la forte poussée des bénéficiaires" évoquée pour expliquer ce phénomène correspond à une augmentation de 10,2% du nombre de bénéficiaires, qui porte le total à 278.262 personnes (chiffre à la fin du mois de septembre 2013). Une progression significative, mais qui ne suffit pas à expliquer - à elle seule - le dérapage des crédits de 26% constatés sur 2013.
La question n'a pas manqué de rebondir sur ce sujet éminemment sensible (voir nos articles ci-contre). Lors de la séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale, le 10 juin, Véronique Besse, députée (non-inscrite) de Vendée, a interpellé la ministre de la Santé. La députée - qui est aussi la porte-parole du Mouvement pour la France de Philippe de Villiers - a interrogé la ministre sur la "mauvaise gestion d'un dispositif d'Etat très difficile à contrôler, qui entraîne un véritable dérapage des dépenses". Elle a aussi affirmé que "la France doit certes venir en aide à ceux qui sont dans le besoin mais, dans ces circonstances, comment ne pas voir cela comme un véritable appel d'air à l'immigration illégale et aux drames humains qu'elle implique".

"Un problème de santé publique"

Dans sa réponse, Marisol Touraine a défendu l'AME, en rappelant qu'au-delà des aspects de solidarité, "c'est aussi et surtout un problème de santé publique, qui est d'ailleurs régulièrement soulevé par les professionnels de santé, car, si l'on veut éviter la propagation de maladies infectieuses sur notre territoire, il faut pouvoir soigner suffisamment rapidement les personnes malades. Je pense en particulier à la tuberculose".
Mais la ministre de la Santé a aussi affirmé que "pour autant, comme pour tous les droits, il faut s'assurer qu'ils sont mis en œuvre dans des conditions maîtrisées et encadrées". Elle a ainsi demandé aux caisses primaires d'assurance maladie "d'apprécier dans chaque situation les raisons pour lesquelles elles acceptent ou refusent les demandes". En pratique, il s'agira d'étudier caisse par caisse les taux d'acceptation et de refus et d'identifier ainsi un éventuel "recours excessif à l'AME dans certaines parties du territoire".
Marisol Touraine a également indiqué réfléchir, avec le ministre de l'Intérieur, à "des contrôles stricts pour éviter que des filières d'accès aux soins en France ne se mettent en place".
Il est toutefois peu probable que ces annonces suffisent à éteindre la polémique récurrente sur le sujet. On peut donc s'attendre à des propositions de loi sur la question ou à des dépôts d'amendements, par exemple lors de l'examen du projet de loi rectificatif pour le financement de la sécurité sociale.

Références : Assemblée nationale, séance de questions orales sans débat du 10 juin 2014, question de Véronique Besse, députée de Vendée, et réponse de la ministre des Affaires sociales et de la Santé.

 

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