Le gouvernement annonce de nouvelles mesures pour améliorer le tri des déchets

Poubelles jaunes de tri dans les lieux publics, retour de la consigne sur les pots et bouteilles en verre, incitations et pénalisations financières : la secrétaire d'Etat à l'Ecologie, Bérangère Couillard a annoncé ce 22 juin une série de mesures pour tenter d'améliorer le tri et le recyclage des déchets ménagers et emballages. Mais sur l'épineux sujet de la consigne des bouteilles en plastique, objet d'un bras de fer avec les collectivités, les décisions sont reportées à "fin septembre".

Bérangère Couillard, secrétaire d'Etat chargée de l'Ecologie, devait réunir ce 21 juin au matin au ministère de la Transition écologique les différentes parties prenantes (industriels, distributeurs, ONG, associations d'élus et de consommateurs…) pour leur présenter "le bilan et les enseignements des concertations sur la collecte des déchets d'emballages et la consigne". Annulée la veille au soir, la rencontre s'est transformée en entretien téléphonique de la secrétaire d'Etat avec quelques journalistes ce 22 juin pour annoncer de nouvelles dispositions visant à améliorer le tri des déchets.   

Première mesure concrète annoncée par Bérangère Couillard : le retour d'ici à deux ans de la consigne sur les emballages alimentaires en verre. Des expérimentations vont démarrer l'an prochain dans des enseignes d'hypermarchés volontaires qui vont reprendre des emballages vides réutilisables. Parallèlement, un fonds de 50 millions d'euros est destiné à inciter les producteurs de pâtes à tartiner, de sauces ou de sodas, à adopter des contenants en verre standard et réutilisables au lieu du plastique jetable.

Performances à améliorer

En France, le réemploi des emballages ménagers reste "très inférieur à 1%", selon le ministère de la Transition écologique, alors que l'objectif est de parvenir à 10% d'emballages réemployés en 2027. Globalement Paris a été épinglée au début du mois par Bruxelles pour ses performances insuffisantes en matière de gestion des déchets ménagers, surtout sur les emballages plastiques (lire notre article). Environ 23% seulement des emballages plastiques sont collectés et recyclés en France, avec un taux de collecte des bouteilles qui plafonne à 60% en 2021 et 2022, alors que la consommation des bouteilles plastiques est repartie à la hausse de 4% en 2022, souligne le ministère. Or l'objectif officiel est de sortir du plastique à usage unique en 2040, et d'atteindre dès 2025 50% d'emballages plastiques recyclés. "Si nous restons sur cette trajectoire, à ce rythme, en 2029 nous n'arriverons même pas aux objectifs fixés pour 2025", a déploré la secrétaire d'Etat.

La "mère des batailles, c'est de baisser la production de plastique" a-t-elle ajouté. Elle envisage ainsi "d'interdire les plastiques non recyclables d'ici 2025", en citant notamment "les barquettes alimentaires noir de carbone type sushi" et le "polystyrène expansé et ses billes blanches".

Consigne sur les bouteilles en plastique : "rediscuter de différents scénarios"

Côté plastique, elle a aussi confirmé que la décision attendue sur la création d'une consigne pour recyclage sur les bouteilles en plastique usagées avait été "reportée" à "fin septembre". Ce report doit permettre, selon elle, de "rediscuter de différents scénarios" entre toutes les parties prenantes : industriels de l'agroalimentaire, du recyclage, du plastique, des déchets, collectivités, associations de consommateurs, ONG environnementales, etc.

Depuis le vote de la loi sur l'économie circulaire (Agec) il y a deux ans, et surtout depuis l'ouverture d'une concertation sur la consigne en janvier, une bataille rangée oppose industriels des boissons et du recyclage aux collectivités locales gestionnaires des centres de tri des déchets, autour de la propriété des bouteilles usagées, une matière première très convoitée.

Si la consigne des bouteilles plastiques était mise en place, notamment à la sortie des supermarchés, les bouteilles usagées échapperaient au service public des centres de tri qui ont pourtant beaucoup investi ces dernières années pour augmenter leurs volumes de tri et se financent sur la vente des ballots de plastique destinés au recyclage.

Poubelles jaunes de tri dans les rues

Autre mesure mise en avant par Bérangère Couillard : la mise en place progressive de poubelles jaunes de tri des emballages recyclables dans les rues, les zones touristiques, les entreprises, et les lieux recevant du public, qui échappent jusqu'à présent au tri sélectif des déchets. "Dans les poubelles de rue nous avons du mal à trier et donc in fine à recycler les plastiques", a-t-elle reconnu. Or ces poubelles recueillent beaucoup de bouteilles et canettes recyclables, surtout sur les lieux de passage et festifs, ainsi que dans les entreprises.

Côté ménages, la secrétaire d'Etat souhaite encourager la "tarification incitative" pour les déchets afin de faire payer ceux qui trient mal, ou des bonus-malus. "Plus les Français trient, moins ils paient" résume-t-elle. La tarification incitative couvre déjà 7 millions de Français, dans des villes comme la Roche-sur-Yon, Besançon ou dans des communautés rurales comme la Dombes dans l'Ain, a-t-elle souligné.

Intercommunalités de France fustige la méthode

Les annonces de la secrétaire d'Etat ont fortement irrité Sébastien Martin, président d'Intercommunalités de France. "La méthode est totalement inacceptable : un report par quatre fois de la réunion concluant la concertation, des annonces faites à la hâte ce matin à la presse sans que les associations d’élus n’aient été mises au courant... Madame Couillard ne semble aucunement prendre la mesure du rôle des collectivités territoriales dans la transition écologique. Les déchets sont une compétence des Intercommunalités et rien ne sera fait sans elles", a-t-il réagi. "Il est dommage qu’il faille attendre que la secrétaire d’Etat soit dos au mur pour qu’elle daigne enfin reprendre à son compte un certain nombre de nos propositions. Cela fait des mois que nous parlons de l’importance du hors foyer pour atteindre les objectifs de collecte. Maintenant, il faut renoncer clairement et définitivement à ce projet de fausse consigne sur les bouteilles en plastique qui est une ineptie."