La French LegalTech porte la voix d’un secteur atypique

Les start up au carrefour de l’innovation technologique et du droit ont leur instance représentative : le groupe LegalTech de France Digitale. Deux co-animateurs du groupe, Philippe Laurence, Responsable des Affaires Publiques chez Doctrine et Cyril de Villeneuve, Senior Advisor chez Gino LegalTech expliquent les ambitions de ce groupe, ses réalisations et sa vision.

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Philippe Laurence

Responsable des Affaires Publiques chez Doctrine

 

Cyril de Villeneuve,

Senior Advisor chez Gino LegalTech

La French LegalTech pour porter la voix d’un secteur atypique

Favoriser les rencontres entre acteurs de la LegalTech, faire émerger des champions, dialoguer avec les instances représentatives des professionnels du droit et mettre l’innovation au service de l’accès au droit, telle est la feuille de route du groupe French LegalTech, créé en juillet 2019. Pourquoi (seulement) en 2019 ? « Le marché de la LegalTech en France ne s’est vraiment développé qu’à compter de 2016. Pour créer une telle structure, il était nécessaire de s’appuyer sur des acteurs suffisamment nombreux et générant déjà du chiffre d’affaires », explique Cyril de Villeneuve, Senior Advisor chez Gino LegalTech. « La preuve de cette maturité c’est qu’au sein du groupe siègent des concurrents dans une douzaine de domaines d’activités différents » se réjouit Philippe Laurence, Responsable des Affaires Publiques chez Doctrine.

 

La French LegalTech, un groupe sans équivalent

Rattaché à France Digitale, première communauté européenne de start-up avec 1800 membres, ce groupe n’a pour l’heure pas d’équivalent ailleurs. Si d’autres pays, comme le Royaume-Uni ou la Belgique, proposent des panoramas et des services dédiés à l’univers LegalTech, il n’existe pas de structure identifiée en tant que telle. Le groupe comptait 23 membres à sa création contre une petite quarantaine à date. Cela témoigne-t-il d’un ralentissement de la dynamique du secteur ? Non. C’est d’abord le résultat d’un certain élitisme. « On fait état dans certaines études de plusieurs centaines de LegalTech en France, mais pour intégrer notre groupe au sein de France Digitale, une start up doit être en activité, démontrer une forte volonté de croissance et jouer collectif » précise Philippe Laurence, qui identifie une autre cause à ce cercle restreint : l’accélération des rachats.

Le marché, qui reste toutefois éparpillé entre une multitude d’entreprises LegalTech, a besoin d’un porte-voix : « que ce soit dans un évènement ou dans le cadre d’une rencontre avec le garde des Sceaux, il importe d’être en groupe et de parler d’une voix commune », souligne Philippe Laurence. Outre des interventions à VivaTech ou aux Rendez-vous des Transformations du Droit, la French LegalTech, dialogue avec les instances professionnelles et les autorités publiques : « il y a une appétence des pouvoirs publics pour l’innovation, estime Cyril de Villeneuve, car l’innovation permet de gagner en efficacité dans le respect de la réglementation mais il s’agit maintenant de transformer les promesses en actions. Pour cela, la French LegalTech est un bon levier ».

 

La LegalTech en France, un secteur protéiforme

Selon un rapport rendu public mi-2021 (1), l’activité des professions juridiques pèse 44,3 milliards d’euros de chiffre d’affaires en France, soit 1,8% du PIB, et 361.000 emplois et 400.000 emplois et 2 % du PIB si on y ajoute les activités paralégales et la LegalTech. Cette dernière se caractérise par sa diversité que ce soit en offres de service (gestion de contrat, accès à l’information juridique, création d’entreprise, formalités …), en business model et en cibles.

Difficile donc de dresser un panorama LegalTech car du particulier aux cabinets d’avocats en passant par les entreprises de toutes tailles, les notaires, les commissaires de justice et les administrations, « il y a une myriade de solutions pour des segments de marchés très différents » résume Philippe Laurence, qui tient aussi à souligner l’internationalisation du secteur. Ce que confirme Cyril de Villeneuve : « la première édition de notre étude menée en avril 2021 auprès de 29 de nos membres a mis en exergue que deux tiers d’entre eux avaient déjà des clients européens ». « Depuis, des activités ont été créées en Europe, aux Etats-Unis, en Afrique du Nord ou subsaharienne, poursuit Philippe Laurence. Le droit français est attractif et la LegalTech est un pont ».

 

La LegalTech dans 5 ans : des leaders internationaux et des sociétés spécialisées

A l’heure actuelle, le secteur est en hyper-croissance - les entreprises LegalTech se développent sur des marchés connexes, complémentaires -mais garde sa spécificité : « une connaissance fine du métier est essentielle, les juristes et les marketeurs occupent un rôle particulièrement important dans cette phase de fort développement » précise Cyril de Villeneuve. Pour les deux représentants du secteur, comparer la LegalTech à d’autres secteurs ne fait pas sens car « c’est un secteur prudent, essentiellement BtoB, et dont les revenus financent sa propre croissance » assène Philippe Laurence. Une caractéristique qui, pour Cyril de Villeneuve, doit inciter à ne pas faire des levées de fond le seul critère d’appréciation : « il faut redonner son importance aux business model vertueux et à la recherche de la rentabilité ».

Le premier défi du secteur est le passage à l’échelle : « les entreprises doivent aller chercher 20 à 30% de parts de marché » projette Philippe Laurence. D’où de futures concentrations et des solutions qui doivent devenir mainstream : « il nous appartient de faire adopter nos solutions par le plus grand nombre renchérit Cyril de Villeneuve. Pour y parvenir, nous devons intensifier les partenariats avec les entreprises et cabinets d’avocats et faire davantage connaître nos offres au secteur public ».Autre marqueur selon les deux co-animateurs de la French LegalTech : dans un futur proche, le marché se répartira entre des leaders internationaux et de sociétés dotées d’expertise pointue dans leur domaine.

 

Solutions LegalTech : passer du potentiel de la data à l’usage de la data

Quant au futur des solutions, il passe par la création d’usages concrets de la data et donc l’exploitation et la valorisation des données. D’où la nécessité d’avancer sur l’open data des décisions de justice (notamment) : « En créant la French LegalTech, nous avons pu prendre part aux travaux de la Cour de cassation et du Conseil d’Etat. Outre les décisions de ces deux hautes juridictions, l’open data concerne désormais les décisions administratives de première et deuxième instance et de deuxième instance pour les décisions judiciaires. De prochaines vagues sont attendues à horizon 2025/2026.

Il y a bien d’autres données à débloquer, comme les numéros de rôle, les conclusion des rapporteurs publics » éclaire le Responsable des Affaires Publiques de Doctrine. « Dans un futur proche, les entreprises qui s’en sortiront le mieux seront celles qui intégreront plus d’intelligence artificielle, tout en offrant une expérience utilisateur intuitive et personnalisée et qui proposeront des intégrations natives aux applications tierces » conclut Cyril de Villeneuve.

 

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