Archives

Patrimoine - Le Sénat veut renforcer la dimension de recherche de l'archéologie préventive

Le rapport d'information des sénateurs Pierre Bordier (UMP) et Yves Dauge (PS, qui n'est plus sénateur depuis le 30 septembre 2011), fait au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication et consacré à l'"Archéologie préventive : pour une gouvernance au service de la recherche", a un grand mérite. Il ne parle - presque - pas des difficultés financières récurrentes de l'Institut national de recherches archéologiques préventives (voir notre article ci-contre du 4 novembre 2011).
Le rapport s'attache en effet à la dimension scientifique des activités de l'Inrap. Il détaille donc ce que les deux auteurs appellent "une chaîne complexe au service de la science", en s'attardant sur le contenu et l'enchaînement des différentes étapes : projet d'aménagement, diagnostic, rapport de diagnostic, fouilles, rapport de fouilles, recherche et valorisation. Il rappelle également les principaux chiffres : 32.524 dossiers d'aménagement instruits en 2010 (contre 28.125 l'année précédente) et 2.389 diagnostics prescrits (contre 1.922), soit un taux de prescription de 7,35%. Il restitue également le contexte récent de l'archéologie préventive, marqué par une montée en charge des opérateurs privés (au nombre d'une vingtaine), face à l'Inrap - qui reste néanmoins prédominant - et aux 64 services archéologiques de collectivités territoriales. Le rapport constate une certaine "dispersion des efforts" en matière de recherche, avec un nombre important de travaux, mais "le sentiment d'un pilotage défaillant". Les rapporteurs déplorent notamment la méfiance et le refus de dialogue qui règnent entre les agents de l'Inrap et ceux des opérateurs privés et "ne peuvent que regretter ce type de comportement préjudiciable à la réalisation des objectifs scientifiques de l'archéologie préventive". Enfin - parce qu'il fallait bien que les difficultés financières de l'Inrap remontent à la surface -, ils s'inquiètent des conséquences de ces dernières sur le retard accumulé dans la production des rapports de fouille.

Associer personnels territoriaux et secteur privé

Face à ce constat mitigé, les deux sénateurs formulent quatorze préconisations. La première concerne évidemment les moyens de l'archéologie préventive. Sur ce point, le rapport plaide pour une réforme de fond de la redevance d'archéologie préventive, passant notamment par "l'orientation d'une partie de la future taxe d'aménagement vers l'archéologie". Il suggère également de "sanctuariser" 10 à 11 millions d'euros dans le budget de l'Inrap, afin d'assurer la mission de recherche de l'Institut. En matière de gouvernance, les rapporteurs préconisent de renforcer la mission de pilotage de la recherche en réformant le Conseil national de la recherche archéologique (CNRA), mais aussi les commissions interrégionales de la recherche archéologique (Cira), qui "garantissent la légitimité scientifique et donc la crédibilité du régime de l'archéologie préventive".
Compte tenu du constat formulé sur le sujet, le rapport fait également une proposition audacieuse en suggérant de "prévoir le développement de projets de recherche pilotés par l'Inrap, qui intégreraient des personnels des services archéologiques territoriaux et des opérateurs privés agréés" (qui pourraient alors bénéficier d'une allocation en jours-homme de recherche). Dans le même esprit, il préconise d'associer les opérateurs privés aux travaux du CNRA et d'organiser, tous les trois ans, des "entretiens de l'archéologie préventive" réunissant tous les acteurs, ainsi que les aménageurs. Plus en amont, le rapport recommande d'encourager le dialogue entre aménageurs et services régionaux de l'archéologie (SRA), ainsi que les demandes volontaires de diagnostic. De même, il recommande de prévoir une assistance à maîtrise d'ouvrage auprès des aménageurs, afin de les aider à mieux appréhender les enjeux en matière d'archéologie préventive et à transcrire, dans les cahiers des charges des marchés, les prescriptions de l'Etat.

Jean-Noël Escudié / PCA

Référence : Sénat, rapport d'information n°760 de Pierre Bordier et Yves Dauge, fait au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication sur "L'archéologie préventive : pour une gouvernance au service de la recherche".

 

Pour aller plus loin

Voir aussi

Abonnez-vous à Localtis !

Recevez le détail de notre édition quotidienne ou notre synthèse hebdomadaire sur l’actualité des politiques publiques. Merci de confirmer votre abonnement dans le mail que vous recevrez suite à votre inscription.

Découvrir Localtis