Le gouvernement acte un nouveau gel de crédits de l'État
Un effort supplémentaire de 5 milliards d'euros au total sur la dépense publique sera nécessaire cette année pour tenir l'objectif de déficit public, a annoncé le gouvernement, qui organisait ce 26 juin la deuxième réunion du comité d'alerte des finances publiques. 3 milliards d'euros supplémentaires de crédits de l'État pour 2025 seront ainsi mis en réserve et donc non engagés. Les détails - et donc l'impact pour les collectivités - seront connus ultérieurement.

© Amélie de Montchalin, Eric Lombard, Catherine Vautrin et François Rebsamen au comité d’alerte des finances publiques
Le gouvernement va engager "dès cet été" un nouvel "effort" pour contenir les dépenses de l'État et de la sécurité sociale. L'économie attendue, de l'ordre de 5 milliards d'euros, doit permettre à la France de respecter l'objectif d'un déficit public de 5,4% du PIB à la fin de l'année.
L'exécutif surveille l'exécution du budget 2025 comme le lait sur le feu et entend réagir rapidement dès qu'un dépassement des dépenses est observé. La stratégie avait été dévoilée le 3 mars dernier (voir notre article), dans la foulée de la publication des lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2025. Elle avait été mise en pratique le 15 avril, avec une première réunion du comité d'alerte des finances publiques, animée par le Premier ministre.
Cette structure, qui rassemble les représentants de l'État, de la sécurité sociale et des collectivités territoriales, ceux des partenaires sociaux, ainsi que des parlementaires, s'est une nouvelle fois réunie ce 26 juin, en présence des ministres de l'Économie (Éric Lombard), du Travail (Catherine Vautrin), de l'Aménagement du territoire (François Rebsamen) et des Comptes publics (Amélie de Montchalin).
État : 3 milliards d'euros supplémentaires mis en réserve
Et les nouvelles que ces derniers ont partagées à l'occasion de cette rencontre d'un peu plus de deux heures trente sont mitigées. Certes, les recettes publiques "sont, à date et dans l’ensemble, en ligne avec les prévisions" de la loi de finances pour 2025. Avec même une bonne surprise pour ce qui est du produit des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) – ce qui ravira les départements, qui en sont les principaux bénéficiaires. 6,3 milliards d'euros de recettes issues de cette taxe ont été enregistrés sur les cinq premiers mois de l'année : c'est plus que les 5,9 milliards d'euros qui étaient attendus.
Mais dans un "environnement macroéconomique entouré de nombreuses incertitudes", le "taux d'exécution" des dépenses de l'État était "légèrement supérieur à la prévision" à la fin du mois de mai. Côté sécurité sociale, un risque de dérapage des dépenses est également pointé : il est évalué à 1,3 milliard d'euros à la fin de l'année.
Des mesures de correction ont déjà été prises cette année par le gouvernement, à savoir l'annulation de 2,7 milliards d'euros de crédits des ministères et la "mise en réserve" de 2,3 milliards d'euros supplémentaires. Mais elles ne seront pas suffisantes. Le gouvernement prévoit donc un plan d'économies de 1,7 milliard d'euros pour la sécurité sociale. Par ailleurs, 3 milliards d'euros de crédits supplémentaires de l'État doivent être mis en réserve. Les détails seront abordés le 4 juillet lors d'une réunion des secrétaires généraux et des directeurs des affaires financières des ministères. Les élus locaux devront donc encore patienter pour savoir si des politiques portées par les collectivités locales seront affectées par les nouvelles coupes budgétaires.
Collectivités : des dépenses sous surveillance
L'état des lieux de l'exécution des dépenses du secteur public local à fin mai a également été abordé lors de ce comité d'alerte, et ce sur la base de la situation mensuelle comptable établie par la direction générale des finances publiques (DGFIP). Il ressort que l'exécution des dépenses d'investissement des collectivités est quasiment conforme à celle qui était attendue par Bercy. Mais les dépenses de fonctionnement des collectivités "présentent, à date, une progression supérieure à la prévision", en particulier du fait de la croissance de "3,4% par rapport à 2024" des dépenses de fonctionnement des communes et de leurs groupements. L'augmentation des dépenses de fonctionnement des départements et des régions est moins soutenue (respectivement + 1,4% et + 0,2%). "Ces hausses sont notamment portées par la progression des achats et charges externes (+ 8,6%) et des dépenses de personnel (+ 2,4%)", précise le document présenté lors de la réunion.
La dynamique des dépenses de fonctionnement du bloc communal est "pour beaucoup liée à des mesures conjoncturelles", telle que l'augmentation des cotisations au régime de retraite des fonctionnaires territoriaux, au "glissement de certaines compétences de l'État vers les collectivités et aux divers plans voulus par l'État", a soutenu notamment Joël Balandraud, maire d'Évron, qui représentait l'Association des maires de France (AMF).
Globalement, "l'évolution des dépenses des collectivités est maîtrisée", estime pour sa part Sébastien Miossec, rejetant de ce fait l'idée que celles-ci constituent "le problème des finances publiques". Le président délégué d'Intercommunalités de France, qui participait à la rencontre, souligne aussi que "la tendance à fin mai" mise à jour par la DGFIP "ne présage pas grand-chose de la situation en fin d'année". Le gouvernement ne tenterait pas de dire le contraire, ce dont se félicite l'élu. Le ministre de l'Aménagement du territoire, François Rebsamen, aurait même déclaré que les chiffres sur l'évolution des dépenses locales étaient "à prendre avec prudence", car n'étant "pas représentatifs d'une tendance annuelle".
Concertation sur les arbitrages concernant 2026
Une troisième réunion du comité d'alerte des finances publiques est d'ores et déjà programmée pour septembre prochain. Et dans un contexte politique et économique fragile, il est possible qu'il débouche sur de nouvelles annonces de gel de crédits.
D'ici là, le Premier ministre dévoilera - autour du 14 juillet - les grands arbitrages qui figureront dans le projet de budget pour 2026. Et donc les mesures décidées pour associer le secteur public local à la maîtrise des finances publiques. Une question qui était bien à l'esprit des élus locaux, ce 26 juin. Luc Waymel, maire honoraire de Drincham, qui représentait l'association des maires ruraux de France a estimé que des alternatives existent. L'État pourrait réaliser des économies substantielles, selon lui, en attribuant les dotations de soutien à l'investissement local directement via la dotation globale de fonctionnement (DGF). L'instruction "coûteuse" des dossiers de candidature à l'octroi de ces dotations serait ainsi évitée.
Lors de la réunion, François Rebsamen aurait validé la demande des élus locaux selon laquelle une concertation devrait être engagée sur les décisions retenues par François Bayrou s'agissant des finances des collectivités. Il aurait promis d'organiser une "conférence des territoires" sur le sujet.